L'utilisation des vers en laboratoire n'est pas chose nouvelle. Ces micro-organismes nommés nématodes sont bien connus dans la recherche biomédicale: "Ils ont été établis comme modèle biologique il y a 60 ans par (le biologiste sud-africain) Sydney Brenner. Ces vers ont permis beaucoup d'inventions, dont trois ont obtenu des Prix Nobel", explique Matteo Cornaglia, cofondateur de Nagi Bioscience, dans l'émission CQFD de la RTS.
Or l'élevage de ces vers est très chronophage, incitant certains laboratoires à opter pour des souris. Mais les choses pourraient changer. La start-up de l'EPFL Nagi Bioscience a créé une machine qui permet d’élever des vers, de les nourrir et de les analyser de manière autonome. "Notre méthode se base sur la manipulation de fluides à l'échelle micrométrique pour confiner chaque vers dans une alvéole dédiée", selon Matteo Cornaglia.
Plusieurs applications en découlent: "On peut par exemple observer leur durée de vie lorsqu'on teste des composants contre le vieillissement." Les recherches se concentrent aussi sur le traitement de maladies. "Ces vers nous permettent de modéliser des maladies humaines complexes neurodégénératives et même des cancers", rapporte le spécialiste.
"Le ver représente le meilleur compromis"
A l'heure où l'utilisation d'animaux pour la recherche crée la polémique, le recours aux vers représente une véritable alternative. "Au niveau biologique, (le ver) est le meilleur compromis qui existe aujourd'hui. Nous proposons de remplacer ce qui se fait sur des organismes sensibles, comme des souris ou des rats, avec des micro-organismes dont on connaît hyper bien la biologie. On sait par exemple que (les nématodes) n'ont pas de système nerveux central et qu'ils ne sont pas sensibles."
En termes d'efficacité, les nématodes représenteraient également un meilleur choix. Matteo Cornaglia cite l'exemple d'un test qui utilise 1400 souris et peut prendre jusqu'à 30 semaines pour obtenir des résultats. Or l'utilisation de vers pour ce même test, explique le scientifique, offrirait non seulement davantage de possibilités, mais serait plus rapide puisqu'il peut être mené en une semaine.
A terme, l'équipe de Nagi Bioscience espère commercialiser sa machine à grande échelle. "On vise des partenariats industriels. On travaille d'ailleurs déjà avec des industries chimiques, cosmétiques et pharmaceutiques."
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Propos recueillis par Bastien Confino et Sébastien Blanc
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