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Lumière, bio-filtre, comment lutter contre les très mauvaises odeurs

Un bassin de traitement des eaux usées dans l'ancienne partie de la Station d'épuration (STEP) de Vidy. Lausanne, août 2020. [Keystone - Jean-Christophe Bott]
Lumière, bio-filtre, comment lutter contre les très mauvaises odeurs / La Matinale / 4 min. / le 31 décembre 2021
Station d'épuration, centrale de biogaz, porcherie: certaines entreprises incommodent autant leur voisinage que les personnes qu'elles emploient. Et, alors qu'il est difficile de subir au quotidien un tel inconfort au niveau de l'odorat, il existe désormais des solutions innovantes.

Une start-up romande, Aleph Insight, a décidé de s'attaquer à ce problème d'odeur. La STEP, la station d'épuration de Châteauneuf, à Sion teste son nouveau produit, qui fonctionne selon un procédé optoélectronique, depuis le 28 juin et les réactions sont positives.

Julien, l'un des employés de la STEP, affirme avoir senti la différence: "Beaucoup! C'est pour protéger la santé du personnel que c'est important."

Il fait partie de ces personnes que l'on pouvait suivre à la trace, les mauvaises odeurs restant collées à ses habits. Mais depuis que ce système a été installé, impossible de dire si un collaborateur ou une collaboratrice est passé, ou pas, par l'endroit le plus nauséabond de cette station d'épuration.

Un laser briseur de molécules

Un des appareils de la société Aleph Insight. Aleph est l'acronyme de "Amplification of Light Energy by Pulses with Harmonics". [Aleph Insight]
Un des appareils de la société Aleph Insight. Aleph est l'acronyme de "Amplification of Light Energy by Pulses with Harmonics". [Aleph Insight]

"Pour être très simple, j'ai l'habitude de dire que notre machine produit de la lumière", annonce Denis Piquerez, directeur d'Aleph Insight. "On utilise cette lumière pour purifier le flux d'air qui la traverse. Notre machine est un laser volumétrique dans lequel passe le flux d'air. Ce laser crée une barrière de lumière et la lumière va casser les molécules qui la traversent dans le flux d'air."

Exploiter la lumière, pour éviter les mauvaises odeurs: cela peut laisser certaines personnes sceptiques. C'était le cas, au départ, de Frédéric Clerc, le patron des STEP de Sion.

Mais il a été convaincu par le test grandeur nature: "Tout n'a pas été simple. C'est vrai que le démonstrateur du début, ce n'est plus le démonstrateur que nous avons à l'arrivée. On s'aperçoit que c'est assez bluffant. Dans ce local, il y a beaucoup de dégagement d'ammoniaque, mais on ne sent presque plus l'ammoniaque. Tous mes collègues de travail disent que ça marche, c'est vrai!", se réjouit-il au micro de La Matinale.

Et sur une échelle de 1 à 10, à combien les désagréments sont-ils descendus? "Si 10 était le maximum, je dirais que, maintenant, on en est à 2. C'est plus que significatif."

Argile et copeaux de bois

Ce produit n'est pas le seul à être installé dans des stations d'épuration. A Sion, le système utilisé jusqu'à présent pour traiter les odeurs était un bio-filtre.

Un processus assez encombrant: "On a des gros ventilateurs qui prennent l'air ambiant des locaux", explique Frédéric Clerc. "On reprend cet air vicié et on l'injecte dans des bio-filtres. Et ces bio-filtres sont composés de boules d'argile qu'on retrouve dans les bacs à fleurs. On a une natte filtrante et puis, après, il y a des copeaux de bois qui sont en surface: l'air, au contact de cet argile et du bois, est filtré et cela fait une odeur un peu comme celle de la forêt".

Ce bio-filtre, souvent utilisé encore aujourd'hui, nécessite plusieurs mètres carrés de copeaux, à l'extérieur du bâtiment, pour filtrer les odeurs. Alors que le nouveau produit testé se présente sous la forme de boîtes installées à l'intérieur du lieu, de 40 centimètres sur 60 environ.

Pour mieux comprendre leur fonctionnement, il faut s'approcher des bennes de boues qui résultent du traitement des eaux usées. Les mécanismes d'Aleph Insight sont positionnés en quinconce "pour générer un flux d'air au-dessus des bennes à boues", souligne Denis Piquerez.

La mauvaise odeur est présente, mais elle n'est pas intenable: "C'est vrai qu'on n'a pas masqué ou détruit toutes les odeurs, mais il me semble qu'il y a une odeur qui est respirable", remarque-t-il.

Le bruit ou l'odeur

"Ce qui est intéressant, c'est que depuis qu'on a installé les Aleph, les gens travaillent portes fermées. Auparavant, elles étaient toujours ouvertes et cela avait un certain désagrément pour les riverains. Les portes fermées prouvent que le travail de désodorisation est fait", affirme Frédéric Clerc.

Environ soixante de ces machines ont déjà été installées pour équiper des élevages de poulets. L'objectif consiste désormais à les déployer dans les stations d'épuration des eaux.

Ce système sera aussi testé dans des salles de classe au début de l'an prochain: l'idée est de démontrer la capacité de ces machines à abattre le CO. Mais pour cette dernière étape, il faudra encore surmonter le défi du bruit: "C'est vrai qu'il est fort à cause des ventilateurs, mais les gens préfèrent en général ceci à l'odeur", conclut-il.

Reportage radio: Dominique Choffat

Adaptation web: Stéphanie Jaquet

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