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Découverte d'une étoile binaire très proche du trou noir supermassif de notre galaxie

L'emplacement de l'étoile binaire D9, récemment découverte, qui est en orbite autour de Sagittarius A*, le trou noir supermassif au centre de notre galaxie. [ESO - F. Peißker & al., S. Guisard]
Le trou noir supermassif de notre galaxie n'est pas aussi destructeur que prévu / Le Journal horaire / 23 sec. / le 17 décembre 2024
Une équipe de recherche a découvert l'étoile binaire la plus proche jamais détectée autour de Sagittarius A*, le trou noir supermassif au centre de notre galaxie, suggérant que ce dernier n'est pas aussi destructeur que prévu.

Les systèmes d'étoiles binaires – deux étoiles orbitant l'une autour de l'autre – sont très répandues dans l'Univers et constituent 50% des étoiles de notre galaxie.

Mais au centre de la Voie Lactée, où se trouve le trou noir supermassif Sagittarius A* (Sgr A*), on les compte "sur les doigts d'une main": seuls cinq systèmes doubles y ont été détectés à ce jour, explique Emma Bordier, astrophysicienne à l'Université allemande de Cologne et coautrice de l'étude publiée mardi dans Nature Communications.

Cette région est considérée "comme l'une des plus extrêmes" de notre galaxie, en raison de "l'immense influence gravitationnelle du trou noir supermassif, qui entraîne des orbites stellaires très excentriques et à grande vitesse, ainsi que des forces de marée capables de perturber et détruire les potentiels systèmes binaires", ajoute la chercheuse.

La découverte de l'étoile binaire montre que les trous noirs de cette taille "ne sont pas aussi destructeurs" que prévu, résume dans un communiqué de l'Observatoire européen austral (ESO) l'auteur principal de l'étude Florian Peissker, de l'Université de Cologne.

Un très jeune système stellaire

Baptisé D9, ce système double se situe dans un groupe dense d'étoiles et d'autres objets en orbite autour de Sgr A*, baptisé "amas S". Lors de ses passages les plus proches, il se trouve à seulement 0,12 année lumière du trou noir. En comparaison, Proxima du Centaure, l'étoile la plus proche du Soleil, se trouve à une distance 40 fois plus grande que ne l'est D9 de Sgr A*.

La détection de l'étoile double a été possible grâce à des données obtenues sur une longue période avec deux spectrographes du Very Large Telescope (VLT) – SINFONI (2005-2019), puis ERIS (mis en service en 2022).

Selon Michal Zajaček, coauteur de l'étude et chercheur à l'Université Masaryk, en République tchèque, et à l'Université de Cologne, le système D9 "montre des signes clairs de la présence de gaz et de poussière à proximité des étoiles". Ce qui suggère "qu'il pourrait s'agir d'un très jeune système stellaire qui a dû se former à proximité du trou noir supermassif", ajoute-t-il.

L'équipe de recherche estime que D9 n'a que 2,7 millions d'années, et la force gravitationnelle du trou noir le fera probablement fusionner en une seule étoile en l'espace d'un million d'années seulement.

>> Lire : Une très jeune étoile vue près du trou noir au centre de notre galaxie

Cette jeunesse le rend encore un peu plus unique en son genre, alors que les cinq autres systèmes doubles découverts à ce jour sont des étoiles massives, voire très massives, plus évoluées.

Les scientifiques pensaient que les conditions extrêmes à proximité d'un trou noir empêchaient la formation de nouvelles étoiles et que celles qui s'y trouvaient se formaient dans des régions plus propices avant de migrer vers le centre galactique au cours de leur vie.

Tout est possible autour d'un trou noir supermassif

Emma Bordier, astrophysicienne, coautrice de l'étude

Pourtant, des observations ont montré que cette région était "paradoxalement peuplée de jeunes étoiles". La découverte d'une jeune étoile binaire "montre encore une fois que tout est possible autour d'un trou noir supermassif", souligne Emma Bordier.

Cette découverte jette aussi un nouvel éclairage sur les "objets G", les objets les plus mystérieux de l'amas S, qui se comportent comme des étoiles mais ressemblent à des nuages de gaz et de poussière. L'équipe suggère qu'il pourrait s'agir d'une combinaison d'étoiles binaires qui n'ont pas encore fusionné et de matériaux résiduels provenant d'étoiles déjà fusionnées.

La détection de D9 permet en outre de spéculer sur la présence de planètes dans le centre galactique, car celles-ci se forment souvent autour de jeunes étoiles. "Il semble plausible que la détection de planètes dans le centre galactique ne soit qu'une question de temps", selon Florian Peissker.

afp/sjaq

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