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Pourquoi la biodiversité s’éteint-elle plus vite en Suisse qu'ailleurs?

La biodiversité de la Suisse serait menacée plus rapidement d'extinction. [Keystone - Gabriel Monnet]
Pourquoi la biodiversité s'éteint-elle plus rapidement en Suisse qu’ailleurs? / La Matinale / 4 min. / le 11 janvier 2024
En comparaison internationale, les espèces menacées sont plus nombreuses en Suisse que dans le reste du monde, constate une nouvelle liste rouge annuelle de l'Union internationale pour la conservation de la nature, publiée fin 2023. Ce constat est particulièrement marqué pour les amphibiens et les oiseaux.

Au niveau mondial, 40% des espèces d'amphibiens sont menacées. En Suisse, elles sont 80%. En ce qui concerne les oiseaux, ils sont 12% à être menacés à l'échelle mondiale contre 40% en Suisse, observe l'association de protection de la nature Birdlife.

La pie-grièche à tête rousse illustre bien pourquoi la biodiversité souffre plus en Suisse qu'ailleurs avec la disparition de son habitat, les vergers à hautes tiges.

Un territoire densément peuplé

Mais alors comment expliquer une telle différence en comparaison internationale? Tout d'abord, la Suisse possède un territoire petit, densément peuplé et construit avec beaucoup de routes. Cela crée des mailles serrées qui empêchent les espèces de se déplacer d'un espace à l'autre. Nous avons aussi grignoté sur les berges et asséché les marais. Et le territoire est cultivé de manière plus intensive que d'autres pays européens.

En outre, nous avons densifié là où la biodiversité est la plus riche, c'est-à-dire en plaine, explique Beat Oertli, professeur à l'HEPIA, spécialiste en gestion des milieux aquatiques et conservation des espèces, jeudi dans La Matinale. "On a 9 millions d'habitants qui sont concentrés sur un tiers du territoire. Il s'agit en plus de la partie du territoire où la richesse est la plus élevée en amphibiens. Là où sont présentes les espèces, il y a une très forte pression", détaille Beat Oertli.

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Une initiative collective

Il existe toutefois des initiatives pour favoriser la biodiversité. En collaboration avec l'agriculture, BirdLife a réussi à recréer un habitat pour le vanneau huppé, un oiseau menacé. "Le défi est de pouvoir associer l'agriculture et la biodiversité", explique François Turian, directeur romand de l'association, jeudi dans La Matinale.

Le vanneau huppé figure sur la liste des espèces potentiellement menacées. [birdlife.ch - Michael Gerber]
Le vanneau huppé figure sur la liste des espèces potentiellement menacées. [birdlife.ch - Michael Gerber]

"Il faut davantage de zones productives pour l'agriculture, mais quand même des poches suffisamment grandes pour pouvoir héberger des colonies de cet oiseau. C'est une espèce qui est normalement sociable et qui, pour nicher, va s'installer dans des prairies ou des cultures", poursuit-il.

Grâce à ce projet, une trentaine de couples de vanneaux se sont installés dans la région du Grand-Marais. "On va essayer de multiplier ces exemples dans d'autres parties du pays pour tenter de recréer une population de vanneaux sur le plateau suisse".

Loi sur la biodiversité

Au niveau national, la Suisse reste encore trop peu active en matière de lutte pour la biodiversité, selon François Turian. L'Europe, elle, vient d'adopter la loi sur la restauration écologique. Elle s'engage à renaturer 20% de son territoire d'ici à 2030. En Suisse, la prochaine échéance politique, sera en principe cette année, avec la votation sur la loi sur la biodiversité.

Pour Beat Oertli, on pourrait aussi saisir des opportunités, conjuguer des besoins humains et environnementaux, pour lancer des projets. "On a aujourd'hui des besoins en eau donc on pourrait, par exemple, recréer des milieux aquatiques pour le bétail ou des réserves d'eau pour prévenir des incendies".

Des gestes simples à adopter

Au niveau individuel, il existe également des gestes simples à adopter pour protéger la biodiversité comme ne pas relâcher son poisson rouge dans la rivière ou tenir son chien en laisse dans la forêt. Pour les propriétaires d'un jardin, un étang, même très petit, va créer du logement pour des batraciens, des insectes.

Selon une étude menée en Argovie, la création de gouilles artificielles a un impact: les batraciens ont colonisé ces nouveaux plans d'eau et les effectifs de dix espèces sur les 12 suivies ont augmenté.

Alexandra Richard/hkr

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