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Comment sortir du confinement? Les scénarios envisagés actuellement

La fin d'un confinement doit se préparer.
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Comment sortir du confinement / CQFD / 8 min. / le 27 mars 2020
Quand la courbe de la contagion du Covid-19 se sera infléchie en Suisse, comment le pays pourra-t-il sortir du confinement? Deux scénarios sont envisagés - avec tests et traçages ou par étapes - mais leur mise en place est soumise à de nombreuses conditions.

Les Suisses sont en semi-confinement depuis bientôt deux semaines. Certains commencent à trouver le temps long et se demandent quand et comment ils pourront sortir de cette situation.

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La question est loin d’être triviale: on veut à tout prix éviter qu’une nouvelle vague de contaminations apparaisse au moment où l'on cesse le confinement. Cette mesure devait ralentir la propagation du virus, mais elle ne permet pas une immunité de groupe. A la fin du confinement, une partie de la population aura donc eu la maladie et sera immunisée, mais la plus grande partie ne le sera pas.

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Vitesse de la propagation du coronavirus.
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RTS [Tableau Public]Tableau Public
Pic d'épidémie et immunité globale / CQFD / 14 min. / le 24 mars 2020

"Le seul moyen d'en finir avec le virus, c'est d'avoir assez d'immunité dans la population", explique Julien Riou, épidémiologiste post-doctorant à l’Institut de médecine sociale et préventive de l’Université de Berne, au micro de l'émission CQFD vendredi. "Cette immunité de groupe peut être atteinte soit par l'infection, soit par un vaccin", précise le chercheur.

Donc, même si le virus ne circule plus grâce au confinement, si on ne fait rien, il suffira d’un cas pour que l’épidémie reparte. Il faut donc absolument accompagner cette sortie.

SCENARIO 1: Une sortie avec tests et traçage des contacts

"Il est très difficile de maintenir un confinement, même partiel, pendant très longtemps, à cause des conséquences sur la psychologie, la santé, l'économie", relève Julien Riou. "Le meilleur scénario est donc celui d'un confinement qui éteint l'épidémie en diminuant drastiquement le nombre de cas, tout en relâchant progressivement le confinement avec des mesures pour contrôler la réémergence."

Cela passe notamment par le traçage de contacts: tester chaque cas symptomatique, retrouver toutes les personnes qui ont été en contact avec cette personne dans les derniers jours, et isoler ces personnes afin de casser la chaîne de transmission. "Cela demande énormément de moyens humains et financiers", souligne l'épidémiologiste. "C'est pourquoi il est important de d'abord juguler l'épidémie, pour avoir ensuite suffisamment peu de cas pour pouvoir les suivre individuellement."

Traçage des portables envisagé

Le traçage par le GPS des téléphones portables, tel que mis en place dans un partenariat entre la Confédération et Swisscom, ne permettrait-il pas de résoudre cette question du manque de personnel? "Ce serait une aide, mais le traçage de contacts est une tâche humaine, très personnelle, il doit donc être fait d'abord de personne à personne. Mais des algorithmes peuvent aider, et c'est l'une des pistes à creuser", admet Julien Riou.

Une fois que le niveau d'incidence qu'on est capable de gérer est atteint, on pourra se demander si on est capable de gérer ce niveau d'épidémie, et relâcher progressivement le confinement. (Au 27 mars et après 10 jours de semi-confinement, le pic de l'épidémie n'est pas encore atteint, et les effets des mesures prises par la Confédération ne sont pour l'instant pas tangibles, ndlr.)

La Chine, berceau du virus, qui n'enregistre plus de nouveaux cas indigènes depuis plusieurs jours et est en train de relâcher le confinement, "suit à peu près cette stratégie", note Julien Riou.

SCENARIO 2: Le déconfinement par étape

Le groupe InsideCorona.ch, composé d’une centaine de médecins et entrepreneurs, a de son côté évoqué la possibilité d’un relâchement progressif. Dans une première vague en avril, on déconfinerait les moins de 40 ans, qui ne font quasiment pas de complication, afin de créer une immunité de groupe. Trois semaines plus tard, ce serait au tour de 40-65 ans. Puis, trois semaines plus tard, on ferait des tests sérologiques pour vérifier que la population est bien immunisée et que le virus ne peut plus circuler, avant de déconfiner tout le monde.

Ce plan de marche suscite toutefois le plus grand scepticisme de Julien Riou. "Je ne pense pas qu'on puisse dire qu'on va avoir une immunité contrôlée dans la population. Ce virus a quand même une mortalité de 1 à 3%: si on le laisse se transmettre, on aura beaucoup de morts", avertit le chercheur, citant le rétropédalage de pays comme le Royaume-Uni ou les Pays-Bas, qui ont fini par abandonner cette stratégie. Séparer les classes d'âge apparaît également très compliqué, pour Julien Riou, qui juge ce scénario... "infaisable".

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Sujet CQFD: Bastien Confino

Adaptation web: Katharina Kubicek

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