L'auteur du triple homicide de Vevey (VD) n'échappera donc pas à
la réclusion à vie. A l'issue du deuxième procès, la Cour a
confirmé jeudi sur toute la ligne le premier jugement et reconnu ce
quadragénaire d'origine indienne coupable du meurtre de sa mère et
des assassinats d'une amie de celle-ci ainsi que de sa soeur.
La Cour avec jury a ainsi écarté le témoignage-clé d'une
boulangère de Vevey qui prétendait avoir vu deux des victimes le 24
décembre, à une heure où les enquêteurs les tenaient déjà pour
mortes. Ce témoignage avait permis à l'accusé d'obtenir la révision
de son procès. Comme le Ministère public, le tribunal a estimé que
ce témoignage n'était pas probant, malgré les confirmations
catégoriques de la boulangère.
Selon la Cour, cette dernière a fait une erreur et a confondu le
24 décembre avec le 23 décembre. Ce jour-là, la mère de l'accusé et
sa soeur s'étaient en effet rendues à Vevey et ont pu se rendre à
la boulangerie.
Hypothèse de la pression écartée
Le tribunal a également écarté les affirmations de l'accusé
selon lesquelles il aurait, sous la pression des enquêteurs,
modifié sa version des faits pour inventer sa présence chez sa mère
le jour du drame. Les témoignages et son attitude au procès ont
montré qu'il était un homme déterminé, obstiné et difficilement
influençable, a estimé le tribunal.
Au final, la Cour a abouti au même scénario que celui retenu par
le premier jugement: il a estimé que l'accusé, financièrement aux
abois, s'est présenté chez sa mère le 24 décembre en vue de la
convaincre de le soutenir. La discussion a mal tourné et sa mère
s'est emparée d'une paire de ciseaux, blessant son fils au pouce.
L'octogénaire est tombée dans l'escalier. Par la suite, l'accusé a
éliminé les témoins gênants, soit l'amie de sa mère et sa
soeur.
En l'absence de
cadavre et d'aveux, le tribunal ignore comment l'accusé a tué sa
soeur, mais il est convaincu de sa culpabilité. Dans les deux jours
suivants, il a eu le temps de nettoyer les lieux du drame et de se
débarrasser du corps de sa soeur, portée disparue depuis le 24
décembre 2005. Les corps des deux octogénaires avaient été
retrouvés le 4 janvier 2006 par le jardinier. Déjà en état de
décomposition, ils avaient été identifiés grâce aux comparaisons
ADN et dentaires. Les autopsies avaient montré que les victimes
étaient décédées suite à de multiples lésions traumatiques
vraisemblablement provoquées par un objet contondant.
La défense choquée
La défense, qui plaidait l'acquittement, va faire recours. "Le
doute doit profiter à l'accusé", a déclaré à la presse Me Pierre de
Preux, un des avocats de l'accusé. "Or ici, tous les éléments
douteux ont profité à l'accusation", a-t-il ajouté. "Nous sommes un
peu choqués par cette décision qui viole la présomption
d'innocence", a souligné son collègue, Me Robert Assaël. "On se
battra jusqu'au bout pour que notre client soit acquitté".
Le Ministère public pour sa part s'est déclaré satisfait de ce
jugement. "J'ai toujours été convaincu que le jugement du Tribunal
de Vevey était juste", a déclaré le procureur général Eric Cottier.
Le deuxième procès aboutit au même résultat. Je suis satisfait de
cette issue".
ap/ther
Rappel des faits
Le drame éclate au grand jour le 4 janvier 2006. Les cadavres de deux femmes octogénaires sont découverts au pied des escaliers d'une villa de Vevey.
Leur décès remonte probablement au 24 décembre, même si la détérioration des corps rend impossible toute certitude. Des coups ou leur chute ont causé la mort de la propriétaire des lieux (81 ans) et de son amie bâloise (80 ans) en visite.
A ces deux cadavres s'ajoute la disparition de la fille, médecin généraliste à Vevey née en 1949. Celle-ci n'a jamais été retrouvée malgré des recherches et des fouilles pratiquées tout au long de l'enquête. Son passeport avait été découvert dans la maison.
Début février, le fils adoptif est arrêté. Ce Veveysan né en 1964 ne ressortira plus de prison. La famille est aisée et connue dans la région. Des disputes financières liées aux droits successoraux sont établies, mais leur interprétation demeure contestée.
L'accusé se serait trouvé à cours de liquidités à la fin de l'année 2005 et sa mère aurait refusé de continuer à lui avancer de l'argent. A l'issue du premier procès, la Cour avait jugé que le fils aux abois avait agressé sa mère, puis supprimé l'amie, témoin gênant, ainsi que sa soeur, se rendant coupable d'un triple homicide.