RTSinfo: Quels risques sanitaires la prise de la pilule fait-elle encourir?
Dorothea Wunder: La prise de toute pilule contraceptive augmente le risque d'embolie pulmonaire et de thrombose, et ce risque évolue avec l'âge de la femme. En moyenne, il est de 3-4/10'000 chez les utilisatrices de pilule âgées de 15 à 30 ans contre 1-2/10'000 chez les femmes qui ne prennent pas la pilule. Au-delà de 30 ans, le risque peut doubler voire tripler.
RTSinfo: Quels types de pilules présentent le plus de risques?
D.W.: Les pilules les plus récentes, de 3e et 4e génération -dont fait partie Yasmin-, comportent plus de risques: entre 6 et 10 sur 10'000 pour Yasmin. Cela tient à leur composition: la combinaison de progestatifs et d'oestradiol synthétisé peut conduire à une coagulation plus importante. Ces chiffres sont en soi faibles, mais les conséquences d'une pilule mal tolérée peuvent être très graves pour les personnes concernées.
RTSinfo: Quelles questions doit-on (se) poser avant de prendre la pilule?
D.W.: Avant de prescrire la pilule, il est nécessaire de procéder à une analyse détaillée des antécédents personnels et familiaux de la patiente. Il s'agit de déterminer s'il y a déjà eu des thromboses, des problèmes artériels ou veineux... L'hypertension et l'obésité sont aussi des facteurs de risque dont on doit tenir compte. Enfin, le tabagisme est un facteur de risque majeur pour des complications, surtout artérielles.
RTSinfo: A quels signes une utilisatrice de pilule doit-elle être attentive?
Il est nécessaire de consulter si l'on remarque des douleurs ou des enflures au niveau des jambes, ou en cas de difficultés respiratoires. Des migraines ou de forts maux de tête peuvent en outre être des signes avant-coureurs d'un accident vasculaire cérébral (AVC). Ces signaux doivent surtout être guettés au cours de la première année, voire au cours des 2-3 premiers mois d'utilisation, lorsque le risque thrombo-embolique est le plus élevé.
RTSinfo: La pilule reste le moyen de contraception le plus utilisé en Suisse. Quelles sont les alternatives?
D.W.: Contrairement à une idée communément répandue, le stérilet peut être prescrit aux très jeunes femmes. Il est certes moins facile à poser chez celles qui n'ont pas eu d'enfant, mais il constitue une contraception très fiable -la pilule peut s'oublier- et n'influe pas sur le système hormonal. On peut également envisager des contraceptifs uniquement progestatifs, sous forme de comprimés, ou encore les moyens de contraception dits "mécaniques" qui protègent également des maladies sexuellement transmissibles.
RTSinfo: Sur quels critères vous basez-vous pour prescrire la pilule ou un autre contraceptif?
D.W.: Il s'agit en premier lieu de déterminer l'existence éventuelle de contre-indications. Ensuite, la prescription d'un mode de contraception doit toujours se faire au cas par cas. L'âge est un premier critère. Chez une femme de plus de 40 ans par exemple, je ne prescrirais pas forcément la pilule. La stabilité du couple, ou encore l'importance attachée à l'efficacité de la contraception, entrent également en ligne de compte. Ce sont surtout les préférences individuelles de la femme qui priment; l'important est qu'elle soit satisfaite de sa contraception.
RTSinfo: Que diriez-vous aux adeptes de la pilule potentiellement inquiètes des risques?
D.W.: Tout d'abord, elles doivent savoir qu'elles peuvent toujours changer de moyen de contraception si elles sont inquiètes. Rappelons toutefois que le risque est relativement faible, et que la pilule présente aussi des effets bénéfiques, notamment sur la peau, la réduction des douleurs menstruelles, la stabilité du cycle ou encore la prévention de certains types de cancer. Et en cas de doute, elles ne doivent pas hésiter à consulter. Une thrombose ou une embolie ne surviennent pas du jour au lendemain; si les symptômes sont repérés à temps, ils peuvent être traités.
Propos recueillis par Pauline Turuban