Une plainte a été déposée contre l’Agence européenne des médicaments (EMA) par plusieurs médecins et chercheurs danois, rapporte Le Monde vendredi.
Ils dénoncent l'"incurie" d'une expertise de l'EMA sur les effets secondaires pouvant découler d'une vaccination contre le papillomavirus (HPV), un virus à l'origine du cancer du col de l’utérus. En novembre 2015, l'EMA a conclu à une absence totale de lien de causalité (voir encadré).
"Sérieux doutes"
Or, les plaignants ont pu consulter un rapport intermédiaire ultra-confidentiel de l'EMA. Contrairement à la version publique, "qui dédouane les vaccins en donnant une impression d’unanimité des experts", le rapport intermédiaire montre que "des experts expriment de sérieux doutes", a expliqué l'un des plaignants au Monde.
"Nous ne disons pas que ce lien de causalité est certain", précise-t-il. "Ce que nous contestons, c’est la manière dont l’EMA a traité cette alerte." Interrogée, l’EMA assure de son côté avoir travaillé dans les règles.
ptur
Plusieurs dizaines de cas signalés
A l’été 2015, un médecin de Copenhague signale aux autorités sanitaires danoises plusieurs dizaines de cas de jeunes filles ayant été vaccinées contre le HPV et ayant présenté, dans les mois suivants, des troubles "peu spécifiques" tels que fatigue chronique, douleurs musculaires ou articulaires, nausées ou migraines.
"En 2013, au Japon, une alerte semblable a conduit les autorités locales à retirer leur recommandation aux vaccins anti-HPV", relève Le Monde.
Saisie par le Danemark, la Commission européenne charge l’EMA de creuser l'éventualité que ces troubles aient un lien avec les vaccins anti-HPV. En novembre 2015, l’agence publie ses conclusions: absence totale de lien entre les troubles et le vaccin anti-HPV.
Risque de conflits d'intérêts pointé
Alors que certains experts ont été exclus des délibérations pour cause de conflits d’intérêts, le président de l’un des groupes scientifiques de l’EMA a été maintenu. Or selon Le Monde, sa déclaration d’intérêts "omet certains soutiens financiers de fabricants des fameux vaccins à son institution". Le chercheur a, entre autres, mené quatre études financées par les laboratoires GlaxoSmithKline (fabricant du vaccin anti-HPV Cervarix) et Sanofi (fabricant du Gardasil).
La méthodologie est aussi interrogée. "Nous n’avons vu aucune trace d’une analyse indépendante", explique un des plaignants. "L’EMA a posé une série de questions aux fabricants, qui ont interrogé eux-mêmes leurs propres bases de données. (...) C’est comme si vous demandiez au chat de surveiller le lait…"