Une anomalie a été identifiée sur une valve de la fusée Atlas V qui doit propulser la capsule Starliner en orbite, a annoncé le constructeur du lanceur, le groupe United Launch Alliance (ULA). "L'équipage n'a jamais été en danger", a par ailleurs assuré lors d'une conférence de presse Tory Bruno, le patron de ULA, une coentreprise réunissant Boeing et Lockheed Martin.
ULA a indiqué qu'une nouvelle tentative, dépendant de l'analyse réalisée par ses équipes, pourrait avoir lieu vendredi au plus tôt: "Les équipes ont besoin de temps supplémentaire pour faire une évaluation complète, nous nous fixons comme objectif une prochaine tentative le vendredi 10 mai au plus tôt", a écrit ULA sur le réseau social X.
Les astronautes Butch Wilmore et Suni Williams devaient décoller dans la soirée lundi de Cap Canaveral, en Floride. Les préparatifs s'étaient d'abord passés sans problème: la fusée avait été remplie de carburant, la météo était idéale et les astronautes étaient installés dans leur siège. L'homme de 61 ans et la femme de 58 ans devront finalement encore patienter.
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Gros enjeux pour Boeing et la NASA
Boeing joue gros sur cette ultime mission test, qui doit permettre à son vaisseau de rejoindre le club très privé des véhicules spatiaux ayant transporté des êtres humains. Le géant de l'industrie aérospatiale doit démontrer que sa capsule est sûre avant de commencer les missions régulières vers la Station spatiale (ISS), avec quatre ans de retard sur SpaceX.
Pour la NASA, qui a commandé ce véhicule il y a dix ans, l'enjeu aussi est grand: avoir un deuxième véhicule en plus de celui de SpaceX pour transporter les astronautes des Etats-Unis devra permettre de mieux répondre à "différents scénarios" d'urgence, par exemple en cas de problème sur l'un des vaisseaux, a souligné Dana Weigel, chargée du programme de l'ISS.
La réussite de cette mission serait par ailleurs plus que bienvenue pour Boeing, dans la tourmente pour des problèmes de sécurité sur ses avions (lire encadré), et dont le programme de développement de Starliner s'est transformé en saga marquée par les mauvaises surprises et les reports successifs.
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En 2019, lors d'un premier test sans équipage, la capsule n'avait pas pu être placée sur la bonne trajectoire et était revenue sans atteindre l'ISS. Puis en 2021, alors que la fusée se trouvait sur le pas de tir pour retenter le vol, un problème de valves bloquées, cette fois sur la capsule, avait encore entraîné un report. Le vaisseau vide avait finalement réussi à atteindre l'ISS en mai 2022.
Boeing avait ensuite espéré pouvoir réaliser son premier vol habité la même année. Mais des problèmes découverts tardivement, notamment sur les parachutes freinant la capsule lors de son retour dans l'atmosphère, ont de nouveau engendré des retards.
"Il y a eu un certain nombre de choses qui ont été des surprises, que nous avons dû surmonter", a reconnu Mark Nappi, responsable chez Boeing. Mais "cela a rendu nos équipes très fortes", a-t-il affirmé: "Il est assez classique que le développement d'un véhicule spatial pour humains prenne dix ans".
Viser l'indépendance
Seule une poignée de vaisseaux américains ont transporté des astronautes par le passé. La capsule Dragon de SpaceX a rejoint cette liste en 2020, succédant aux mythiques programmes Mercury, Gemini, Apollo et des navettes spatiales.
Après l'arrêt des navettes spatiales en 2011, les astronautes de la NASA ont dû voyager à bord des vaisseaux russes Soyouz. C'est pour mettre fin à cette dépendance qu'en 2014, l'agence spatiale américaine a passé un contrat de 4,2 milliards avec Boeing et de 2,6 milliards avec SpaceX pour le développement de nouveaux vaisseaux.
Malgré cette différence de financements, "SpaceX a fini quatre ans avant" son concurrent, n'a pas manqué de rappeler lundi Elon Musk, le patron de SpaceX. "Beaucoup trop de responsables ne sont pas des techniciens chez Boeing", a-t-il taclé.
Une fois Starliner opérationnel, la NASA souhaite alterner entre les vols de SpaceX et Boeing pour acheminer ses astronautes jusqu'à l'ISS. Après la mise à la retraite de l'ISS en 2030, les deux vaisseaux pourraient servir à acheminer des êtres humains vers de futures stations spatiales privées.
afp/sjaq
Le régulateur aérien américain ouvre une enquête sur Boeing et son 787
L'autorité américaine de la sécurité aérienne, la FAA, a ouvert une enquête sur Boeing, afin de déterminer si l'avionneur a bien effectué les inspections requises de ses emblématiques 787 "Dreamliner" et si des documents liés à ces inspections ont été falsifiés par des employés. Il s'agissait de vérifier la jonction des ailes au fuselage "sur certains avions 787 Dreamliner".
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L'Agence précise qu'elle "enquête pour savoir si Boeing a effectué les inspections et si des employés de l'entreprise ont pu falsifier les documents liés à l'avion". Cette enquête a été ouverte après que Boeing eut informé la FAA en avril qu'il "n'avait peut-être pas effectué les inspections requises".
Le constructeur aéronautique "ré-inspecte tous les appareils 787 encore en production et doit également élaborer un plan pour s'occuper de la flotte en service", ajoute la FAA qui n'indique pas si les avions en service doivent être rappelés pour inspection. Elle a donné trois mois à l'entreprise pour présenter un plan visant à résoudre "les problèmes systématiques de contrôle de qualité".
Le 787 Dreamliner et le 737 MAX ont subi moult problèmes de production depuis 2023, qui ont freiné les livraisons de l'avionneur. Cela a contraint plusieurs compagnies aériennes à modifier leurs plannings de vol pour 2024.
Boeing traverse une passe difficile après plusieurs incidents. Trois des quatre modèles d'avions commerciaux actuellement fabriqués par le groupe américain sont officiellement visés par une enquête de l'Agence américaine de régulation de l'aviation civile (FAA).