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Le Sommet de Cancun dans la dernière ligne droite

Climat, sommet de Cancun, Mexique. [Elisabeth Ruiz]
Le Sommet de Cancun doit surtout trouver un moyen de prolonger le Protocole de Kyoto. - [Elisabeth Ruiz]
La conférence de l'ONU sur le climat de Cancun, au Mexique, entre dans sa dernière ligne droite cette semaine, avec l'arrivée des ministres des 190 pays présents. Leur première mission sera de désamorcer la bombe qui menace les négociations: l'avenir du Protocole de Kyoto.

Car un an après la déception de Copenhague, un échec pourrait finir de décrédibiliser ce lent processus onusien qui peine à produire un consensus sur la forme que doit prendre la lutte contre le changement climatique. Et, surtout, son niveau d'ambition.

A l'occasion de cette réunion, l'Organisation météorologique mondiale (OMM) a souligné l'urgence à relever le défi, en annonçant que 2010 serait certainement l'une des trois années les plus chaudes jamais enregistrées.

Ambitions modestes

Durant une semaine, les équipes de négociateurs ont tenté de progresser sur toute une gamme de sujets censés composer "un paquet équilibré" de décisions: lutte contre la déforestation, création du Fonds climat, ou encore contrôle des actions promises pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES). Des sujets présentés depuis des mois comme ayant de grandes chances d'aboutir à un accord.

Un texte aux ambitions modestes mais dont l'objectif premier est d'offrir un second souffle aux négociations et servir de "fondation" à un accord futur plus musclé. Aux ministres, qui entreront réellement en piste mardi, d'arbitrer et signer d'ici la fin de la conférence, vendredi prochain. Car, selon la ministre mexicaine des Affaires étrangères Patricia Espinosa, s'il y a des "progrès" sur certains dossiers, les parties ont fait "marche arrière" sur d'autres.

Pour la ministre mexicaine Espinosa, il y a des "progrès" mais certains dossiers ont fait "marche arrière". [KEYSTONE - Salvatore Di Nolfi]
Pour la ministre mexicaine Espinosa, il y a des "progrès" mais certains dossiers ont fait "marche arrière". [KEYSTONE - Salvatore Di Nolfi]

Les dissensions entre pays riches et pays émergents sur l'avenir du protocole de Kyoto ont notamment assombri samedi les discussions. Certains dénoncent un manque de volonté. Et notamment sur cette question de l'avenir du Protocole de Kyoto, sujet qui a quasiment éclipsé tous les autres. "Une épée de Damoclès" sur la conférence, selon les mots du négociateur en chef de l'Union européenne, Artur Runge-Metzger.

Opposition japonaise

C'est le Japon qui a mis le feu aux poudres en réaffirmant solennellement, dès l'ouverture de la conférence lundi, qu'il ne signerait jamais une seconde période d'engagement du traité, après la première qui expire fin 2012. Le Canada et la Russie sont aussi réticents, voire franchement hostiles, à une nouvelle période d'engagement. Les pays du Sud, eux, y sont très attachés et exigent une seconde période. Sans cela, il serait "très difficile" de parvenir à un accord, d'après plusieurs pays d'Amérique latine.

Dans ce contexte, l'une des solutions serait de reporter la question au prochain grand rendez-vous climat, fin 2011, à Durban (Afrique du Sud). La responsable "climat" de l'ONU, Christiana Figueres, l'a notamment proposé vendredi, appelant au "compromis".

Le dossier du futur financement de la lutte contre les changements climatiques pourrait également être repoussé à l'année prochaine. C'est du moins ce que souhaite la Suisse, qui a fait une proposition dans ce sens. Objectif: "faciliter l'élaboration d'une solution capable de réunir une majorité" d'ici à la conférence de Durban, selon l'Office fédéral de l'environnement (OFEV).

Patricia Espinosa a encore indiqué qu'elle allait rendre compte dimanche à une soixantaine de ministres de l'Environnement de l'état d'avancement des négociations. Ces ministres sont venus du monde entier pour la seconde semaine de débats. Pour la Suisse, la présidente de la Confédération Doris Leuthard se rendra à Cancun mercredi et jeudi. Cette deuxième semaine de négociations devrait alors être consacrée à la recherche de la "formule un peu ambiguë" qui satisfasse tout le monde, selon les mots d'un négociateur européen.

ats/cab

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Le Protocole de Kyoto

Le Protocole de Kyoto, au coeur des débats de la conférence de l'ONU sur le climat de Cancun, est le seul outil juridique contraignant qui limite les émissions de gaz à effet de serre, à l'origine du réchauffement de la planète.

Kyoto, conclu en décembre 1997, est entré en vigueur en février 2005. Il impose aux 36 pays industrialisés qui l'ont ratifié et à l'Union européenne des réductions d'émissions des six principales substances responsables du réchauffement de l'atmosphère: CO2 (dioxyde de carbone), CH4 (méthane), protoxyde d'azote (N20) et trois gaz fluorés (HFC, PFC, SF6).

La contrainte pèse essentiellement sur l'usage des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon), responsable des deux-tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Kyoto compte aujourd'hui 175 Etats parties plus l'Union européenne, mais pas les Etats-Unis qui, après l'avoir signé, ne l'ont pas ratifié.

Les pays industrialisés (dits de l'Annexe 1) qui comptent pour 30% environ des émissions mondiales, se sont engagés à diminuer les leurs de 5% pour la période 2008-2012 par rapport à l'année de référence 1990.

Les pays émergents dont la Chine, devenu le premier pollueur mondial, ou l'Inde, en sont exonérés au même titre que l'ensemble des pays en développement malgré leur croissance exceptionnelle.

Les principaux sujets sur la table des négociations

- REDUCTION DES EMISSIONS DE GAZ A EFFET DE SERRE (GES) LIEES A LA DEFORESTATION (12 à 20% du total): Cancun pourrait rendre opérationnel le mécanisme REDD+ qui consiste à verser des compensations financières aux pays qui réduisent la déforestation ou la dégradation de leurs forêts.

- LE FONDS VERT: A Copenhague, les pays industrialisés se sont engagés à mobiliser 100 milliards de dollars par an d'ici 2020 pour les pays plus pauvres. Mais où trouver ces 100 milliards? Le groupe consultatif de l'ONU préconise des "financements alternatifs", comme des taxes sur les transports et les transactions financières.

- ANCRER LES ENGAGEMENTS SUR LES REDUCTIONS D'EMISSIONS DE GAZ A EFFET DE SERRE... Conformément à l'accord de Copenhague, pays industrialisés et en développement ont soumis début 2010 leurs objectifs (pour les premiers), et actions (les seconds) pour 2020 en termes d'émissions de GES. Ces promesses n'ont pas de caractère contraignant: il devrait être question à Cancun de trouver une formule juridique pour les "ancrer" un peu plus sur les réductions d'émissions de GES.

-... ET LES VERIFIER: Le contrôle des efforts réalisés pour réduire les émissions de GES est l'un des sujets épineux des négociations. La Chine, premier émetteur mondial, est particulièrement réticente à un regard extérieur sur ses plans climats, un point sur lequel insiste l'autre grand pollueur, les Etats-Unis.