Chaque semaine, plus de trois activistes environnementaux sont tués dans le monde
Selon un rapport annuel de l'ONG Global Witness publié la semaine dernière, la Colombie est le pays le plus dangereux pour les défenseurs de la planète.
Paysans, fonctionnaires d’Etat, avocats ou encore journalistes, les victimes de ces violences luttent contre l’accaparement des terres et le pillage de ses richesses. En Colombie, ils sont soixante défenseurs de l’environnement et de la terre à avoir été assassinés en 2022.
Les raisons de ce triste record sont liées à la situation politique particulière du pays, explique dans le 12h30 de la RTS Mathilde Allain, maîtresse de conférences à l’Université Paris III: "Même si en 2016, il y a eu la signature des accords de paix entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires colombiennes (FARC), le conflit perdure. Plusieurs groupes armés cherchent à reprendre le contrôle des zones proches de l’Amazonie (...). Et ces régions sont au coeur de batailles pour l'exploitation des ressources naturelles, du bois, ou de l'or, mais aussi de la production de coca et de cocaïne".
Un tiers des morts sont des indigènes
Les ressources naturelles sont souvent pillées aux communautés indigènes. Visées par les groupes armés, elles représentent 34% des défenseurs environnementaux tués en 2022.
Le profil des personnes indigènes prises pour cible a évolué ces dernières années, affirme Mathilde Allain. "Auparavant, les groupes armés et les différentes milices privées s’en prenaient en priorité aux leaders les plus connus. Actuellement, on constate une diversification du profil des victimes avec des petits groupes qui sont pris pour cible. Fréquemment, de petites communautés se mobilisent, à l’échelle d’un village ou d’un petit territoire. Elles ont plus de difficultés à se faire connaître, à faire savoir qu'elles sont menacées."
Le combat des défenseurs de la terre et de l’environnement en Colombie est en quelque sorte celui de "David contre Goliath", conclut Mathilde Allain.
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Sujet radio: Mathilde Salamin
Adaptation web: Miroslav Mares
L'Amérique latine représente 88% des 177 victimes
La forêt amazonienne (étendue sur huit pays), dévorée par l'exploitation forestière et les incendies criminels pour faire place à l'élevage de bétail, a connu une année 2022 particulièrement meurtrière pour les défenseurs de l'environnement.
"L'année dernière, 39 défenseurs y ont trouvé la mort. Parmi eux, 11 appartenaient à des communautés indigènes", selon Global Witness. "Année après année, ceux qui défendent ce biome (...) laissent leur vie pour protéger leurs maisons, leurs moyens de subsistance et la santé de notre planète", avertit l'ONG.
En 2022, l'assassinat du journaliste britannique Dom Phillips et de l'expert indigéniste brésilien Bruno Pereira en Amazonie brésilienne est devenu un symbole de la violence croissante dans cette région où opèrent les trafiquants de drogue, les mineurs illégaux et les braconniers.
Au Brésil, les écologistes ont dû faire face à une "hostilité implacable" de la part de l'ex-président Jair Bolsonaro (2019-2022). Et le Mexique, pays le plus meurtrier en 2021, "a enregistré une baisse notable", passant de 54 à 31, mais la situation y reste "alarmante", juge l'ONG. "Au moins 1910 défenseurs de la terre et de l'environnement ont perdu la vie dans le monde entier depuis que Global Witness a commencé à documenter ces assassinats en 2012", rappelle ce nouveau rapport. Sur ce total, 70% ont été enregistrés en Amérique latine.