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Céline Vara: "On retrouve les microplastiques partout, même dans les testicules"

La problématique de la pollution au plastique s’invite sous la coupole: interview de Céline Vara
La problématique de la pollution au plastique s’invite sous la coupole: interview de Céline Vara / La Matinale / 5 min. / le 24 mai 2024
Jusqu'à 8000 tonnes de plastique se retrouvent chaque année dans la nature en Suisse, principalement sous forme de microplastique, alerte vendredi un rapport de l’association Earth Action. Cette pollution est un problème de santé publique, estime dans La Matinale la conseillère aux Etats Céline Vara (Verte/NE).

Environ un kilo de plastique par personne et par an est rejeté dans la nature en Suisse, s'inquiète un rapport de l’association Earth Action, qui réunit plusieurs études scientifiques sur la question. A la lecture d'un tel chiffre, on pourrait s'imaginer que les déchets s'amoncellent dans nos rues ou nos forêts. Mais ces montagnes de plastique sont invisibles, puisqu’elles sont composées à plus de 90% de microplastiques.

L’usure des pneus constitue la principale source de pollution, à plus de deux tiers (lire encadré). Viennent ensuite la peinture pour les façades et le marquage des routes, et finalement le littering — les détritus.

Problème supplémentaire, le plastique n’est pas inerte et uniforme. Selon le rapport, plus de 16'000 produits chimiques sont utilisés pour le fabriquer sous toutes ses formes aujourd’hui. Ces produits sont souvent nocifs pour la santé et la biodiversité, avec notamment des perturbateurs endocriniens.

>> Les précisions dans La Matinale :

ABE - Pollution du Léman: halte au plastique! [RTS - Les détritus jetés dans la nature constituent environ 10 tonnes par année dans le Léman.]RTS - Les détritus jetés dans la nature constituent environ 10 tonnes par année dans le Léman.
Des milliers de tonnes de plastique finissent dans la nature chaque année en Suisse / La Matinale / 1 min. / le 24 mai 2024

Omniprésence dangereuse

Ce rapport est accompagné d’une lettre ouverte, signée par des scientifiques et des ONG, adressée aux parlementaires, à la veille de la session d’été qui débute lundi. Une vingtaine d’objets ont été déposés autour du plastique.

La conseillère aux Etats Céline Vara (Verte/NE) est l'autrice de plusieurs d'entre eux. Invitée dans La Matinale, elle pointe l'omniprésence des microplastiques. "C'est un peu comme les pesticides de synthèse, comme les PFAS: les micro et nanoplastiques, on ne les voit pas, mais ils sont partout, dans l'air, dans l'eau, dans la terre et même sur les glaciers."

"Et on sait même, avec plusieurs études faites ces quatre dernières années, qu'on les retrouve aussi dans le corps, dans le sang, dans le placenta. Et tout dernièrement, une étude a démontré qu'on les retrouvait dans les testicules, et qu'on pouvait faire un rapprochement avec la baisse de la fertilité. "

"Un problème politique"

Pour la conseillère aux Etat, il s'agit d'un problème politique. "Il y a bien sûr un impact gravissime sur la santé publique, mais aussi sur l'environnement, sur la biodiversité. Et il y a aussi tout un plan économique lié à l'utilisation de ce plastique — et du pétrole de manière plus générale. Qu'est-ce qu'on va faire maintenant pour essayer de rendre cette filière propre?"

Et d'énumérer: "Est-ce qu'on doit se passer complètement du plastique? Est-ce qu'on arrive à le recycler? On voit aujourd'hui que c'est très compliqué, il y a des milliers de substances qui composent ces plastiques, ce sont parfois des polluants graves, toxiques. Comment fait-on pour les traiter? Il s'agit de vraies questions que l'on a posées au Conseil fédéral, qui n'est pas très motivé jusqu'à maintenant à donner suite."

Le Conseil fédéral estime qu'il faut encore des études avant d'agir... Pourtant, c'est justement ce qu'on demande, des études!

Céline Vara

Ce manque d'engagement du gouvernement étonne la sénatrice verte. "C'est un domaine qui touche tout le monde, et on s'attendait donc à ce que ça transcende les frontières partisanes et à ce que ça interpelle le Conseil fédéral. Mais les réponses qu'il donne sont mitigées."

"Il propose de ne pas donner suite à ces objets parlementaires en estimant qu'il faut encore des études... Pourtant c'est justement ce qu'on demande, des études! Et des actions pour pouvoir aller de l'avant, et savoir véritablement quel est le défi qui s'annonce pour le traitement de ces plastiques", souligne Céline Vara, qui dit "espérer vraiment" que la session parlementaire donne suite à un certain nombre de ces interventions.

Sujet radio: Alexandra Richard et Valérie Hauert

Version web: Antoine Schaub

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Des recherches pour essayer de limiter la pollution des pneus

L'abrasion des pneus, qui libère des microplastiques, est responsable de deux tiers de la pollution de plastique en Suisse. Mais la recherche peut agir sur plusieurs points, selon l’EMPA, le laboratoire fédéral d’essais sur les matériaux. Les chimistes essaient de développer des gommes plus solides pour limiter l’usure.

La composition des pneus, un cocktail de produits chimiques souvent nocifs pour la santé et l’environnement, constitue un deuxième problème. Des recherches sont menées pour trouver des compositions alternatives pour limiter leur toxicité.

En France, des scientifiques se sont associés avec le géant du pneu, Michelin, pour créer un laboratoire de recherche spécialement dédié à cette question, dans l’idée de développer des gommes moins nocives, voire biodégradables. Ce projet, lancé il y a six mois, doit durer quatre ans.

Capturer les particules

Il est également possible d’agir au moment de la conception des voitures, note encore l’EMPA. Une solution pourrait être de réduire le poids des véhicules, ce qui diminuerait l’usure des pneus. Il est par ailleurs envisageable d'installer des glissières sur les routes afin de capturer tout de suite les particules de pneus avant qu’elles ne se répandent dans la nature.

Toutes ces idées ne vont toutefois pas au-delà de l’étude conceptuelle pour l’instant. Il manque par ailleurs une base législative commune, notamment sur les valeurs limites. L'Union européenne pourrait en fixer dans les cinq ans à venir.

>> Le sujet de La Matinale :

La plus grande partie de la pollution au plastique provient de l'abrasion des pneus en Suisse. [Depositphotos - stocksnapper]Depositphotos - stocksnapper
Les pneus sont les principaux responsables de la pollution plastique en Suisse / La Matinale / 1 min. / le 24 mai 2024