"On n'a pas besoin d'un consensus" pour faire bouger les choses, estime la militante écologiste Camille Etienne
Pour faire bouger les choses, Camille Etienne passe par plusieurs étapes: "Un travail de fond avec les ONG et les experts pour comprendre le sujet, faire valoir nos positions auprès des politiques publiques qui sont censées nous protéger (...) et, si on n'obtient pas ce qu'on veut, mobiliser la société civile par les actions de terrain avec les associations et par les actions sur les réseaux sociaux."
"Tout ce qu'on fait est appuyé sur la science", affirme la militante de 25 ans, qui est de passage en Suisse pour parler de son livre "Pour un soulèvement écologique: dépasser notre impuissance collective", sorti il y a quelques mois aux éditions du Seuil.
Une question de justice sociale
L'invitée de la RTS est persuadée que pour résoudre le dérèglement climatique, il faut "aussi s'attaquer à la source" des inégalités sociales. Selon un rapport d'Oxfam, les plus riches sont les plus responsables du dérèglement climatique, mais les moins touchés, contrairement aux personnes les plus précaires. Donc, il n'y a "pas de justice climatique sans justice sociale, c'est un sujet politique", affirme-t-elle.
Pour s'attaquer à la racine du problème, "il faut réduire les inégalités sociales. On n'a pas d'autre choix", martèle Camille Etienne.
La jeune militante écologiste française assure aussi que la politique devrait toujours appuyer ses décisions "sur des vérités et des vécus" et ne devrait "en aucun cas" se défaire de la science. "Pourtant, c'est ce qu'on voit avec le climatoscepticisme qui augmente, y compris dans les instances dirigeantes", avance-t-elle encore.
S'appuyer sur un groupe de militants actifs
Enfin, pour agir, le consensus n'est pas la seule solution, note Camille Etienne. "On n'a pas besoin que 50% de la population devienne activiste!"
Selon une étude d'Harvard citée par Camille Etienne, 3,5% de la population suffirait à tout changer. Il faut "une minorité active" et qui arrive à convaincre d'autres personnes. "C'est atteignable", assure-t-elle. Sans oublier de le faire "avec démocratie", bien sûr.
"On ne peut plus décider derrière des portes closes sans prendre en compte le sujet de l'urgence climatique et sociale", a encore déclaré Camille Etienne dans le 19h30. "Ce n'est pas du tout pris à la hauteur de l'enjeu, mais il y a eu un vrai réveil. Ce qui était des marches de climat dans la rue se sont transformées en actions plus politiques."
Propos recueillis par: Eric Guevara-Frey
Adaptation web: juma avec afp
La Norvège accepte d'explorer plutôt que d'exploiter ses fonds marins
Le 9 janvier 2024, le Parlement norvégien a donné son feu vert à la prospection minière d'une partie de ses fonds marins dans l'objectif de devenir un grand producteur mondial de minerais. Le pays estime que cela lui permettra de réussir sa transition énergétique. ONG et scientifiques avaient pourtant averti sur les incertitudes liées à l'impact qu'une telle pratique aurait sur l'écosystème.
En mettant à disposition 280'000 km2 de ses fonds marins, la Norvège deviendrait l'un des premiers pays au monde à se lancer dans cette pratique controversée. Des manifestants se sont par la suite rassemblés en face du Parlement pour exprimer leur mécontentement.
>> Lire aussi : Dans les profondeurs sous-marines, la révolution minière est controversée
"Ce n'est pas un scandale de plus", indique Camille Etienne dans Tout un monde. "C'est une toute nouvelle industrie qui s'ouvre", comme si on arrivait avant l'invention des engrais par exemple. Elle explique que le sujet consiste à se questionner sur l'utilisation des minerais dans l'océan profond, qui est "l'endroit que l'on connaît le moins".
"Un pas dans la bonne direction"
Pour lutter contre ce projet, de nombreux pays se sont mis d'accord pour un moratoire sur les eaux internationales. Lors de la dernière réunion de l'assemblée générale de l'Autorité internationale des Fonds marins, il a été soutenu "par 24 pays, dont la Suisse et la France", se réjouit l'invitée de la RTS.
Résultat, la Norvège n'a au final pas accepté l'exploitation minière, comme elle en parlait au début, mais bien l'exploration.
C'est "un pas dans la bonne direction, mais ça veut quand même dire que l'industrie se prépare, donc c'est loin d'être fini", tempère Camille Etienne. D'autant que la Norvège a décidé d'ouvrir des eaux territoriales, dont le Svalbard en Arctique, précise encore la militante française.