Ces dix dernières années en Suisse ont déjà été deux degrés et demi plus chaudes que la moyenne pré-industrielle. La moitié des milieux naturels et un tiers des espèces sont également menacés dans le pays.
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La biodiversité est en péril et, selon le biologiste et chercheur au Centre national français de la recherche scientifique (CNRS) Bruno David, certains groupes d'espèces d'animaux sont plus à risque de par leur complexité et leurs besoins spécifiques. C'est le cas notamment des amphibiens, des oiseaux qui souffrent du manque de nourriture lié à la diminution du nombre d'insectes, ainsi que des poissons, sous pression en raison de la pêche industrielle.
Bruno David se dit néanmoins optimiste quant aux possibilités d'inverser la tendance. "La biodiversité a une capacité de cicatrisation très importante. En diminuant considérablement ces pressions, on voit les écosystèmes rétablir leur équilibre", indique-t-il jeudi dans l'émission Tout un monde.
Le biologiste, par ailleurs président du Muséum national d'histoire naturelle de Paris, alerte toutefois sur le seuil à ne pas dépasser et à partir duquel le retour à l'équilibre n'est plus possible. "Mais nous avons les moyens d'agir, il suffit qu'on veuille bien le faire."
Un manque de culture naturaliste
Selon Bruno David, des efforts en faveur de la biodiversité peuvent être réalisés notamment dans les océans. "Il faut absolument mettre en place un moratoire sur l'exploitation des grands fonds", là où se trouvent des écosystèmes "extraordinairement fragiles", et restreindre la pêche, déclare le chercheur, qui insiste également sur la réduction des pesticides dans les grandes plaines agricoles et la plantation de haies dans ces plaines.
Le biologiste français constate par ailleurs une méconnaissance du monde du vivant dans les pays latins. "Le terme de "culture" s'applique à la culture littéraire, musicale et artistique de manière générale, mais pas à l'histoire naturelle. Pourtant, nous sommes dans un monde sous tension, où l'environnement est globalement en crise. Alors même que nous aurions besoin d'avoir une culture naturaliste importante, cette dernière est relativement absente", déplore Bruno David.
Si vous confondez Zola et Proust, vous êtes un inculte profond. Par contre, si vous êtes incapables de distinguer une feuille de chêne d'une feuille de charme ou de reconnaître trois espèces d'oiseaux, c'est tout à fait normal
"Si vous confondez Zola et Proust, vous êtes un inculte profond. Par contre, si vous êtes incapables de distinguer une feuille de chêne d'une feuille de charme ou de reconnaître trois espèces d'oiseaux, c'est tout à fait normal", caricature-t-il.
Une réticence au changement
Le chercheur regrette en outre que le monde s'invente "des dérivatifs justifiant nos réticences à changer nos modes de vie", malgré des causes du réchauffement climatique bien connues aujourd'hui. "Nous sommes tout le temps en train de repousser le problème et de mettre la poussière sous le tapis", estime-il.
Bruno David donne notamment l'exemple des références climatiques et de la conformité de la météo aux normales saisionnières. "Ces normales sont glissantes et calculées tous les dix ans sur la base des 30 années précédentes. En ce moment, les 30 dernières années incluent les canicules de 2003 et de 2019. Les normales saisonnières actuelles sont donc bien plus élevées que celles mesurées entre 1970 et 2000, par exemple", explique-t-il.
"On fausse ainsi le thermomètre et cela nous rassure", ajoute le biologiste.
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Propos recueillis par Blandine Levite/iar