La moelle épinière humaine est l'un des systèmes biologiques les plus complexes que la science connaisse, relève l'EPFL mercredi dans un communiqué. Cette complexité cellulaire amplifie les défis à relever pour traiter efficacement la paralysie causée par une lésion de la moelle épinière.
Jusqu'à présent, les méthodes traditionnelles d'imagerie et de cartographie n'offraient qu'une vision générale des mécanismes cellulaires des lésions médullaires. Les scientifiques ont franchi une étape importante en cartographiant la dynamique cellulaire et moléculaire de la paralysie avec un niveau de détail sans précédent grâce à leur projet en libre accès nommé "Tabulae Paralytica".
"Dans cette étude, nous souhaitions ni plus ni moins que révolutionner la compréhension biologique des lésions de la moelle épinière", écrit le professeur en neurosciences à l'EPFL Grégoire Courtine, cité dans le communiqué. Les travaux ouvrent la voie à des traitements ciblés et à une amélioration de la guérison."
Astrocytes favorables
Le premier est une thérapie génique ciblée. Développée en collaboration avec Bernard Schneider, collègue à l'institut Neuro-X à l’EPFL, elle s'appuie sur une découverte cruciale: chercheuses et chercheurs ont constaté qu'un type spécifique de cellule de soutien, appelé astrocyte, perdait sa capacité à répondre aux lésions chez les animaux âgés.
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"Pendant une grande partie des cent dernières années, on a cru que les astrocytes étaient défavorables à la réparation neuronale. Nos données viennent bouleverser cette idée et suggèrent un rôle protecteur essentiel de ces cellules, qui peut être exploité pour réparer les lésions de la moelle épinière", déclare Mark Anderson, de l'EPFL, un auteur principal de l'étude de l'EPFL.
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Un autre résultat important est l'identification d'un sous-ensemble spécifique de neurones, appelés Vsx2, qui sont naturellement équipés pour favoriser la guérison, ajoute Jordan Squair, autre auteur principal.
S'appuyer sur l'intelligence artificielle
Pour créer la première carte cellulaire complète des lésions de la moelle épinière chez les modèles de rongeurs, les scientifiques ont eu recours à deux technologies innovantes: le séquençage de cellule unique et la transcriptomique spatiale.
Les nouvelles données sont si riches qu'il a fallu mettre au point de nouvelles techniques d'apprentissage automatique pour en exploiter la complexité. Cette approche informatisée s'appuie sur l'intelligence artificielle pour cartographier les réponses génétiques immédiates des cellules individuelles, ainsi que pour situer ces réponses dans le paysage physique et temporel de la moelle épinière.
Carte détaillée
"Nous disposons d'une carte détaillée qui nous montre non seulement quelles cellules sont impliquées, mais aussi comment elles interagissent et évoluent au cours du processus de lésion et de guérison", explique Jordan Squair. Cette compréhension globale est cruciale pour développer des traitements qui sont précisément adaptés à des cellules spécifiques et à des exigences uniques pour la guérison de diverses lésions.
Bien que cette étude ait été menée sur des modèles de rongeurs, les connaissances acquises devraient se traduire par des applications cliniques, pour lesquelles Grégoire Courtine et son équipe réalisent des avancées significatives depuis plus d'une décennie.
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ats/sjaq