Le Salon international de l'automobile ouvre ses portes jeudi à Genève dans un contexte presque euphorique: les ventes ont bien marché en 2015, particulièrement en Europe, et jamais les 4X4 et les grosses voitures n'ont eu autant de succès.
Pourtant, les constructeurs s'accordent pour dire que - derrière ces bons résultats - une véritable mutation de la branche est en cours. Avec l'arrivée des véhicules électriques, et surtout des véhicules autonomes, l'industrie automobile ne sera plus jamais la même.
Une révolution en marche
C'est l'avis de Carlos Ghosn, patron du groupe Renault-Nissan. Interrogé mercredi dans le Journal du matin, ce dernier estime que ce qui est en train de se passer en matière notamment d'intelligence artificielle et de connectivité va vraiment bouleverser le secteur.
"Clairement, nous allons devoir repenser complètement la manière dont nous assemblons les voitures et dont nous les projetons", explique-t-il. "Il faut tenir compte du fait que ces objets seront à l'avenir beaucoup plus connectés que par le passé. On amène un environnement complètement différent, un environnement de télécoms, de startups, alors que les fabricants de voitures sont organisés de façon extrêmement stricte avec des procédures très contraignantes. Le défi, c'est de garder cette rigueur mais en même temps d'adapter le produit à des technologies qui évoluent très rapidement."
Problèmes d'autonomie à régler
Selon Carlos Ghosn, le constructeur qui arrivera à la fois à maintenir cette discipline, effectuer les changements et offrir un produit vraiment utile pour le consommateur emportera le marché. Et le constructeur franco-nippon veut se mettre sur les rangs, car cette révolution ne va pas attendre. Son patron se targue d'ailleurs de ne pas trop se tromper dans ses prévisions. Il avait dit vouloir lancer sa voiture électrique en 2010 et il l'a fait.
Mais, on le sait, le véhicule "zéro émissions" a de la peine à décoller à cause de problèmes d'autonomie et d'approvisionnement. De la même manière, Carlos Ghosn pense que d'ici quatre ans la voiture autonome sera technologiquement au point mais que tout ne sera pas résolu pour autant. "Je pense que la technologie sera prête d'ici 2020 - et je ne vous parle pas de vente mais bien de technologie", précise-t-il. "Or, ici, il y a un autre type de problème, un autre frein à la mise sur le marché de ces voitures autonomes: c'est le régulateur. Si le régulateur vous dit 'vous pouvez circuler avec ces véhicules mais vous devez garder vos mains sur le volant et vos yeux sur la route', il n'y aura vraiment pas d'intérêt à en acheter une."
Renault-Nissan assez solide pour avancer seul
Renault-Nissan, quatrième constructeur mondial, n'envisage pas d'alliances en matière de voitures autonomes. "Notre entreprise est suffisamment importante pour pouvoir les développer nous-mêmes", assure Carlos Ghosn. "Bien sûr, nous devons coopérer avec des entreprises technologiques, parce que nous ne pouvons pas tout faire nous-mêmes. Nous avons des personnes qui travaillent sur les senseurs, d'autres qui travaillent sur les caméras, d'autres encore sur le software ou sur la carte graphique. Ce sont des relations normales que nous avons avec des fournisseurs - qui sont différents du secteur traditionnel du secteur automobile. Mais nous allons procéder de la même manière."
L'avenir dira si les constructeurs automobiles resteront dans la course face aux géants technologiques comme Google ou Apple. Mais de l'avis de Carlos Ghosn, la façon de travailler en entreprise a d'ores et déjà été profondément transformée.
Francesca Argiroffo/oang