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L'EPFL révèle les nouveaux dangers du bisphénol-A

Après l'ère du lait en poudre, l'allaitement naturel revient en force. [xiongmao]
Selon l'étude de la Faculté des sciences de la vie de l'EPFL, le bisphénol-A peut aussi se transmettre à l'enfant pendant la grossesse et l'allaitement. - [xiongmao]
Découverte à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne: le BPA, composant controversé de multiples emballages alimentaires, peut aussi se transmettre à l'enfant par la mère au cours de la grossesse ou durant l'allaitement. Des chercheurs de la Faculté des sciences de la vie démontrent un lien potentiel entre de telles expositions et un risque accru de cancer du sein.

La controverse liée aux effets du bisphénol-A (BPA) sur la santé est relancée. Alors que l'utilisation de ce composant de nombreux emballages alimentaires est attaquée, voire interdite, dans plusieurs pays (voir ci-contre), des chercheurs de l'EPFL ont fait une découverte majeure. Ils avancent aujourd'hui que la transmission du BPA à l'enfant ne se fait pas uniquement par contact direct du bébé au biberon par exemple, mais aussi durant la grossesse puis lors de l'allaitement si la mère a été exposée au produit et avoir ainsi un effet sur le devéloppement de la glande mammaire.

Comparaison

La transmission du BPA dès la période périnatale agit de façon plus précoce comme perturbateur endocrinien. L’équipe de l'EPFL a trouvé que les effets suscités par le BPA sont comparables à ceux causée par le diethylbestrol (DES), un médicament donné aux femmes enceintes. Une exposition in utero au DES double le risque de cancer du sein chez la femme à l’âge de 50 ans. "Nous ne pouvons donc plus exclure que le BPA, même ingéré avant la naissance, soit lié à une augmentation des cas de cancer du sein", explique la professeure Cathrin Brisken, co-auteure de l'étude, à la TSR.

"Jusqu'ici, la discussion publique s'est concentrée sur le bébé exposé directement au bisphénol-A qui est contenu dans le plastique des biberons. Il faut au préalable veiller sur les femmes enceintes. Celles qui sont au contact du BPA peuvent le transmettre au foetus pendant la grossesse, puis au bébé quand elles allaitent», conclut Cathrin Brisken.

Craintes

La recherche a été menée en laboratoire sur des souris. Les conclusions confirment les craintes à l'égard du BPA: une simple dose suffit pour modifier le comportement hormonal de la glande mammaire, entraînant un risque accru de cancer du sein.

En fait, les souris mères qui ont absorbé du bisphénol-A, même en faible dose, ont transmis la substance à leur progéniture. L’analyse des glandes mammaires de leurs enfants femelles à la puberté et à l'âge adulte a montré que leurs fonctions hormonales ont été modifiée à long terme et que le comportement des cellules était altéré. Un parallèle avec l’être humain montrerait que de tels bouleversements augmentent le risque de cancer du sein, conclut la recherche des professeurs de l'EPFL.

Yves Gerber/gax

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Un composant controversé

Substance chimique de synthèse utilisée depuis plus de 50 ans, le bisphénol-A (BPA) est soupçonné d'augmenter les risques de puberté précoce chez les femmes, de cancer de la prostate ou du sein et d'anomalies de reproduction. De tels effets ont été observés chez des rongeurs en laboratoire, mais les industriels et des agences de sécurité alimentaire estiment que ces craintes ne sont pas scientifiquement fondées chez l'Homme.

Le composé chimique est principalement utilisé pour la fabrication de plastique du type polycarbonate et de résines époxydes. Il se retrouve ainsi notamment dans les emballages alimentaires, cannettes, revêtements de sols, boîtes de conserve, ustensiles de cuisine, amalgames dentaires, bombonnes d'eau rechargeable, bouteilles en plastique, emballages alimentaires ou CD (voir la liste plus détaillée à la fin du communiqué de l'Agence française de sécurité sanitaire, en rubrique "liens").

La France inquiète, la Suisse sereine

En Suisse aussi, le sujet sur le bisphénol-A (BPA) fait débat. Au début de l'année, le WWF a demandé l'interdiction de cette substance. L'Office fédéral de la santé publique (OFSP) s'y est opposé, estimant qu'elle ne constitue aucun risque pour les consommateurs. Ce n'est qu'à hautes doses que le BPA développe des effets négatifs sur la fécondité et le développement foetal, écrit l'OFSP dans son communiqué daté de juin 2011. Selon lui, une interdiction conduirait les fabricants à se tourner vers d'autres matières plastiques, dont la toxicité est moins bien connue.

Pour sa décision, l'OFSP s'appuie sur les quatre études "exhaustives" menées depuis 2002 par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) indiquant l'absence de risque lié à l'exposition au BPA. Des conclusions auxquelles est également parvenue l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dans une évaluation datée de novembre 2010.

En France, en revanche, une commission de l'Assemblée nationale a voté sans opposition mercredi 28 septembre une proposition de loi socialiste interdisant l'usage du bisphénol-A dans tous les contenants alimentaires. Ce texte, qui fait suite à l'interdiction en 2010 des biberons contenant du bisphénol-A, sera soumis aux députés le 6 octobre.