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Hugo Clément: "Comment veut-on changer les choses si on ne parle pas à toute une partie de la société?"

L'invité de La Matinale (vidéo) - Hugo Clément, journaliste français engagé pour l'environnement
L'invité de La Matinale (vidéo) - Hugo Clément, journaliste français engagé pour l'environnement / L'invité-e de La Matinale (en vidéo) / 13 min. / le 29 septembre 2023
Depuis des années, Hugo Clément s'engage pour l'environnement. Le deuxième journaliste le plus suivi de France sur les réseaux sociaux prône une écologie concrète et pragmatique. Parfois critiqué pour avoir dialogué avec le RN ou des patrons de grandes entreprises, il estime au contraire qu'il est important d'ouvrir le débat à tout le monde.

Le 13 avril dernier, le journaliste français Hugo Clément s'est retrouvé sous le feu des critiques pour avoir participé à un débat organisé par l'hebdomadaire Valeurs actuelles aux côtés de Jordan Bardella, le président du parti d'extrême droite Rassemblement national (RN).

"Débattre avec les gens, ce n'est pas donner une caution", se défend-il vendredi dans La Matinale de la RTS. "Je pense qu'on peut s'engager pour l'écologie, qu'on soit de gauche ou de droite, peu importe ce qu'on pense sur d'autres sujets."

Parler avec tout le monde

Le journaliste, très engagé dans la cause environnementale et animale, estime qu'il faut inclure tout le monde dans la discussion si l'on veut faire changer les choses. "En France, Marine Le Pen, au second tour de la présidentielle, a fait plus de 40% des voix", rappelle-t-il. "Si vous partez du principe que ces millions de Françaises et de Français, il ne faut pas leur parler, il ne faut pas essayer de les convaincre et il ne faut pas les informer sur l'écologie, le combat est perdu d'avance."

Il estime donc que "parler à tout le monde est indispensable", y compris les personnes ne partageant pas ses opinions. "Ce n'est pas avec les quelques millions de personnes très sensibles à l'écologie et très engagées qu'on va réussir à tout changer", affirme-t-il. "Il faut convaincre une majorité des gens, c'est comme ça que ça marche dans les démocraties."

Ce n'est pas avec les quelques millions de personnes très sensibles à l'écologie et très engagées qu'on va réussir à tout changer

Hugo Clément, journaliste

Une partie de la gauche écologiste reproche également à Hugo Clément de s'afficher avec des grands patrons. "Discuter avec des grands patrons, essayer de convaincre des entreprises de changer leur manière de faire, c'est indispensable", rétorque le journaliste. "Comment veut-on changer les choses si on ne parle pas à toute une partie de la société?", s'interroge-t-il.

"Si on considère que les entrepreneurs sont tous des grands méchants et qu'ils sont forcément une catastrophe pour l'environnement et qu'on ne leur parle pas, on ne changera pas les choses", ajoute Hugo Clément, qui pense au contraire qu'une partie du changement viendra des entreprises, "qui parfois sont beaucoup plus réactives que les politiques".

Ecologie pragmatique

Hugo Clément dénonce un certaine écologie dogmatique en politique, tous partis confondus. "Je reproche à certaines personnes de gauche ou de droite de ne pas chercher le dialogue et d'être dans une forme de sectarisme où c'est uniquement elles qui ont raison", explique-t-il.

Pour lui, l'écologie doit dépasser les clivages politiques. "Il y a des alliés de l'écologie dans tous les camps politiques et c'est important de dépasser ce clivage parce que si on considère que l'écologie c'est forcément un parti, on ne s'en sortira jamais", déclare-t-il. "On a besoin de tout le monde", ajoute-t-il. "On est sur un bateau qui est en train de couler. Il y a un trou dans la coque et on n'a pas besoin de savoir qui pense quoi sur les autres sujets pour essayer de se mettre tous ensemble et boucher le trou."

Le journaliste défend une écologie pragmatique, qui propose des solutions concrètes. "Je pense que c'est aussi le travail de journaliste de proposer des pistes d'action", affirme-t-il.

