L'industrie des bateaux de croisière est en plein essor, avec des paquebots qui peuvent désormais accueillir plus de 6000 personnes à bord. Ces dimensions gigantesques sont pointées du doigt dans l'étude européenne de l'ONG Transport et Environnement publiée le 15 juin 2023.
A titre d'illustration, le plus grand paquebot au monde, l'Icon of the Seas de la Royal Caribbean Cruise Line, prévu pour janvier 2024, pourra accueillir à son bord 7000 passagers et les divertira avec sept piscines, une vingtaine de restaurants et un aquaparc. Ces dimensions suscitent des critiques sur les coûts environnementaux. Selon l'ONG Transport et Environnement, plus les bateaux sont grands, plus ils émettent des gaz à effet de serre et d'autres polluants. Mais il n'y a pas que ça, d'après Constance Dijkstra, coautrice de l'étude interrogée dans La Matinale.
"Il y a également les particules fines et les oxydes d'azote qui sont des polluants avec un effet néfaste sur la santé des gens qui habitent plutôt sur les côtes, proches des ports. Ils ont un impact sur les maladies comme l'asthme, les maladies respiratoires, etc."
"Plus c'est gros, plus ça pollue"
Pour Constance Dijkstra, les armateurs mettent en avant que l'efficacité énergétique d'un gros bateau est plus grande que celle d'un petit paquebot, ce qu'elle conteste.
"En 2022, le navire qui a émis le plus de CO2 dans le transport en Europe, c'est le MSC Grandiosa. Il est l'un des plus gros bateaux de croisière dans le monde. On estime qu'il a émis 130'000 tonnes de CO2, soit l'équivalent de ce que 68'000 voitures émettent en une année."
L'entreprise italo-suisse MSC Croisières conteste les chiffres qu'elle considère comme "incorrectes, basés sur des calculs erronés et qui proviennent de sources non vérifiées". Le plus grand croisiériste européen assure vouloir atteindre le zéro-émission à l’horizon 2050.
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Des technologies pour moins polluer
Les compagnies de croisière se défendent en soulignant l'usage de technologies pour moins polluer.
"On n'est pas dans des films de science-fiction mais plutôt sur l'intégration de technologies qui existent déjà sur des plus petits navires. Les technologies sont notamment la voile et la combinaison de piles à combustibles qui permettent l'élimination des émissions", argumente Marie-Caroline Laurent, directrice Europe de l'association internationale des compagnies de croisière.
Et d'ajouter: "L'utilisation de biocarburants ou des carburants alternatifs sont une autre technologie dont l'objectif est de pleinement décarboner le transport maritime. Ils consistent à utiliser des carburants synthétiques non basés sur la biomasse et sont produits à base d'électricité verte".
Sujet radio: Miruna Coca-Cozma
Adaptation web: Julie Marty
Un modèle de plus en plus éloigné de la croisière sur l'eau
Le but de ces croisières n'est plus uniquement de voyager, mais aussi et surtout de se distraire grâce aux nombreuses activités proposées à bord. Le bateau s'est transformé en parc d'attraction flottant, ce qui plaît aux passagers et génère des revenus pour la structure. A tel point que la géographe Véronique Mondou, maître de conférences à l'Université d'Anger, estime que les passagers ne fouleront peut-être bientôt plus le sol.
"Une croisière type de six jours propose simplement trois escales et le reste des journées se fait à bord. Ce modèle économique permet la rentabilité de la croisière car beaucoup d'activités sont inclues dans le tarif mais d'autres sont en supplément. De plus, les voyageurs n'ont pas le temps en une semaine de participer à toutes les activités proposées, ce qui génère aussi des revenus pour le bateau."
Et d'ajouter: "Il existe aujourd'hui des compagnies qui développent les îlots privés, comme récemment Cococay de Royal Caribbean. Ce sont encore de nouveaux parcs d'attractions qui n'ont aucun rapport avec la population locale. Il n'y a donc aucune incidence économique pour les territoires."