Un comité consultatif d'experts indépendants a recommandé jeudi à l'Agence américaine des médicaments (FDA) la mise sur le marché du Truvada, le premier traitement de prévention contre le sida. La FDA n'est pas tenue de suivre ces recommandations mais le plus souvent elle les entérine.
Par une large majorité, les 22 experts se sont prononcés en faveur de la commercialisation de ce traitement produit par le laboratoire américain Gilead Sciences. Le Truvada, une combinaison de deux anti-rétroviraux, est déjà prescrit pour des personnes infectées par le VIH, le virus de l'immunodéficience humaine responsable du sida. Son coût varie de 12'000 à 14'000 dollars par an.
Les experts ont recommandé la mise sur le marché du traitement préventif pour les hommes homosexuels séronégatifs, pour les couples hétérosexuels dont l'un des partenaires est séropositif et - avec une majorité moindre pour les "autres individus risquant d'être infectés en raison de leur activités sexuelles".
Craintes de certains organismes
Des médecins et infirmières soignant des séropositifs, des représentants d'organismes privés engagés dans la lutte contre le sida et des personnes infectées par le VIH étaient venus témoigner devant le comité. Une majorité s'est déclarée hostile à la mise sur le marché du Truvada.
"Je suis préoccupée par le danger de voir se développer une résistance au Truvada", qui est déjà utilisé pour traiter les séropositifs, a déclaré Roxanne Cox-Iyamu, un médecin qui soigne des personnes infectées par le VIH.
Karen Haughey, une infirmière, a fait valoir que ce traitement préventif "ne marchera pas car ce n'est pas dans la nature humaine de faire 100% ce qui est recommandé". Elle faisait référence au fait que le Truvada, qui se présente sous forme de comprimés, doit être pris quotidiennement pour être efficace.
Pas un substitut au préservatif
"Nous avons besoin d'un tel traitement car aux Etats-Unis nous avons encore 50'000 nouveaux cas d'infection chaque année, surtout parmi les hommes homosexuels et nous n'avons pas eu beaucoup de succès ces dernières années pour réduire ce nombre", a souligné le Dr Anthony Fauci, directeur de l'Institut national américain des allergies et des maladies infectieuses (NIAID).
"De ce fait, tout médicament préventif est important", a-t-il ajouté, insistant sur le fait que le Truvada "ne devrait pas être utilisé pour se substituer aux autres méthodes de prévention" existantes, dont le préservatif.
agences/vtom
Plusieurs études soutiennent le Truvada
L'efficacité préventive du Truvada a été mise en évidence par les résultats d'un essai clinique mené de juillet 2007 à décembre 2009 dans six pays, dont le Brésil, l'Afrique du Sud et les Etats-Unis, et financé en grande partie par les Instituts nationaux américains de la santé (NIH).
Il avait réduit de 44% le risque d'infection chez les hommes homosexuels qui utilisaient aussi des préservatifs.
Une autre étude clinique a montré que le Truvada a diminué jusqu'à 75% le risque d'infection chez les couples hétérosexuels, dont l'un des deux partenaires était séropositif.
Selon une étude américaine publiée en avril, prescrire des anti-rétroviraux à titre préventif à des hommes homosexuels risquant fortement de contracter le virus du sida -plus de cinq partenaires par an- serait économiquement rentable en réduisant la propagation de l'infection.