Hôte de la COP16, la Colombie subit de plein fouet la chute de la biodiversité
Il suffit de se rendre à quelques kilomètres de Cali pour observer l'impact des activités humaines sur la faune sauvage. A environ une heure de route de la ville hôte de la COP16 se trouve Yumbo, une agglomération de 100'000 personnes qui vit au cœur des collines. Elle est connue pour être la capitale industrielle de la région de la Valle du Cauca. Plus de 2000 usines y sont installées.
Les trous dans les collines laissées par l’agriculture et l’urbanisation sont visibles tout au long du trajet. Depuis plusieurs années, chercheuses et chercheurs de la région évaluent l'impact sur les animaux sauvages.
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Wilmar Bolivar Garcia, biologiste à l'Université de Valle à Cali, capture la présence des animaux sauvages à la frontière de la forêt à l'aide d'un enregistreur sonore. Dans La Matinale de la RTS, il dit attendre de la COP 16 des solutions concrètes pour protéger la faune sauvage.
Plusieurs espèces que j'observais ici il y a 25 ans ont disparu, je ne les vois plus
"Le projet de paysages acoustiques, d'enregistrement sonore, permet de faire le suivi de la présence de la faune sauvage. Ainsi, nous pouvons mieux comprendre l'impact de la sécheresse ou des inondations sur la faune sauvage", détaille le chercheur.
"Par exemple, on parle maintenant de forêt silencieuse lorsqu'on n'entend plus les animaux parce qu'ils ont disparu. On parle alors d'extinction locale. Ça arrive déjà dans ces forêts où nous sommes. D'ailleurs, plusieurs espèces que j'observais ici il y a 25 ans ont disparu. Je ne les vois plus."
Le défi du trafic illégal
Le trafic illégal représente une autre menace pour les animaux sauvages. La ville de Cali est un site stratégique pour ce type de trafic, car elle se trouve sur un carrefour routier et à proximité de la côte du Pacifique.
Dans le centre de réhabilitation à la vie sauvage de Cali, des singes, des félins ou des oiseaux rares sont régulièrement interceptés à l’aéroport ou dans des propriétés privées. Nicolas Melo, chef du groupe IVC de la faune sauvage du Département de gestion de l’environnement, fait le décompte de l'année écoulée.
"Nous avons effectué environ 2100 sauvetages cette année et 90 saisies d'animaux issus du trafic illégal. La plupart des saisies ont été réalisées par la police nationale et environ 64 ont été réalisées par les autorités environnementales."
La majorité des animaux qui arrivent ici ont été achetés dans le trafic illégal pour être des animaux de compagnie
Cette année, des centaines d’animaux ont pu être réintroduits dans la nature. Mais beaucoup ne pourront pas être libérés, prévient Andres Posada, coordinateur du centre d'accueil et de valorisation de la vie sauvage "El hogar de paso".
"La majorité des animaux qui arrivent ici ont été achetés dans le trafic illégal pour être des animaux de compagnie. Maintenant, ce sont des animaux qui sont fondamentalement condamnés, parce qu’ils ne peuvent plus vivre dans la nature. Ces animaux vont finir leur vie en cage, soit dans un zoo, soit dans un centre où ils feront partie d'un programme de repeuplement de l’espèce."
Programme de reproduction
Pour atténuer l’impact du trafic illégal, la fondation du parc zoologique de Cali a choisi de mettre en place un programme de reproduction inédit de la grenouille Lhemanni, une espèce endémique de Colombie. Carlos Galvis, biologiste de la fondation, reconstitue l'écosystème de ces grenouilles dans des terrariums.
"Jusqu'à présent, 150 grenouilles ont pu être réintroduites dans la Nature. Les dernières, 21 exactement, ont été relâchées il y a 15 jours. Toutes les espèces doivent être protégées. Il ne faut pas attendre le dernier moment pour agir", avertit le biologiste.
En Amérique latine et dans les Caraïbes, on estime que 95% de la faune sauvage a disparu ces 50 dernières années. Désormais, tous les regards sont tournés vers la COP16 dans l'espoir d'améliorer les choses.
Najet Benrabaa/asch