En mode Bard, Google hausse le ton dans la bataille des IA

"Comme vous l’avez peut-être entendu, l’intelligence artificielle a eu une année très chargée." C’est par un grand sourire que Sundar Pichai, le grand patron d'Alphabet et de sa filiale Google, a lancé mercredi soir la conférence Google I/O.

Ce rendez-vous très attendu par les développeurs du monde entier a mis en lumière l'ampleur de l'investissement du géant technologique dans l'intelligence artificielle.

Les nouvelles offres comprennent des images créées de toutes pièces (en partenariat avec Adobe), des retouches automatiques de photos, des résumés et des propositions de textes dans Google Docs et même des discussions avec le moteur de recherche.

L’IA est directement intégrée dans la recherche Google. La première réponse à votre demande n’est pas un lien, mais un texte généré par l’intelligence artificielle. Dès lors, à vous de choisir entre une discussion avec le chatbot ou simplement poursuivre avec une présentation de lien, comme actuellement. Toutes ces innovations sont encore en test et seront ajoutées progressivement ces prochains mois.

Bard en démo

Mais la grande révélation de la soirée était Bard, l'intelligence artificielle de Google, conçue pour rivaliser avec ChatGPT. Bard est actuellement disponible dans 180 pays, mais pas en Suisse. Pour l'essayer, il faut utiliser un VPN pour simuler une localisation aux États-Unis. Bard ne parle qu'anglais, sans option de français pour l'instant.

Cependant, des essais préliminaires ont révélé que l'IA n'est pas encore parfaitement fonctionnelle. Bien qu'elle soit capable de générer des poèmes, elle a du mal à effectuer des recherches sur internet, produisant parfois des erreurs importantes et des informations incorrectes, appelées "hallucinations" dans le jargon de l'IA.

Chaque utilisation de Bard contribuera à son développement, les utilisatrices et utilisateurs aidant à entraîner la machine pour améliorer ses performances. L'importance de cette initiative est soulignée par l'ampleur de l'audience de Google: 8,5 milliards d'utilisateurs par mois. L'introduction de l'IA dans la recherche d'informations est donc un événement majeur. Une IA générative va filtrer l’accès à la connaissance numérique.

La conférence de Google a mis en lumière l'impact mondial de ces développements, avec des enjeux économiques, éthiques et politiques.

Un déploiement précipité

En 2018, lors de la conférence Google I/O, Sundar Pichai avait présenté une intelligence artificielle capable de gérer l'agenda d'un utilisateur. A la tribune, il avait diffusé un extrait d’une IA qui téléphone à un salon de coiffure pour fixer un rendez-vous. Un exemple simple pour que le monde comprenne la puissance de cette technologie.

À cette époque, Google était considéré comme le leader dans le domaine des intelligences artificielles. Cependant, avec l'émergence de ChatGPT en novembre dernier, l'équilibre des forces a changé. En seulement deux mois, ChatGPT a attiré 100 millions d'utilisateurs, montrant une nouvelle manière d'interagir avec internet: parler avec la machine pour obtenir des informations.

Cela a déclenché une alerte chez Google, qui a mobilisé ses développeurs pour ne pas être laissé pour compte dans cette course à l'IA. Cette urgence se reflète dans le déploiement précipité de Bard, qui, bien qu'imparfait, est un pas important pour Google, qui le conservait jusqu’à présent dans ses laboratoires.

Invisibilisation programmée des IA

Pourtant, au cours des prochains mois, nous devrions de moins en moins voir les IA génératives. Attention, elles ne disparaîtront pas, mais se fonderont plus discrètement dans nos interactions numériques.

Par exemple, Gmail, le service de messagerie de Google, introduira une nouvelle fonctionnalité appelée "Aide-moi à écrire". En cliquant sur un bouton, l'IA proposera une réponse complète et personnalisée au courriel reçu. C'est une application de l'IA générative qui rend son utilisation accessible à tous, facile et intuitive.

Cependant, il est important de rester prudent, car les erreurs et les inexactitudes sont encore présentes. Des experts ont tiré la sonnette d'alarme, soulignant que ces IA génératives augmentent le risque de désinformation. En effet, comment savoir si un texte a été écrit par un humain ou si une photo a été truquée? Ces questions prennent une nouvelle importance à mesure que l'IA se généralise.

Face à ces défis, l'Europe s'efforce de réguler les IA. Google a fait un premier pas dans cette direction en annonçant que toutes les images produites par ses IA porteront une balise indiquant leur origine. C'est une mesure proactive pour agir rapidement, avant d'y être contraint par la réglementation.

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Pascal Wassmer