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Wikipédia fête les 10 ans d'un succès planétaire

Wikipédia accueille 400 millions de visiteurs mensuels.
Wikipédia accueille 400 millions de visiteurs mensuels.
Je veux en savoir plus sur l'Acte de Médiation ou trouver la profondeur du Lac de Neuchâtel? Le bon vieux dictionnaire a du plomb dans l'aile, je préfère courir sur Wikipédia. L'encyclopédie en ligne gratuite est devenue une référence et fête ce samedi ses 10 ans d'existence. L'occasion de se pencher sur la vitalité du site en Suisse et de s'intéresser à l'un de ses nombreux contributeurs, un Romand passionné d'histoire suisse.

Si l'on navigue sur la version française de l'encyclopédie en ligne Wikipédia, on peut constater que la page "Suisse" a été modifiée 12 fois depuis le début de l'année 2011, dont 10 pour la seule journée du 12 janvier. Autres exemples pris au hasard, "Conseil fédéral" atteint 4 modifications, "Micheline Calmy-Rey" grimpe à 6 et "Valais" pointe à 9.

Par ailleurs, si "UBS" est en veille depuis plus d'un an, "Roger Federer" cristallise l'attention avec 39 interventions. La plupart des changements sont des détails, des précisions ou des indications de sources, mais ces données fournissent néanmoins des signes à propos de la vitalité d'une personne, d'une région ou d'une notion.

Le nombre de modifications - on arrive à plus 600 par an pour "Suisse" - donnent aussi une indication quant au nombre de personnes qui écrivent, corrigent et vérifient les informations fournies par Wikipédia. Des millions de contributeurs occasionnels dans le monde, dont environ 100'000 qui sont omniprésents, mais aussi une dizaine de "Wikipédiens" très actifs en Suisse romande.

"Rendre service aux gens"

Le fondateur de Wikipédia Jimmy Wales fête les 10 ans d'un succès planétaire. [REUTERS - Michael Caronna]
Le fondateur de Wikipédia Jimmy Wales fête les 10 ans d'un succès planétaire. [REUTERS - Michael Caronna]

Parmi ces "promoteurs du savoir communautaire", Nicolas Ray est un informaticien de gestion âgé de 39 ans. Tombé un peu par hasard sur Wikipédia en 2004, il se prend vite de passion pour ce mode de contribution au savoir. Un article sur sa commune d'origine puis un autre et un autre. Il est aujourd'hui l'un des spécialistes de l'histoire et de la politique suisses sur l'encyclopédie en ligne, où il passe au moins une heure par jour, "et plus les week-ends". Un homme, jeune et intéressé par l'informatique, quasiment le profil type du "Wikipédien".

La majorité de ses collègues suisses romands habitent comme lui le bassin lémanique. Tous bénévoles, ils se connaissent, ils se voient et sont même devenus amis avec le temps. Ils s'entraident et complètent les articles des autres, mais ils se sont tout de même spécialisés en fonction de leurs aptitudes. "Le but est de rendre service aux gens", avance Nicolas Ray. L'objectif ultime n'est pas d'être le meilleur, mais d'avoir le meilleur article possible, et chacun accepte les corrections des autres sur ses contributions.

Assez peu de vérifications

Concrètement, le but de ces "Wikipédiens" est avant tout d'écrire de nouveaux articles, d'alimenter la base de données de Wikipédia. "Manoillon", le pseudo Wikipédia de Nicolas Ray, vient par exemple de passer de longues heures à compléter l'article "Initiative populaire fédérale" et à la liste des textes déposés. Jusque-là, quelqu'un de proche de l'UDC avait listé surtout les initiatives de ce parti, il voulait donc amener plus d'exhaustivité.

La majeure partie du travail consiste ainsi à se documenter sur les thèmes traités et à traiter. Le reste du temps passe dans la rédaction. La vérification et la correction des erreurs ou imprécisions des autres ne viennent qu'ensuite et n'occupent qu'une faible partie de leur temps. La direction de Wikipédia aux Etats-Unis n'intervient aucunement dans le contenu helvétique.

Même si Wikipédia a nettement gagné en crédibilité en 10 ans d'existence, des erreurs perdurent dans les pages, suisses ou autres. Contrairement à la version allemande, toutes les modifications ne sont pas validées avant publication. Selon Nicolas Ray, "il n'est pas judicieux de mettre en place un comité de rédaction, ce n'est pas l'esprit de Wikipédia".

