La Suisse a longtemps été le pays d'émigration préféré des médecins allemands. La chambre des médecins allemande a ainsi répertorié en 2017 641 médecins allemands partis travailler en Suisse, d'après le Sonntagsblick.
La statistique de la Fédération des médecins suisses (FMH) a relevé l'an dernier que "l’Allemagne offre le plus grand réservoir" de médecins étrangers (voir encadré). Selon la FMH, près de 18% des médecins exerçant en Suisse possèdent un passeport allemand.
Pénurie dans les pays d'origine
Dans un entretien accordé au journal paru dimanche, le ministre de la Santé allemand Jens Spahn explique que les médecins et soignants recrutés dans les hôpitaux et les institutions pour personnes âgées en Suisse manquent en Allemagne.
En conséquence, les établissements allemands embauchent des praticiens polonais qui, eux aussi, manquent dans leur pays d'origine.
Bien qu'il comprenne le choix des spécialistes allemands -"la Suisse est un pays magnifique", dit-il- Jens Spahn veut lutter contre le phénomène et propose une réglementation au niveau de l'UE contre le débauchage de spécialistes dans certaines professions.
Il estime qu'une telle réglementation ne remettrait pas en cause la liberté de circulation et cite en exemple des accords qui existent déjà à l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
"La libre circulation n'est pas à la carte"
La proposition fait bondir le conseiller national PLR valaisan Philippe Nantermod.
"La position de l'UE, qui a fait de la libre circulation l'un de ses piliers fondamentaux, n'est pas à la carte. Le principe est que les gens choisissent où ils veulent s'établir pour travailler (...) et cela vaut aussi pour le personnel médical et les spécialistes allemands", a-t-il dit dimanche à la RTS.
Mauro Poggia ne voit pas la proposition du même oeil. "L'Allemagne (...) forme des médecins dont elle a besoin et qui s'enfuient ailleurs. La Suisse, elle, souhaiterait pouvoir réguler, au niveau des cantons, l'arrivée de médecins étrangers qui apportent une offre dont on n'a pas toujours besoin", a réagi dans le 12h30 le conseiller d'Etat genevois en charge du département de l'emploi et de la santé.
Pour Mauro Poggia, le "dogme" de la libre circulation "selon lequel il ne faut rien réguler (...) doit être abandonné dans certains secteurs, et la santé en est un".
Le conseiller d'Etat MCG ajoute que la Suisse ne peut pas continuer à tabler sur les médecins formés à l'étranger.
ptur
La part de médecins étrangers progresse en Suisse
Plus de 34% des médecins en exercice en Suisse, soit 12'570 praticiens, sont d’origine étrangère selon la statistique 2017 de la FMH. Ce pourcentage a augmenté de 1,2 point par rapport à l'année précédente, passant de 32,9 à 34,1%.
La part de médecins étrangers se monte à 29% dans le secteur ambulatoire, contre 39,3% dans le secteur hospitalier. La plupart des médecins étrangers viennent des pays limitrophes.