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Lien trouvé entre infections infantiles et risque de maladies psychiatriques

Les enfants hospitalisés pour une infection doublent leur risque de développer une maladie psychiatrique.
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Enfants hospitalisés, infection et maladie psychiatrique / CQFD / 10 min. / le 27 mars 2019
Les enfants hospitalisés pour une infection bactérienne doublent leur risque de développer une maladie psychiatrique et ceux qui sont soignés par antibiotiques sont également plus exposés, selon les conclusions d'une vaste étude danoise.

Les résultats de cette étude, menée à l'échelle nationale au Danemark avec un accès privilégié aux données d'une population de cinq millions d'habitants, ont été publiés dans le Journal of American Medical Association en décembre dernier.

Les chercheurs ont ainsi pu voir l'impact sur un million d'enfants et adolescents d'infections de tous types - bactériennes, virales, mycotiques et parasitaires.

Les résultats sont assez spectaculaires: un enfant hospitalisé pour une infection augmente fortement son risque de développer plus tard une maladie psychiatrique.

Antibiotiques en cause

"Le fait d'avoir une infection va augmenter chez l'enfant le risque de développer un trouble psychique dépendant d'une altération du neurodéveloppement - retard du développement intellectuel, schizophrénie, autisme, troubles anxieux", explique le pédopsychiatre Stephan Eliez, professeur à la Faculté de médecine de lʹUniversité de Genève et directeur médical de lʹOffice médico-pédagogique de Genève, dans l'émission CQFD.

Le risque le plus important se situe chez les enfants ayant développé une infection bactérienne - pneumonie, otite, infections osseuses ou autres - avec hospitalisation: la vulnérabilité est pratiquement doublée chez cette population, avec une augmentation de 80 à 100%.

Le deuxième groupe le plus à risque sont les enfants avec infection bactérienne traités en ambulatoire, par antibiotiques: l'augmentation de la vulnérabilité est chez eux alors de l'ordre de 40%.

Le mystère de ces résultats n'est en revanche pas totalement levé par l'étude, qui formule néanmoins plusieurs hypothèses. Par des comparaisons au sein des fratries, les chercheurs sont parvenus à exclure le facteur génétique: avoir un ADN qui prédispose aux infections n'augmente pas le risque de développer des troubles psychiques.

Inflammations et microbiote

Il s'agirait plutôt de l'effet conjugué de deux facteurs. Premièrement, le caractère inflammatoire de l'infection dans l'ensemble de l'organisme, y compris dans le cerveau, perturberait le neurodéveloppement. Deuxièmement, l'effet des antibiotiques sur la flore intestinale semble également gêner la bonne régulation du développement cérébral.

"Le fait de prendre un antibiotique perturbe et modifie la flore intestinale et change la proportion et le type de bactéries de notre microbiote. En revanche, les médicaments combattant des infections de type virus ou mycoses ne perturbent pas la flore intestinale, et n'ont donc pas le même impact sur le risque de maladies psychiques subséquentes", explique Stephan Eliez.

Ces résultats montrent enfin une corrélation directe entre nombre de prises d'antibiotiques et le risque de troubles psychiques ultérieurs, souligne-t-il. "Cela doit nous rappeler qu'il faut prendre les antibiotiques avec parcimonie."

Appel à la parcimonie

Pour soulager d'éventuels parents inquiets, Stephan Eliez précise néanmoins que le risque n'est pas associé aux maladies virales, très fréquentes dans les collectivités d'enfants, mais bien aux affections bactériennes plus rares comme les otites ou les pneumonies. "Il ne faut pas traiter inutilement avec des antibiotiques des maladies virales", conclut-il.

"Non seulement cela n'a aucun effet sur l'infection, mais on voit que cela peut potentiellement augmenter la vulnérabilité pour des troubles psychiques ultérieurs via les perturbations de la flore microbienne."

Adrien Zerbini/kkub

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