Philibert Frick est vigneron au domaine A Villars sur les coteaux de Féchy (VD). Il est tombé dans la marmite sur le tard. Avant d'être vigneron, un métier qu'il pratique depuis dix ans, Phillibert Frick a été actif dans la finance et l'industrie. Alors, les premières fois qu'il s'est retrouvé devant ses ceps de vigne, sécateur en main, ça l'a fait cogiter.
"Quand on est devant un plant de vigne, quand on est novice et qu'on n'est pas né dedans, on se pose beaucoup de questions. On voit beaucoup trop de possibilités. Surtout que chaque coupe a une importance, car elle mutile la plante."
Saison après saison, il se demande donc comment faire pour optimiser la taille. Il finit par mettre au point, en collaboration avec un institut de recherche, des lunettes capables de reconnaître les nœuds de la vigne et les branches. Des repères importants pour savoir où il est le plus indiqué de couper, comme l'explique le vigneron vaudois.
"L'intelligence artificielle analyse le plant de vigne et c'est une aide à la décision pour le tailleur, car ça donne une indication où tailler. Elle indique où couper sur la réserve et où couper sur la branche à fruit, et laisser la branche à fruit de l'année en cours."
Nouveaux développements attendus
Intégré dans les lunettes, le logiciel reste à ce stade encore trop difficile à exploiter pour le tailleur et nécessite de nouveaux développements avant une potentielle commercialisation. Dans le milieu de la viticulture, on suit toutefois l'avancée de cette technologie avec attention.
"Les vignerons formés savent normalement tailler. Mais le problème après, comme la taille passe souvent par de la main d'oeuvre non formée, ça peut devenir compliqué. C'est pourquoi il est important de bien former son personnel qui n'est peut-être pas vigneron", souligne Markus Rienth, professeur HES en viticulture à Changins.
Le problème, avec une mauvaise taille, c'est qu'on peut faire de sacrés dégâts: "Ici, vous voyez un cas très extrême où on a dû couper le tronc. Et bien évidemment, c'est une porte d'entrée pour différents types de champignons."
Ces champignons sont responsables du dépérissement du vignoble, qui est devenu depuis plusieurs décennies un problème mondial. Alors, si ces lunettes ne pourront pas l'éradiquer, Philibert Frick espère pouvoir au moins le ralentir. Mais pour cela, il lui faudra encore convaincre des investisseurs et s'armer de patience.
Thomas Epitaux-Fallot/fgn