"Quand vous parlez d'environnement, c'est souvent des informations qui sont un peu tristes, un peu déprimantes", poursuit-il. "Si vous laissez le public juste en lui disant: 'voilà, on va tous mourir, c'est terrible, maintenant débrouillez-vous avec cette information', je pense qu'on ne va pas jusqu'au bout de notre boulot de journalistes."

On est sur un bateau qui est en train de couler. Il y a un trou dans la coque et on n'a pas besoin de savoir qui pense quoi sur les autres sujets pour essayer de se mettre tous ensemble et boucher le trou

Hugo Clément, journaliste

Son engagement pour l'écologie, Hugo Clément le partage à travers de nombreux canaux. Très actif sur les réseaux sociaux, le journaliste est aussi présent à la télévision, avec son émission "Sur le Front", sur France 5, à la radio avec une chronique sur France Inter et sur son média en ligne Vakita.

"Ce que j'essaie de faire dans tous les formats que je mets en lumière, c'est d'apporter du soutien médiatique aux gens qui sont sur le terrain", explique-t-il. "Une bonne part de nos émissions sont consacrées à mettre en lumière les scientifiques, à montrer leurs travaux", poursuit-il, "mais aussi les ingénieurs, les gens qui essaient de construire des choses pour régler les problèmes, des militants qui se battent pour défendre un bout de forêt ou un bout de rivière."

Un journaliste engagé

Pour Hugo Clément, il est donc indispensable de soutenir les gens qui s'engagent sur le terrain et qui "essaient vraiment de changer les choses". En tant que journaliste, il estime que sa mission consiste à "enquêter sur les questions environnementales, révéler des informations que certains veulent cacher, qui ne sont pas connues du grand public".

C'est le journalisme justement qui l'a amené à s'intéresser aux questions d'écologie. "C'est venu avec mon métier de reporter, qui m'a amené sur le terrain découvrir de mes propres yeux des choses dont je n'avais pas conscience, notamment sur la question de la cause animale", explique-t-il.

Il raconte que c'est en visitant des élevages intensifs, des abattoirs ou encore en constatant les dégâts de la pollution industrielle sur les cours d'eau et les forêts qu'il en est venu à s'engager pour la cause environnementale. Et cet engagement n'est selon lui pas incompatible avec son métier de journaliste.

La situation est trop grave pour se cacher derrière une prétendue objectivité qui n'existe pas

Hugo Clément, journaliste

"L'objectivité, pour moi, elle n'existe pas", affirme-t-il. "On est tous influencé par ce qu'on a vécu. On est des humains, on n'est pas des robots. Donc je pense qu'on peut assumer une part d'engagement sur certains sujets sans que cela nuise au travail de journalisme."

Il explique que le journalisme consiste à "chercher la vérité" et "enquêter sur des faits", ce qu'il assure faire dans ses émissions et ses chroniques. "Ça n'empêche pas d'assumer un engagement sur certaines questions, notamment sur les questions environnementales", dit-il. "Parce que je pense que la situation est trop grave pour se cacher derrière une prétendue objectivité qui n'existe pas."

S'il est très présent dans les médias, Hugo Clément n'hésite pas à étendre son engagement à d'autres moyens. Il signe notamment une bande-dessinée intitulée "Le Théorème du Vaquita" et anime une conférence musicale sur "la face cachée de l’exploitation animale", avec le musicien électro Worakls, vendredi à la salle Métropole de Lausanne.

"J'essaie toujours de trouver des nouvelles façons de parler de ce sujet-là", explique-t-il. Avec ce concept original, il espère toucher un public plus large, mais sans être prédicateur. "J'essaie de ne jamais expliquer aux gens ce qu'ils doivent faire, mais toujours d'être dans mon rôle de journaliste, de donner des informations, de raconter ce que j'ai vu et ensuite les gens agissent comme ils le souhaitent", conclut-il.

Propos recueillis par Pietro Bugnon

Adaptation web: Emilie Délétroz

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