Un patient atteint d'un diabète de type 1 doit non seulement surveiller son alimentation, mais s'injecter quotidiennement de l'insuline, hormone qui permet de faire passer le sucre dans les cellules des tissus. Sans cette insuline le patient risque de nombreuses complications: cécité sévère, amputation des extrémités, coma, voire la mort.
Mais il n’est pas simple de conserver un flacon d'insuline à une température entre 2 et 8 degrés lorsqu'on se trouve par exemple dans un camp de réfugiés au nord du Kenya. Fort de ce constat, Médecins Sans Frontières s'est demandé s'il était possible de changer ce protocole pharmaceutique et s'est pour cela adressé à Leonardo Scapozza, professeur ordinaire à la section des sciences pharmaceutiques à l’Université de Genève.
Conditions d'un camp de réfugiés
Pour la recherche - dont les résultats sont publiés dans la revue Plos One - le chercheur et son équipe ont scrupuleusement reproduit en laboratoire les températures d'une "maison" d'un camp de réfugiés au nord du Kenya (entre 25-37°C), pendant 4 semaines. Les échantillons ont ensuite été comparés avec des flacons conservés au froid - le risque étant que la molécule d’insuline, une protéine, ne se transforme sous l’effet de la chaleur et perde dès lors sa fonction.
Pour cela, les scientifiques ont utilisé la méthode de la chromatographie en phase liquide à haute performance, une technique de séparation utilisée pour identifier et quantifier les composants individuels d'un mélange. L'observation qui en résulte est celle d'une légère perte (1%) dans l’efficacité de la molécule d'insuline. "Cela n'est pas grave, c'est dans les normes", explique Leonardo Scapozza dans l'émission CQFD vendredi. "La réglementation sur les préparations pharmaceutiques nous indique qu'on peut avoir jusqu'à 5% de perte, et continuer à avoir l'activité voulue pour le traitement de la maladie", précise-t-il.
Si l'innocuité d'une température jusqu’à 37 degrés a pu être démontrée, les chercheurs de l'Université de Genève poursuivent actuellement leurs travaux pour déterminer les effets de la chaleur sur l’insuline au-delà de cette température.
Sara Dirren/kkub