Depuis sa première apparition en Suisse en 2017, la population de frelons asiatiques n'a cessé de croître et de s'étendre. L'année dernière, plus de 100 nids ont été détruits à Genève, 40 dans le canton de Vaud et une vingtaine à chaque fois dans le Jura et à Neuchâtel.
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Ce grand prédateur a désormais pris ses quartiers dans le pays et cela ne risque pas de s'arranger avec le réchauffement climatique. La situation préoccupe particulièrement les apiculteurs et apicultrices, car les frelons asiatiques s'attaquent aux insectes pollinisateurs, dont font partie les abeilles, pour se nourrir. Mais plus largement, c'est toute la biodiversité suisse qui est menacée. A terme, l'arboriculture et la viticulture sont aussi menacées par la présence du frelon asiatique.
Il y a quelques jours, un premier spécimen a été observé en Lavaux, à côté des six ruches que l'apiculteur Vincent Sarbach a installées au milieu des vignes à Grandvaux. "Le 15 février dernier, j'en ai trouvé un", accompagné d'une femelle, témoigne le Vaudois, dans La Matinale de la RTS. "Actuellement, il n'y a pas de fleurs, ils sont donc venus s'attaquer à mes abeilles."
Les professionnels du secteur sont aujourd'hui formés pour reconnaître les frelons asiatiques et les éliminer, comme l'a fait Vincent Sarbach: "J'espère que j'ai pu toucher la bonne fondatrice et qu'il n'y aura pas trop de nids ces prochaines semaines", confie l'apiculteur, qui dit avoir mis en garde ses voisins.
Appel au signalement auprès de la population vaudoise
Un appel à la population a été lancé dans tout le canton pour combattre ces envahisseurs ce printemps. "L'invasion se passe en grande partie cette année. Notre but est de faire un maximum pour limiter les populations au cours de cette période", explique le biologiste Daniel Cherix, chargé de gérer la lutte contre les frelons asiatiques dans le canton de Vaud.
"Au début du printemps, on va apercevoir des petits nids qui vont se mettre sous des avant-toits, sous des abris de voiture, dans des cabanons de jardin... Et ce sont ces petits nids qu'il faut signaler pour que l'on puisse éviter d'avoir des populations trop importantes qui viennent se nourrir d'abeilles en fin de saison."
Daniel Cherix espère ainsi éviter un scénario catastrophe, comme en France, où la lutte contre le frelon asiatique a déjà coûté l'équivalent de plus de 12 millions de francs aux autorités locales. "Notre stratégie consiste à se mettre au travail tout de suite, ce que n'ont pas fait les Français, qui ont laissé le frelon se développer. En Suisse, dès les premiers frelons, nous avons mis en place un programme et des structures pour s'y attaquer", notamment en formant des apiculteurs, détaille le biologiste.
Une stratégie nationale manquante
Pour l'heure, cette lutte repose en grande partie sur le milieu de l'apiculture. Or, à terme, cela risque de ne pas suffire, prévient Daniel Cherix, qui plaide pour une stratégie au niveau national. "Nos parlementaires apiculteurs ont déposé quatre motions successives demandant que le Conseil fédéral prenne au sérieux la lutte contre le frelon asiatique. Ils disent depuis 2018 qu'ils vont s'en occuper", regrette le Vaudois.
"Cette lutte revient avant tout aux cantons, qui n'ont pas d'obligation fédérale, mais aussi aux apiculteurs qui sont les premiers concernés. Il y a actuellement énormément de bénévolat et de cantons qui participent financièrement, tels que Vaud, Genève et Neuchâtel. Mais cela ne peut pas se faire pendant des décennies, il faudra bien que la Confédération prenne un jour ou l'autre ses responsabilités", insiste le biologiste.
En attendant une coordination nationale, un site internet permet à la population de signaler toute présence suspecte de frelon asiatique. Selon les experts, rien ne sert de poser des pièges dans son jardin. Il vaut mieux s'en remettre aux spécialistes qui sauront se débarrasser des nids abritant des milliers de futurs envahisseurs.
Sophie Iselin/iar