Le projet à un milliard d'euros devait réussir à modéliser le cerveau humain par ordinateur, tout en boostant l'industrie européenne. Le Human Brain Project (HBP) a toutefois traversé de grosses crises. Au cours des dix années, la gouvernance, initialement basée principalement à l'EPFL, s'en est passablement éloignée.
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Au final, le programme de recherche n'a reçu que 600 millions d'euros, mais pour les voix critiques, les résultats restent insatisfaisants au vu du montant investi. Elles soulignent que le programme n'a pas tenu sa promesse de départ: la modélisation globale du cerveau par ordinateur.
Pour Christian Fauteux, directeur exécutif du HBP, cela n'était pourtant pas forcément le plus essentiel. "On s'est rendu compte en chemin que c'était plus utile de faire de la modélisation et de la simulation sur des parties spécifiques et sur des échelles spécifiques", affirme-t-il dans La Matinale de la RTS.
Atlas du cerveau
Le directeur exécutif se réjouit des résultats obtenus, notamment grâce à un atlas du cerveau extrêmement détaillé, qui permet de naviguer virtuellement dans le cerveau humain et d'interpréter les scanners réalisés à l'hôpital.
Ce genre d'outil peut par exemple aider à mieux cibler le traitement chirurgical de l'épilepsie. Les recherches sur la modélisation du cerveau du HBP ont par ailleurs débouché sur un dispositif pour rendre partiellement la vue aux personnes non-voyantes. "Ça ne permet pas de voir aussi bien que la vue normale, mais ça permet à ces patients de distinguer des lettres par exemple", explique-t-il.
"On a aussi développé une nouvelle technique pour évaluer avec précision le niveau de conscience des patients qui sont dans le coma pour voir s'ils sont réellement conscients et si ça vaut la peine de les réanimer", poursuit-il.
Bilan décevant
Alexandre Pouget, du département de neurosciences fondamentales de l'Université de Genève, ne nie pas l'existence de résultats positifs. Il estime toutefois que le bilan global est plutôt décevant.
"Indéniablement, il y a quelques beaux résultats qui sont sortis, à commencer par cet atlas du cerveau qui était une cartographie assez précise du cerveau humain", affirme-t-il. "Mais la grande question qui se pose c'est: est-ce qu'il y a assez de résultats pour justifier un investissement qui était absolument pharaonique?".
Le chercheur explique que les 600 millions d'euros d'investissement correspondent à ce qui a été investi sur la même période dans les neurosciences suisses. "Je pense que si on faisait la comparaison entre les neurosciences suisse et le HBP, malheureusement, le bilan du HBP me paraîtrait quand même un peu maigre", estime-t-il.
Pour la suite, le HBP a créé Ebrains, une infrastructure de recherche numérique, dont le financement n'est pas encore finalisé.
Lucia Sillig/edel