Vendu à plus de 200'000 exemplaires, l'ouvrage de Philippe Boxho suscite un réel engouement, illustré en Suisse par la présence jeudi de plus de 500 personnes à sa conférence à Lausanne et par le succès de ses séances de dédicaces qui affichaient complet à Genève. Habitué des plateaux télé, le médecin légiste est aussi un phénomène sur les réseaux sociaux, où il partage ses expériences, avec humour et pragmatisme.
Invité dans Forum, Philippe Boxho s'est confié sur sa manière d'appréhender la mort. Il explique que, pour lui, rire de la mort permet de briser le tabou qui l'entoure, mais aussi de la neutraliser. "La mort est un phénomène naturel, au même titre que la naissance. Il est donc crucial de l'aborder avec une certaine distance pour mieux l'accepter".
Il admet que son travail de médecin légiste l'a libéré de la peur de la mort elle-même. "La mort est plus dramatique pour ceux qui restent que pour ceux qui partent", aime-t-il rappeler.
Un premier livre "militant"
Figure médiatique malgré lui, son premier livre intitulé "Les morts ont la parole" avait pour but initial d'attirer l'attention sur la situation critique des médecins légistes en Belgique, où leur nombre a drastiquement diminué. "On est en train de crever pour parler poliment. On est passé de 42 médecins légistes en 2001 à 24, c'est une catastrophe", alerte-t-il.
Mon premier livre était une manière de faire connaître la médecine légale, tant auprès du public qu'auprès du gouvernement
L'idée d'écrire un livre sur son métier germe lorsqu'une maison d'édition le contacte un jour. "C'était une manière pour moi de faire connaître la médecine légale, tant auprès du public qu'auprès du gouvernement. A aucun moment, je n'ai pensé que ce serait un tel succès".
Dans ses deux autres ouvrages, loin des affaires extraordinaires, il s'attache à raconter la réalité quotidienne de la médecine légale. "L'idée est de montrer à quoi sert la médecine légale dans un processus judiciaire et en quoi un médecin légiste est indispensable dans un Etat de droit. Je ne voulais pas que ce soit du voyeurisme".
Déconstruire les clichés des séries TV
Le scientifique met également un point d'honneur à présenter la médecine légale de manière réaliste, loin des clichés véhiculés par les séries télévisées. Il critique ces représentations pour leurs inexactitudes et leur tendance à glamouriser ou pathologiser la profession.
"Soit c'est une femme et c'est un canon de beauté, soit c'est un homme et il a généralement un problème physique ou mental qui permet d'expliquer qu'il ne s'est pas tourné vers la médecine curative et qu'il a fait la médecine légale par défaut", argue-t-il.
Philippe Boxho insiste également sur le fait que les médecins légistes ne sont pas des enquêteurs, contrairement à ce que laissent parfois croire les séries télé. "Nous fournissons des éléments aux enquêteurs. C'est ensuite à eux de trouver l'auteur du crime".
Propos recueillis par Coralie Claude
Article web: Hélène Krähenbühl