Des recherches pour mesurer l'impact des explosions des gazoducs Nord Stream sur la biodiversité
Les premières conclusions des recherches ne sont pas optimistes. Thomas Dahlgren, biologiste marin à l’Université de Göteborg, en Suède, et ses collègues ont analysé durant quatre mois les traces de méthane qui se sont échappées des gazoducs Nord Stream après les explosions.
Sur la base des échantillons d'eau, les scientifiques ont pu détecter des valeurs très élevées de méthane dissous dans l'eau après la fuite de gaz. "En janvier encore, longtemps après que la fuite ait cessé, nous observons toujours des niveaux élevés de méthane dans l'eau à proximité des conduites de gaz rompues," relève également Thomas Dahlgren, interrogé lundi dans La Matinale.
Le biologiste estime que "la seule explication possible est qu'il y a toujours une fuite de gaz qui n'atteint pas la surface de la mer Baltique, mais qui se dissout dans l'eau". La concentration élevée de méthane dans l’eau, combiné au manque d’oxygène qui sévit dans cette mer semi-fermée, pourrait avoir plusieurs conséquences, dont un effet toxique sur les poissons .
Les recherches faites sur des échantillons de cabillaud prélevé sur le site de l'explosion ont montré un impact du méthane sur leurs branchies. Selon Thomas Dahlgen, le méthane pourrait avoir un effet toxique direct dans ces circonstances.
Des mammifères tués ou assourdis
Les détonations qui ont percé les tuyaux à quatre endroits auraient tué plusieurs mammifères marins, comme des marsouins communs, espèce en danger critique dans la Baltique, sur un rayon de 4 kilomètres et en auraient assourdi d'autres sur 50 kilomètres. L'explosion de ces gazoducs et le méthane qui s'en dégage toujours vont donc avoir un impact à long terme sur l'ensemble de l'écosystème.
"Nous savons qu'il y a des bactéries dans l'eau qui utilisent le méthane comme nourriture," rapporte Thomas Dahlgren. Il explique qu'il y aurait trop d'aliments dans la mer Baltique. Seulement, il est encore un peu tôt pour estimer quelles seront les conséquences de ce surplus de carbone, affirme le biologiste.
"Le véritable impact pourrait se produire au printemps et en été, lorsque les plantes commenceront à pousser dans l'eau," ajoute-t-il.
La Baltique sous pression
La mer Baltique subit actuellement les pressions de la surpêche, de la pollution agricole et industrielle, mais aussi des effets de l'enfouissement de milliers de tonnes d’armes chimiques au fond de la mer après la Seconde Guerre mondiale.
La Baltique est la plus jeune mer de la planète Terre et abrite une flore et une faune singulières, en raison de ses caractéristiques uniques: il s'agit de l’une des plus grandes étendues d’eau saumâtre du monde, rappelle Gilles Bœuf, biologiste et professeur à Sorbonne Université.
Sujet radio: Fouad Boukari
Adaptation web: Raphaël Dubois