Les résultats préliminaires d'un traitement préventif contre le VIH suscitent l'enthousiasme
Réunis la semaine dernière à Munich, en Allemagne, pour la 25e Conférence internationale sur le sida, quelque 10'000 chercheurs et chercheuses, médecins, dirigeantes et dirigeants politiques ainsi que des industriels et des associations ont acclamé les résultats d'un essai clinique dans lequel le médicament Lenacapavir a été utilisé comme traitement préventif contre le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) qui est responsable de la maladie du sida.
"C'était un moment historique", rapporte Alexandra Calmy, médecin infectiologue et responsable de l'Unité VIH/Sida aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), vendredi dans l'émission Forum de la RTS. "Toute la salle s'est levée et a applaudi."
C'est la première fois que l'on se rend compte qu'il existe un médicament, à prendre deux fois par année par voie sous-cutanée, qui fonctionne
Décrite comme une "percée médicale" par la spécialiste, cette étude préliminaire montre qu'après deux injections sur un an, aucune infection au VIH n'a été constatée dans le groupe qui a reçu le traitement, soit un taux d'efficacité de 100%.
Moins contraignant que la PrEP
"C'est la première fois que l'on se rend compte qu'il existe un médicament, à prendre deux fois par année par voie sous-cutanée, qui fonctionne", explique la médecin, qui pointe la praticité du Lenacapavir par rapport à d'autres traitements préventifs comme la prophylaxie pré-exposition (PrEP), plus contraignante.
"La PrEP a fait ses preuves majoritairement auprès d'une population d'hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes. Chez les jeunes femmes, notamment d'Afrique subsaharienne, qui sont les personnes les plus fréquemment contaminées par le VIH, cela a toujours été plus difficile."
La cause du manque d'efficacité de la prise de traitement orale pour ce groupe de personnes est difficile à déterminer, mais Alexandra Calmy fait part de "plusieurs obstacles", tels que la stigmatisation. De plus, "ces jeunes femmes ne se sentent pas particulièrement visées par le VIH. Cette injection sous-cutanée, prise en même temps que la contraception", rend donc le traitement plus pratique, souligne-t-elle.
Une accessibilité encore incertaine
Le traitement au Lenacapavir, développé par le géant pharmaceutique américain Gilead, coûte actuellement 40'000 dollars (plus de 34'000 francs) par personne et par année. Selon une estimation dévoilée par des chercheurs et chercheuses à la Conférence internationale sur le sida, il pourrait tomber autour de 40 dollars s'il était développé en version générique.
Gilead a été très vague quant aux modalités d'accès au Lenacapavir. [...] Il y a encore beaucoup d'incertitudes
D'après Alexandra Calmy, l'accessibilité du médicament en termes de prix dépendra de plusieurs éléments, notamment le nombre de personnes qui reçoivent le traitement.
Les patentes joueront également un rôle: "Gilead a été très vague quant aux modalités d'accès. Nous ne savons pas si les accords que la firme va passer avec des génériqueurs vont être transparents, s'ils seront disponibles ou s'il y aura une concurrence entre les génériqueurs pour faire diminuer les prix. Nous ne connaissons pas non plus la couverture géographique de ces potentiels contrats. Il y a encore beaucoup d'incertitudes", met en garde la médecin.
Propos recueillis par Mehmet Gultas
Adaptation web: Isabel Ares