Modifié

Crise de l'eau: état des lieux en Suisse et sur la planète bleue

Crise de l'eau: état des lieux en Suisse et sur la planète bleue. [Fotolia - Adolfo]
Crise de l'eau: état des lieux en Suisse et sur la planète bleue. - [Fotolia - Adolfo]
Les experts sont unanimes: l'eau douce, élément fondamental pour la vie sur les territoires émergés de notre planète bleue, se raréfie à l'échelle globale. Fondamentale, l'eau l'est aussi pour l'humain, pour sa survie, sa santé, son agriculture, ses industries, ses loisirs. Petit état des lieux d'une crise mondiale qui s'aggrave. Une crise qui n'épargnera probablement pas la Suisse, ce "château d'eau de l'Europe".

Pour la Journée mondiale de l'eau du 22 mars 2023, l'UNESCO et l'ONU-Eau ont publié leur édition annuelle du Rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau (rapport aussi disponible sous forme de résumé).

Le rapport est sans appel: le risque d'une "crise mondiale" de l'eau est réel. En fait, la "crise" est déjà bien présente pour une grande partie de l'humanité.

26% de la population sans accès à l'eau potable

Selon le rapport, "entre 2 et 3 milliards de personnes connaissent des pénuries d’eau pendant au moins un mois par an" dans le monde.

Autres faits alarmants: au 22 mars 2023, 2 milliards de personnes (soit 26 % de la population) sont privées d’accès à l’eau potable et 3,6 milliards de personnes (46 %) n’ont pas accès à un système d’assainissement géré de manière sûre.

Ces femmes ont récupéré de l'eau dans un réservoir donné à la veille de la Journée mondiale de l'eau, à la périphérie de Sana'a, au Yémen. La Journée mondiale de l'eau est célébrée chaque année le 22 mars pour souligner l'importance de l'eau douce. [Yahya Arhab]
Ces femmes ont récupéré de l'eau dans un réservoir donné à la veille de la Journée mondiale de l'eau, à la périphérie de Sana'a, au Yémen. La Journée mondiale de l'eau est célébrée chaque année le 22 mars pour souligner l'importance de l'eau douce. [Yahya Arhab]

Enfin, selon les projections de l'UNESCO, "la population urbaine mondiale confrontée au manque d’eau devrait doubler, passant de 930 millions en 2016 à 1,7 – 2,4 milliards de personnes en 2050".

Et quand l'eau douce vient à manquer, les conséquences sont nombreuses: risques sanitaires, sécurité alimentaire en péril, déclin de la biodiversité, approvisionnements en hydro-électricité et énergie hydraulique chamboulés: un apport restreint en eau douce met en situation de tensions extrêmes toute société qui y est confronté.

Causes des stress hydriques

Les sécheresses extrêmes et prolongées ainsi que la modification du régime des pluies induites par le réchauffement climatique accroissent la pression sur l'eau douce de manière inédite.

Mais si cette ressource se fait de plus en plus rare, c'est surtout à cause des usages qu'en fait l'être humain et les conséquences de ses activités sur le précieux liquide. Le réchauffement climatique n'est qu'une des nombreuses conséquences néfastes des activités humaines sur le cycle naturel de l'eau.

Cycle naturel de l'eau [Wikimedia - Astrid Parchet]
Cycle naturel de l'eau [Wikimedia - Astrid Parchet]

De la surexploitation des nappes phréatiques et des eaux de surface pour l'irrigation agricole au phénomène de ruissellement lié à l'artificialisation des sols, des piscines extérieures privées à l'arrosage des golfs en passant par le lavage des voitures, de l'exploitation d'un barrage hydroélectrique alpin au drainage d'une prairie marécageuse, sans parler des pollutions en tout genre, le cycle de l'eau est sans cesse bouleversé par les activités humaines. 

Même la production d'un t-shirt requiert de l'eau: 1 kg de coton nécessite 10'000 litres d'eau douce, donc un t-shirt de 250 grammes demande 2500 litres.

Et chaque année, selon l'UNESCO, l'humanité augmente de 1% sa consommation d'eau douce par an. Un rythme de croissance qui devrait perduré jusqu'en 2050 à ce même taux, selon les projections des experts d'agence onusienne. La contradiction entre l'existence d'une ressource fragile, précieuse et limitée et son exploitation toujours croissante et à outrance ne peut à terme que survenir, et de manière toujours plus spectaculaire et dramatique.

Et le "château d'eau de l'Europe" dans tout ça?

Si la Suisse jouit parfois, en partie à raison, du statut de "château d'eau de l'Europe", grâce notamment à la présence sur son territoire des sources du Rhône et du Rhin, elle n'est pas tirée d'affaire pour autant.

L'été 2022, particulièrement sec, a par exemple été catastrophique pour les nappes phréatiques et les écosystèmes de l'ouest de la Suisse (au bord du lac Léman, dans le Jura) et du sud des Alpes (Tessin, sud des Grisons).

Et comme il existe, au niveau mondial, de grandes disparités régionales par rapport au stress hydrique, il en va de même au niveau suisse. Le canton du Valais, par exemple, a vu certaines de ses communes, Leytron et Crans-Montana notamment, imposer des restrictions d'usage de l'eau à la mi-mai 2023.

>> Voir aussi le sujet du 19h30 de la RTS :

Malgré la pluie, la commune de Leytron (VS) a décidé de restreindre l'arrosage.
Malgré la pluie, la commune de Leytron (VS) a décidé de restreindre l'arrosage. / 19h30 / 2 min. / le 14 mai 2023

Si la situation de l'année 2023 est loin d'être "critique" dans le pays grâce aux pluies des dernières semaines, l'objectif de ces deux communes reste de faire changer les habitudes de la population en prévention d'une éventuelle sécheresse cet été.

L'aspect préventif de la mesure fait doublement sens au regard des risques accrus de sécheresse liés au réchauffement climatique dans les décennies à venir. Si une prévention à court terme - pour l'été 2023 - est prudente, à moyen terme, une véritable éducation à la sobriété hydrique s'avère essentielle pour atténuer les risques de survenue d'une sécheresse ou de son aggravation.

Julien Furrer

Publié Modifié