Les nouveaux variants du Covid-19 inquiètent les experts. La tendance est à la hausse pour les contagions au virus muté, a indiqué jeudi devant la presse Patrick Mathys, responsable de la section Gestion de crise et collaboration internationale à l'OFSP.
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Selon lui, on relevait jeudi 114 nouveaux cas liés au variant britannique et 6 à celui d'Afrique du Sud. Trente-quatre cas ne peuvent être rattachés à l'une ou l'autre mutation.
"Ce variant est différent des précédents qui avaient été identifiés – ce n'est pas la première fois qu'un variant est découvert en Suisse et dans d'autres pays – mais celui-ci a la caractéristique d'être beaucoup plus transmissible", note Valérie d'Acremont, infectiologue à Unisanté et professeure à l'Université de Lausanne. Et d'ajouter sur le plateau du 19h30: "C'est quand même moins grave que d'être plus pathogène, c'est-à-dire de faire une maladie plus grave".
2% à 5% des échantillons
Plusieurs types de virus mutés ont été identifiés de par le monde, a rappelé Patrick Mathys. Certains se sont montrés très contagieux. Il est donc d'autant plus important de suivre de près ces variations par le séquençage et de voir quelle est la réponse du vaccin à ces mutations.
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Les cas liés aux virus mutés représentent désormais entre 2% et 5% des échantillons séquencés en Suisse, a précisé Martin Ackermann, président de la task force Covid-19. Ces chiffres se basent notamment sur des séquençages aléatoires menés dans différentes régions du pays.
La comparaison des courbes entre la Grande-Bretagne, le Danemark et la Suisse montre de fortes similitudes, avec un décalage dans le temps. Il faut s'attendre à une croissance exponentielle, avec un doublement des cas chaque semaine.
La propagation semble plus rapide: "C'est l'accélération: on pourrait tout à fait avoir une troisième vague qui serait très importante et qui serait difficile à contrôler", avance la professeure Valérie d'Acremont.
Une version amazonienne
Un autre variant du Covid-19 a été détecté récemment au Japon: il est originaire d'Amazonie et pourrait être aussi contagieux que ceux du Royaume-Uni ou d'Afrique du Sud, selon Felipe Naveca, un chercheur qui étudie les mutations observées dans le nord du Brésil.
Pour ce spécialiste de l'Institut Leonidas et Maria Deane, qui mène ses études en partenariat avec le prestigieux institut de recherches Fiocruz, il est probable que ce nouveau variant – que l'OMS a qualifié de "très préoccupant" – puisse également être combattu avec les vaccins actuels: "C'est la question que tout le monde se pose actuellement. J'ai participé récemment à une réunion de l'OMS et c'était l'un des thèmes abordés. Jusqu'à présent, il n'y a rien qui montre que ce variant puisse empêcher une réponse immunitaire après la vaccination".
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Mais est-ce possible que le variant d'Amazonie soit aussi contagieux que ceux du Royaume-Uni et d'Afrique du Sud? "Ce n'est pas encore sûr, mais c'est fort possible", répond Felipe Naveca. "On a observé de nombreuses mutations au niveau de la protéine Spike [ndlr. une pointe qui lui permet de pénétrer dans les cellules], qui ont déjà été associées à ce plus grand potentiel de transmission du virus".
Près de 66'000 vaccinations
Le développement de ces nouveaux variants rend d'autant plus nécessaire de s'engager dans la campagne de vaccination, a de son côté relevé Nora Kronig, responsable de la division internationale de l'OFSP. Le but étant toujours de protéger la population ainsi que les systèmes de santé et de diminuer les conséquences économiques et sociales.
Environ 66'000 vaccinations ont été effectuées dans les cantons jusqu'à présent, selon des estimations "embryonnaires". Un premier monitoring hebdomadaire est attendu pour mardi, a-t-elle ajouté.
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Et de rappeler que 200'000 doses du vaccin de Moderna sont arrivées en Suisse mercredi. L'idée est d'étendre la vaccination aux médecins traitants et au personnel dans les pharmacies. "Nous y travaillons activement", a-t-elle déclaré, alors que la faîtière des pharmacies suisses a affirmé jeudi être prête à participer à l'effort de vaccination et attendre le feu vert des cantons.
Selon Nora Kronig, des clarifications doivent toutefois être faites, non seulement quant au financement mais aussi par rapport à des aspects logistiques, comme le maintien à très basse température du vaccin Pfizer/BioNTech.
Stéphanie Jaquet et les agences
Situation en Suisse au 14 janvier 2021
La Suisse a enregistré 2474 cas supplémentaires de coronavirus en 24 heures, selon les chiffres publiés jeudi par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP).
Cinquante-trois décès supplémentaires sont à déplorer et 106 personnes malades ont été hospitalisées.
Le taux de reproduction, qui a un délai d'une dizaine de jours, est lui de 1,01.
Réduire les contacts au maximum
Il faut réduire les contacts et la mobilité au maximum, a insisté Martin Ackermann. Revenant sur les restrictions annoncées mercredi par le Conseil fédéral, Mike Schüpbach, juriste à l'OFSP, a souligné que le télétravail est désormais une obligation, et non plus une recommandation. Il pourrait concerner la moitié des travailleurs en Suisse, selon une estimation basée sur les observations faites au printemps dernier.
Le maximum de cinq personnes pour les réunions dans le cadre privé est également devenu une obligation. "On pourrait sanctionner mais on ne va pas envoyer la police faire des contrôles dans les ménages", a toutefois précisé Mike Schüpbach.
Le juriste a par ailleurs rappelé que la liste des magasins et produits de consommation autorisés à rester ouverts a été établie d'entente avec les fédérations, les partenaires sociaux, les faîtières et les cantons. "C'est un compromis, même si cela peut sembler contradictoire pour certaines personnes", a-t-il reconnu.
"Toutes les mesures ne reposent pas sur des données épidémiologiques, a renchéri Patrick Mathys. Selon lui, "il n'y a pas de données en ce moment pour faire la distinction entre les fleuristes et d'autres magasins."