Toujours pas de compromis à Berne autour de la loi sur l'approvisionnement en électricité
Ce dossier brûlant de la politique énergétique était au menu du Conseil des Etats jeudi. Il doit permettre de développer massivement et rapidement les énergies renouvelables en Suisse. Le projet fixe des objectifs de production pour 2035 et 2050. Mais la manière pour y parvenir fait débat, et le projet fait la navette entre les deux Chambres depuis un an. Malgré des dizaines d’heures de discussions, il n’y a toujours pas de compromis sur la table.
Pourtant, sur le fond, les deux Chambres partagent la même vision: elles veulent faciliter la construction de grandes installations hydrauliques, photovoltaïques et éoliennes, et leur établissement primera en partie sur la protection de la nature et du paysage.
Trois points d'achoppement
Mais les deux instances peinent à s’accorder sur de nombreuses mesures. En matière d'énergie solaire, le National souhaiterait rendre obligatoire la pose de panneaux photovoltaïques sur tous les nouveaux bâtiments et grands parkings. Une obligation que refuse catégoriquement une majorité aux Etats.
"Les obligations ne fonctionnent pas dans les urnes en Suisse", argue le conseiller aux Etats haut-valaisan du Centre Beat Rieder. En outre, selon lui, le solaire à lui seul "ne suffira jamais à l'approvisionnement de la Suisse", même si l'on installe des panneaux sur tous les bâtiments. "C'est une aide pour le futur, mais ce n'est pas la solution pour assurer l'approvisionnement d'énergie."
>> Lire également : Des restrictions à Zurich pour les panneaux solaires sur les façades
Autre point d'achoppement, les débits résiduels, soit la quantité minimale d’eau qui doit demeurer dans le lit d’une rivière en aval d’un barrage pour limiter l’impact sur la faune et la flore. Le National veut suspendre ces prescriptions, tandis que les sénateurs ou sénatrices proposent plutôt de donner une marge de manoeuvre au Conseil fédéral pour les assouplir temporairement en cas de menace de pénurie.
Enfin, le Conseil national souhaite mettre en place des mesures contre le gaspillage d’énergie, qui n'ont pas passé la rampe des Etats, au grand désarroi de la sénatrice écologiste Lisa Mazzone. "On espère beaucoup que le Conseil national puisse corriger un certain nombre de décisions qui ont été prises (jeudi)", déplore-t-elle.
Le spectre du référendum
Pour la Genevoise, le compromis actuel n'est pas suffisamment équilibré. "Les atteintes à la nature sont complètement disproportionnées par rapport à l'effort qu'on fait pour l'énergie solaire ou l'efficacité énergétique", juge-t-elle.
Le dossier risque donc d'occuper encore un moment le Parlement, et il n'est pas sûr que toutes les divergences puissent être réglées d'ici la fin de la législature cet automne.
Par ailleurs, le compromis qui sortira finalement du Parlement risque d'être contesté, soit par les organisations environnementales s'il est trop permissif, soit par l'UDC ou le monde économique s'il est trop contraignant. Les deux camps brandissent le spectre du référendum.
Le Conseil fédéral, lui, espère une entrée en vigueur de la loi en 2025.
Valentin Emery/jop
Procédures légèrement raccourcies pour l'éolien
Si les Chambres ne sont pas parvenues à se mettre d'accord sur l'énergie solaire, le dossier des éoliennes a passé le cap du Parlement. Après le National, un projet visant à raccourcir les procédures d'autorisation a passé le cap du Conseil des Etats jeudi. Actuellement, ces procédures peuvent durer jusqu'à 20, voire 25 ans, et la Suisse est à la traîne dans le domaine en comparaison européenne.
"Ce n'est pas une révolution, mais une petite évolution", tempère toutefois Lionel Perret, directeur de la faîtière de l’éolien Suisse Eole, vendredi dans La Matinale de la RTS. Selon lui, le changement concerne surtout les projets les plus avancés, "et ça ne change pas fondamentalement le parcours du combattant des procédures".
Selon lui, la Suisse, malgré sa taille et sa densité de population, doit pouvoir miser sur l'installation d'éoliennes et devrait pouvoir compter sur des procédures plus favorables. L'éolien représente aujourd'hui 0,2% des besoins en électricité du pays.