Blasphèmes sur Guillaume Tell et Gruyère controversé

Il n'en demeure pas moins qu'une modification quelconque sur un article peu visité peut rester plusieurs années en ligne. Un couac qui n'est pas possible avec les pages très lues, comme celles des conseillers fédéraux. Nicolas Ray se souvient d'un journaliste qui avait voulu faire le test en écrivant que Christophe Darbellay aimait les sucettes à la menthe. Le contributeur a vu rapidement la plaisanterie et l'a annulée, mais c'était un hasard. L'erreur aurait pu subsister plus longtemps.

Autre plaisanterie, d'un goût certes un peu plus douteux: la page "Guillaume Tell" a été modifiée le 12 janvier dernier à 12h57. On apprend alors que le personnage légendaire "aurait vécu dans le canton d'Anus". Seulement deux minutes plus tard, un contributeur offusqué a replacé le héros suisse dans son Uri natal... Idem durant le dernier Mondial de football: après le match Suisse-Chili, l'arbitre de la rencontre a été durant une matinée qualifié de "clown" ou d'"humoriste", et même d'appellations plus injurieuses.

Conflits croustillants

Nicolas Ray mentionne aussi certains conflits franco-suisses plutôt croustillants: comme le site francophone est constitué de contributions de plusieurs pays, les divergences politiques et la méconnaissance du voisin sont fréquentes. Il a ainsi fallu plus de trois mois d'échange pour convaincre un "Wikipédien" français que la Suisse n'est pas une République! Idem concernant le gruyère: certains Français veulent absolument s'approprier le fromage et les Suisses ne veulent en aucun cas le lâcher.

Ces erreurs sont inévitables et font même partie du "charme" de Wikipédia. Il faut les accepter, car le pire, selon Nicolas Ray, serait d'interdire ou de bloquer certaines pages, comme cela a été le cas pour certains contenus sensibles. Wikipédia doit rester un système complètement ouvert, avec ses avantages et ses inconvénients.

Frédéric Boillat

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Les 20 articles concernant la Suisse qui ont le plus été consultés en octobre 2010 (dernières statistiques en date)

1. Suisse: 100'800 consultations
2. Jean-Jacques Rousseau: 70'592
3. Tunnel de base du Saint-Gothard: 51'172
4. Le Corbusier: 37'972
5. Roger Federer: 28'619
6. Société à responsabilité limitée: 28252
7. Nestlé: 22'192
8. Érasme: 19'547
9. Jean-Luc Godard: 18'591
10. Genève: 18'389
11. Rhin: 16'362
12. Spiritueux aux plantes d'absinthe: 15'971
13. Jean Piaget: 14'952
14. Allemand: 14'647
15. Rhône: 14'561
16. Société des Nations: 14'176
17. Organisation mondiale du commerce: 13'956
18. Zurich: 13'669
19. Paul Klee: 13'344
20. Lac Léman: 12'818

Source: http://fr.wikipedia.org/wiki/Projet:Suisse

Quelques données concernées l'encyclopédie

L'encyclopédie en ligne Wikipédia a été lancée le 15 janvier 2001 par l'Américain Jimmy Wales. La version française a suivi le 23 mars de la même année.

Aujourd'hui, le site compte 17 millions d'articles publiés dans 267 langues. Près de 4 millions sont en langue anglaise et plus de 1 million en français. Les trois éditions les plus consultées sont la version anglaise (plus de la moitié), la version japonaise et la version allemande (environ 10%).

Rien que pour la version suisse, Wikipédia présente 12'739 articles, dont 30 ont été créées depuis le 1er janvier 2011.

Plus de 400 millions de visiteurs uniques viennent sur le site chaque mois. Selon les statistiques, il est entre le 3e et le 5e site le plus consulté au monde.

Les principales thématique traitées sont la culture et les arts (30%), les biographies (15%), la géographie (14%), la société et sciences sociales (12%) et l'histoire (11%).

Le financement de Wikipédia est assuré par des donations privées. La fondation qui gère le site dispose de 13 millions de francs de réserve actuellement. Elle ne compte que 50 salariés, dont 35 au siège de San Francisco.