Un vaccin contre le virus Ebola est actuellement testé aux Hôpitaux universitaires de Genève. Journaliste à l'émission de la RTS Mise au Point, Gilles Clémençon a participé à l'essai clinique. Le récit de son expérience.
"J'ai testé le vaccin contre Ebola"
Mercredi 5 novembre
L'inscription sur internet
Un vaccin contre le virus Ebola va être testé aux Hôpitaux universitaires de Genève. Le VSV-ZEBOV, développé par la recherche publique du Canada, est stocké aux HUG qui sont l'un des six lieux où se dérouleront des essais cliniques.
Alors que l'épidémie de fièvre hémorragique fait des ravages en Afrique de l'Ouest, Gilles Clémençon de Mise au Point a choisi d'allier intérêt personnel et expérience journalistique. Outre une contribution à la recherche médicale, c'est l'occasion de découvrir les différentes étapes de la mise sur le marché d'un vaccin.
Première étape: s'inscrire par le biais d'un formulaire sur internet. Objectif: être retenu comme volontaire.
Mardi 25 novembre
Le check-up complet
Le premier rendez-vous constitue un premier test pour les cobayes potentiels. L'engagement est assez lourd: l'étude dure six mois au cours desquels ont lieu neuf rendez-vous.
Pour pouvoir tester un vaccin, il faut être en très bonne santé et ne pas avoir d'antécédents médicaux qui pourraient représenter un risque pour l'étude, des allergies par exemple.
Chaque cobaye doit connaître les risques et des précautions à prendre lors de tels essais cliniques. Après la vaccination, il convient notamment de limiter les contacts physiques.
Ils ont même appelé mon pédiatre à la retraite (...) On a toujours peur qu'ils découvrent quelque chose qu'on ignore
Un certain nombre de candidats sont écartés à cette étape. Au final, sur 300 volontaires, 115 seront retenus. Priorité est donnée aux travailleurs humanitaires et aux personnes amenées à se rendre dans un des pays frappés par l'épidémie.
Lundi 1er décembre
Le jour J
L'heure de la piqûre est venue. Alors que les personnes amenées à se rendre en Afrique de l'Ouest dans un futur proche sont assurées de recevoir le vaccin, les autres volontaires peuvent se voir inoculer un placebo, une dose moyenne ou une dose forte du VSV-ZEBOV.
Après l'injection, le volontaire doit rester une heure et demie en observation à l'hôpital pour prévenir tous risques de réaction allergique. Ensuite vient l'heure du retour chez soi.
Mardi 2 décembre
Les symptômes
De retour chez lui, le volontaire doit documenter tous les symptômes qu'il observe. Normalement, les premières réactions n'interviennent que 24 heures après la vaccination.
J'ai eu des courbatures, des frissons et jusqu'à 39 degrés de fièvre. Mais peut-être était-ce la grippe? En décembre, ce n'est pas improbable
Dans les semaines qui suivent, plusieurs rendez-vous sont prévus pour effectuer des prises de sang afin d'observer comment le corps réagit et si des anticorps se développent.
Jeudi 11 décembre
Le test suspendu
Quatre des trente premiers volontaires ont eu des douleurs articulaires de type rhumatismal non prévues par les scientifiques. Les chercheurs décident donc de suspendre l'essai clinique afin de s'assurer que les symptômes ne s'aggravent pas.
Pour les HUG, il s'agit d'une mesure de précaution
"Dans des tests dits de phase 1, c'est-à-dire lorsque des vaccins sont testés pour la première fois sur l'homme, le but premier des chercheurs est d'assurer la sécurité du vaccin par rapport aux effets secondaires qu'il provoque, plus que son efficacité face au virus. Cela sera validé par la suite", précise Gilles Clémençon.
Même si les symptômes observés ressemblent à ceux que pourraient provoquer le vaccin, le volontaire devra attendre la fin de l'étude, soit le printemps, pour savoir s'il a - ou non - reçu une dose du VSV-ZEBOV.
Lundi 5 janvier
Reprise des vaccinations
Les volontaires recommencent à être vaccinés aux HUG, avec l'accord de Swissmedic. La dose injectée a néanmoins été revue à la baisse. Elle est presque 17 fois moins forte que ce qui était donné aux premiers volontaires.
Les chercheurs sont engagés dans une course contre la montre. Ils espèrent pouvoir confirmer que le vaccin ne présente pas d'effet secondaire grave afin de pouvoir l'envoyer d'ici le printemps en Afrique de l'Ouest
>> Pour en savoir plus sur l'étude:
Claire-Anne Siegrist, cheffe du Centre de vaccinologie aux HUG, explique ce qu'est le VSV-ZEBOV et les objectifs de l'étude qu'elle pilote
Sur place, le bilan continue à s'aggraver. Selon les chiffres de l'Organisation mondiale de la santé publiés le 8 janvier, il s'élève à 8235 morts et 20'747 cas depuis mars 2014.
Dimanche 12 janvier
Le reportage de Mise au Point
Plus de deux mois après le premier coup de fil, le reportage de Mise au Point est prêt. L'étude, elle, continue.
Juliette Galeazzi avec Gilles Clémençon