Le Yara Birkeland, navire de 80 mètres de long et 3200 tonnes de port en lourd, va convoyer par la mer jusqu'à 120 conteneurs d'engrais depuis une usine de Porsgrunn (sud-est de la Norvège) vers le port de Brevik, à une dizaine de kilomètres de là. Il évitera ainsi, chaque année, près de 40'000 trajets polluants en camion.
La traditionnelle salle des machines a été remplacée par huit compartiments tapissés de batteries qui donnent au navire une capacité de 6,8 MWh. Il s'agit d'une grande avancée technologique et une petite contribution écologique pour un secteur maritime qui cherche à réduire son empreinte.
Infime contribution aux efforts climatiques
Car, avec ses 678 tonnes de CO2 économisées par an, le Yara Birkeland ne représentera qu'une infime contribution aux efforts climatiques, laquelle ne pourra de toute façon pas être généralisée selon les experts.
"L'électrique a une utilisation de niche, notamment pour les ferries car ce sont des routes assez courtes et stables, éventuellement sur du cabotage et du transport fluvial, mais il est peu adapté pour les longues traversées océaniques", note Camille Egloff, spécialiste du transport maritime au Boston Consulting Group.
"Il faut non seulement de l'autonomie sur une distance importante, mais également équiper les terminaux portuaires de bornes de charge adaptées. Il y a donc un défi non seulement technologique, mais aussi d'infrastructures de chargement nécessitant une coordination de nombreuses parties prenantes", dit-elle.
Plus d'équipage dans un futur proche
Avec de nombreux mois de retard, le Yara Birkeland va commencer une campagne d'essai de deux ans qui l'aidera progressivement à se passer de l'équipage.
Car la passerelle devrait disparaître d'ici trois à cinq ans, laissant le navire parcourir quotidiennement son trajet de 7,5 milles nautiques par ses propres moyens avec l'assistance de senseurs.
Ces opérations autonomes devraient réduire les incidents, souvent liés à des erreurs humaines. Car, si la distance parcourue est courte, les obstacles sont nombreux: le Yara Birkeland devra naviguer dans un fjord étroit, passer sous deux ponts en se jouant des courants et se frayer un chemin parmi les navires de commerce, bateaux de plaisance et autres kayaks avant d'accoster dans un des ports les plus encombrés de Norvège.
Mais l'autonomie requiert aussi la mise en place d'une réglementation qui n'existe pas encore.
afp/oang
Un secteur qui représente 3% des émissions mondiales
Responsable de près de 3% du total des émissions d'origine humaine, le secteur maritime ambitionne de réduire les siennes de 40% d'ici 2030 et de 50% d'ici 2050.
Toutes activités confondues (internationales, domestiques, pêche), ses émissions ont augmenté, selon les derniers chiffres disponibles de l'Organisation maritime internationale (OMI), passant de 962 millions de tonnes de gaz à effet de serre en 2012 à plus de 1 milliard de tonnes en 2018.
Si des dizaines de ferries électriques sillonnent déjà les fjords de Norvège, un gros producteur d'hydrocarbures paradoxalement, les navires transocéaniques devront, eux, compter sur d'autres solutions technologiques (LNG, e-méthanol, hydrogène, ammoniac...) pour se verdir.