Après avoir publié mi-juillet sur Instagram une photo de son avion et celui de son compagnon, la star de la téléréalité Kylie Jenner a été qualifiée de "criminelle du climat" par des internautes.
"Pollueur et criminel", a tweeté un autre au sujet du réalisateur Steven Spielberg, accusé d'avoir pris un vol de 28 minutes.
D'innombrables "mèmes", des photos ou vidéos humoristiques, ont aussi circulé pour se moquer de la chanteuse Taylor Swift après la publication d'une analyse de l'agence de marketing Yard, qui la classe comme "la célébrité la plus pollueuse de l'année", avec 170 vols depuis le début de l'année.
Des vols des célébrités suivis sur Twitter
Yard s'est basé sur les données du compte Twitter "Celebrity Jets" qui suit les vols de célébrités grâce à des données publiques en ligne.
A l'origine de ce compte, un étudiant de 19 ans nommé Jack Sweeney. Il a commencé en juin 2020 en suivant le jet privé d'Elon Musk et dispose désormais de trente comptes traquant des stars du sport, le patron de Meta Mark Zuckerberg ou encore des oligarques russes.
Il a inspiré d'autres internautes, comme un ingénieur aéronautique de 35 ans qui souhaite rester anonyme. Il a créé en avril le compte "I Fly Bernard" sur les trajets des avions de milliardaires français pour les interpeller sur leur empreinte carbone.
"Ce que j'essaie de dénoncer, c'est leur utilisation des jets privés comme des taxis", explique-t-il, en pointant les nombreux vols intérieurs ou européens effectués par les avions.
La pression des réseaux sociaux
Certaines stars ont réagi face à la pression des réseaux sociaux: la semaine dernière, un porte-parole de Taylor Swift a affirmé dans la presse qu'elle prête régulièrement son jet à d'autres personnes.
Le rappeur Drake, pointé du doigt pour un vol de 14 minutes entre Toronto et Hamilton, a répondu sur Instagram que l'avion avait été déplacé pour le garer ailleurs, "personne n'était à bord de ce vol", a-t-il précisé.
En France, un porte-parole du groupe Bouygues assure que l'avion suivi par "I Fly Bernard", présenté comme celui de Martin Bouygues, appartient au groupe et "est utilisé par plusieurs collaborateurs". Il précise que les émissions de CO2 de l'avion sont compensées par des projets de reforestation, une solution critiquée, car elle ne réduit pas les émissions de manière substantielle.
Bernard Arnault, Jean-Charles Decaux et Vincent Bolloré, également visés par le compte Twitter "I Fly Bernard", n'ont pas souhaité commenter.
Les influenceurs "retardent" la prise de conscience
"Nous nous sommes dits qu'il fallait que ce sujet de l'influence à l'heure de l'urgence climatique émerge dans le débat public", explique Amélie Deloche, vendredi dans La Matinale de la RTS.
La cofondatrice du collectif Paye ton influence! estime qu'il faut que les influenceurs "prennent leurs responsabilités", car ils peuvent orienter "très rapidement" les normes sociales. "Promouvoir des modes de vie et de consommation qui ne sont pas compatibles avec les enjeux climatiques, cela retarde la prise de conscience de toute une génération", souligne-t-elle.
Elle propose des solutions concrètes: "Ils peuvent faire attention à ce qu'ils montrent. Par exemple: éviter de faire des stories lorsqu'ils sont à l'aéroport ou dans un avion, ainsi qu'être plus attentifs à l'origine des produits dont ils font la promotion."
Sujet radio: Miruna Coca-Cozma
Adaptation web: Valentin Jordil avec afp
Une jeunesse avec "des contradictions"
Les modes de vie des célébrités et des influenceurs séduisent les plus jeunes mais paradoxalement, ils sont de plus en plus critiqués sur les réseaux sociaux.
"Il y a un désir de modèles, d'appuis pour s'affirmer et affirmer son identité dans une société où cela compte beaucoup", décrit Christine Castelain-Meunier, sociologue au CNRS, dans La Matinale de la RTS.
Et d'ajouter: "Mais en même temps, il y a cette idée que de plus en plus d'influenceurs ont un mode de vie scandaleux au regard de la Planète. Cela produit des ambivalences, des contradictions qui se traduisent par une très grande adhésion aux influenceurs et, en même temps, ce début de contestation."
Empreinte carbone des vols privés supérieure
Le secteur aérien est responsable de 2% à 3% des émissions mondiales de CO2, mais selon un rapport de Transport & Environment publié en mai 2021, les vols privés ont une empreinte carbone par passager 5 à 14 fois supérieure aux vols commerciaux et 50 fois supérieure au train.
L'aviation privée est d'ailleurs en plein essor depuis la pandémie, ses clients souhaitant éviter les suppressions de vols et la promiscuité face au virus.