Il y a de l'hydrogène naturellement présent dans le sous-sol suisse. Contrairement à l’hydrogène produit par l’humain, l’hydrogène naturel, ou hydrogène blanc, est formé par certaines roches. L'Université de Berne, soutenue par l’Office fédéral de l'énergie, sonde actuellement le sol suisse pour identifier les zones propices à cet hydrogène.
L'équipe de recherche, dirigée par Eric Gaucher, a étudié dans un premier temps la carte géologique de la Suisse pour repérer les roches susceptibles de produire de l'hydrogène. Avant de rechercher les grandes failles qui pourraient faire remonter les gaz produits dans les profondeurs de la terre.
"Une fois qu'on a fait le travail d'identification au bureau, on peut aller rechercher sur place avec un détecteur de gaz", expose Eric Gaucher dans La Matinale. "On fait un trou d'environ un mètre avec un perforateur et on va placer une canne de mesure qui est un tube métallique dans le sol et on va aspirer le gaz du sol. Une fois qu'on a trouvé un endroit intéressant, on peut laisser à demeure des petits tubes en PVC dans le sol de façon à pouvoir revenir régulièrement faire des prélèvements de gaz."
Des résultats prometteurs
Il est trop tôt pour dire si la Suisse regorge d'hydrogène blanc. La recherche en est encore à ses débuts, poursuit Eric Gaucher. "En Suisse, il existe des roches qui sont susceptibles de produire de l'hydrogène, principalement dans les cantons alpins comme les Grisons, le Valais ou le Tessin. On a des roches qui ont produit dans le passé de l'hydrogène, c'est certain. Mais est-ce qu'elles en produisent aujourd'hui? C'est ce que j'essaie de démontrer. Je l'ai déjà fait sur une vallée où on a des résultats positifs avec un possible générateur d'hydrogène en profondeur."
On a des roches en Suisse qui ont produit dans le passé de l'hydrogène, c'est certain. Mais est-ce qu'elles en produisent aujourd'hui? C'est ce que j'essaie de démontrer.
Il est encore impossible de savoir dans quel canton de Suisse se déroulent ces travaux. Les résultats des recherches d'Eric Gaucher ne sont pas encore publiés dans des revues scientifiques. "Il faut que l'on vérifie que les résultats que l'on a sont reproductibles et pérennes dans le temps, avant de susciter un enthousiasme trop débordant qui pourrait porter préjudice à l'étude en cours". Mais Eric Gaucher confie que de nouvelles recherches seront menées cette fois en Suisse romande cet été.
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Industrialiser la recherche
Après la phase scientifique, la prochaine étape pour Eric Gaucher et son équipe consistera à faire intervenir des industriels. "On peut espérer que d'ici deux ans, on puisse proposer à des compagnies susceptibles d'investir dans des forages profonds pour aller rechercher soit des réservoirs ou une roche mère, c'est-à-dire l'endroit où l'hydrogène est produit." Mais il y a un préalable à cela, les cantons, qui ont l'autorité en Suisse sur la recherche pour autoriser à passer la recherche à un stade industriel.
Les perspectives de cette source d’énergie renouvelable agitent ces derniers mois scientifiques et industriels, comme en France, dans les Pyrénées et en Lorraine où des forages profonds sont en cours. C'est le cas aussi aux Etats-Unis ou encore en Australie.
Foued Boukari/thc
L'hydrogène naturel: une énergie renouvelable et peu coûteuse
"L'hydrogène vient de l'eau. En présence de roche riche en fer, on va oxyder le fer et libérer la molécule d'eau. Donc, l'hydrogène naturel qui se forme dans la roche, c'est de l'eau cassée", expose Isabelle Moretti, chercheuse à l'Université de Pau.
Isabelle Moretti est aussi membre de l'Académie des technologies. Elle explique dans la Matinale que produire de l'hydrogène naturel permettrait de générer moins de gaz à effet de serre mais cela réglerait aussi la question du prix. "L'hydrogène blanc a un faible impact environnemental, c'est de l'énergie renouvelable et c'est beaucoup moins cher à produire que l'hydrogène fabriqué."
Une énergie a fort potentiel car la science n'a pas encore sondé tous les sites possibles d'extraction et la production actuel est déjà riche. "Les dernières estimations, il y a trois ans, font état de 23 millions de tonnes d'hydrogène naturel généré par an, soit un quart de la consommation mondiale actuelle et ce chiffre pourrait bien augmenter", conclut Isabelle Moretti.