Queer, une histoire de dingue !
De manière plus surprenante, ces personnes sont aussi plus souvent touchées par des troubles neurodéveloppementaux, comme l'autisme ou le trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Le podcast Dingue s'est penché sur cette question pour tenter d'en comprendre les raisons.
Le parcours de Lionel
À 11 ans, Lionel est un élève vif et très sensible. Il se souvient d'avoir été puni pour répondre trop vite, sans laisser ses camarades s'exprimer:
"Je ressens le fait que je ne suis pas comme il faut. Pour plein de raisons. Je pleure trop facilement et, surtout, je vais trop vite dans ma tête. Beaucoup trop vite." Lionel découvrira bien plus tard qu'il vit avec un TDAH. À 12 ans, il fait une autre découverte, marquante: "J'ai fait un rêve mi-érotique où il s'agissait essentiellement de faire des bisous, dans le vestiaire de mon école avec un de mes camarades. Je me réveille en me disant: Waouh, il se passe quelque chose de bizarre."
A partir du moment où vous faites partie d'une minorité qui est un écart à une majorité ou à une norme sociale, vous allez vivre beaucoup plus de pression, de discrimination dans différents domaines
Le stress minoritaire
Très vite, Lionel ressent une anxiété qu'il décrit aujourd'hui avec des mots simples: "Une peur panique d'être abandonné. Le monde nous renvoie tellement cette image comme quoi ça n'est pas totalement normal, que c'est moins bien. En fait, on a peur d'appartenir à cette catégorie et d'être rejeté pour cette raison." Ce phénomène, bien connu en psychologie, porte un nom: le stress minoritaire.
Adèle Zufferey, psychothérapeute et sexologue spécialisée dans l'accompagnement des personnes LGBTQIA+, l'explique: "à partir du moment où vous faites partie d'une minorité qui est un écart à une majorité ou à une norme sociale, vous allez vivre beaucoup plus de pression, de discrimination dans différents domaines. Et le fait de vivre quotidiennement, ou par procuration, de voir des personnes de cette minorité - qui est la même que la vôtre - se faire oppresser, agresser, discriminer, forcément, ça va augmenter votre niveau de stress."
Ce stress est associé à des symptômes anxiodépressifs, et à d'autres troubles, notamment des comportements alimentaires ou addictifs.
Certaines études ont mis en évidence une surreprésentation des troubles neurodéveloppementaux - principalement l'autisme et le TDAH - chez les personnes queer. Les raisons de cette association restent encore floues. Adèle Zufferey précise: "Ce vers quoi les hypothèses principales tendent, ce sont surtout des aspects psycho-sociaux. À partir du moment où vous faites partie d'une neurodiversité, vous avez une tendance à réfléchir aux normes sociales de façon très différente que les personnes neurotypiques."
De fait, de nombreuses normes sociales n'ont aucune base logique ou biologique: pourquoi le bleu pour les garçons et le rose pour les filles? Ces conventions sont souvent remises en question par les personnes neurodivergentes, qui seraient, selon les hypothèses, plus enclines à s'interroger également sur leur orientation sexuelle ou leur identité de genre.
Une célébration de la diversité
Aujourd'hui, Lionel perçoit sa "queerness" comme une richesse: "ça me donne la capacité, à 41 ans, après avoir traversé tout un tas d'épreuves, petites ou grandes, de célébrer ce qui est différent et de voir les forces plutôt que les faiblesses de la diversité, quelles qu'elles soient."
Adrien Zerbini