Publié

La pandémie a donné un nouvel élan à la télémédecine

L'essor de la télémédecine, un autre effet de la crise sanitaire sur notre quotidien (vidéo)
L'essor de la télémédecine, un autre effet de la crise sanitaire sur notre quotidien (vidéo) / L'éclairage d'actualité / 3 min. / le 7 juin 2021
La pandémie a donné un élan formidable à la télémédecine. Désormais, pour s'imposer définitivement dans le secteur de la santé, ces nouveaux outils doivent convaincre et rassurer. Confiance, protection des données et précision des mesures sont autant de défis à relever rapidement.

L'année dernière, avec la pandémie, nous n'avons jamais eu autant recours à la télémédecine. Les consultations à distance ont, par exemple, augmenté de 70%, selon la Fédération des médecins suisses. Cette situation de crise a rendu certains nouveaux outils indispensables, à l'image des consultations en vidéoconférence ou des applications et capteurs connectés qui mesurent notre santé.

Le corps médical a découvert une télémédecine de crise. "En deux semaines, nous avons dû équiper 400 bureaux de médecins avec des outils permettant de faire de la télémédecine", affirme Antoine Geissbuhler, médecin-chef du service de cybersanté et télémédecine des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), lundi dans La Matinale.

Les Hôpitaux Universitaires de Genève développent des outils pour les consultations à distance depuis une vingtaine d'années. Mais l'ampleur est sans pareil. "Nous sommes passés de quelques dizaines de consultations par semaine à plusieurs milliers par mois durant la première phase de confinement."

Un nouveau confort

Aujourd'hui, les patients peuvent à nouveau se rendre chez le docteur. Logiquement, le recours à la télémédecine est en recul cette année. "Les besoins ont diminué, mais ils ont diminué à un niveau qui est dix fois supérieur à ce qui se pratiquait avant la crise", estime le médecin.

La télémédecine va-t-elle entrer définitivement dans notre quotidien ou va-t-elle rester un outil que l'on dégaine en période de crise? Les patients et les médecins ont pris de nouvelles habitudes. Les projets fleurissent aux HUG et les nouveaux outils sont toujours plus ergonomiques.

Il y a d'abord un certain confort pour le patient, qui n'a pas besoin de se déplacer pour effectuer certains tests. On est aussi loin du stress de l'hôpital, qui fausse parfois les données. Le médecin, lui, recueille des informations précieuses. Il peut également être alerté automatiquement si des mesures paraissent inhabituelles.

On trouve de tout

Patrick Schoettker, professeur au service d'anesthésie du CHUV, participe au développement de l'application Biospectal qui permet de mesurer la pression artérielle à l'aide de l'appareil photo d'un smartphone.

Il s'agit à ses yeux de faire évoluer des techniques presque ancestrales: "La manchette à pression (dispositif qui se gonfle autour du bras) qu'on utilise en salle d'opération ou chez le généraliste, est une technique qui a plus de 100 ans. Pourquoi ne pas utiliser les nouveaux capteurs pour mesurer des paramètres vitaux?".

Depuis cinq ans, les projets et les applications de télémédecine se multiplient. Il y a celles qui analysent votre toux et d''autres qui surveillent vos grains de beauté. Mais il y a aussi des jeux ou des applications de fitness. Il est donc parfois difficile d'y voir clair.

>> Regarder l'émission A Bon Entendeur consacrée à la télémédecine :

La télémédecine : quels avantages pour les patients ?
La télémédecine : quels avantages pour les patients ? / A bon entendeur / 34 min. / le 18 mai 2021

Peu de contrôle

Patrick Schoettker estime qu'il est temps d'encadrer ce marché en plein développement. Le professeur participe à un groupe de travail lié à la Commission européenne qui a pour objectif d'organiser la réglementation autour de l'accès aux données, mais également sur leur précision.

"Est-ce important d'être à 5 ou 6 mm de précision? Est-il plus important d'améliorer l'accès à la donnée en perdant un peu de précision? Il faut apporter des réponses. Il faut rassurer le patient et le corps médical. Il s'agit d'être transparent sur la source qui mesure les données, ainsi que sur la précision qui permet au soignant d'identifier le besoin de modifier un traitement. Finalement, tout le monde sera gagnant."

Les données du patient sont un point central, car les informations sur la santé sont jugées sensibles. Les assurances, les employeur ou les banques peuvent notamment s'y intéresser.

Un secteur en pleine croissance

Le contrôle de toutes ces applications n'est pas encore assuré, selon l'avocat Sylvain Métille: "Actuellement, c'est un peu la jungle. Il y a peu d'autorités de contrôle, de certification, de labellisation, si ce n'est les autorités de protection des données."

L'avocat pointe également le manque d'expérience technique ou en matière de protection des données dans le développement de certaines solutions informatiques. Autre problème, les médecins généralistes ont parfois des infrastructures informatiques un peu légères.

Le secteur doit évoluer et vite. Aujourd'hui, le marché de la santé est lucratif et aiguise les appétits. La Suisse dépense plus de 9000 francs par habitant pour la santé chaque année. A l'avenir, ces chiffres vont encore grimper, avec des technologies qui coûtent cher, un vieillissement de la population et toujours plus de maladies chroniques.

Les géants technologiques, comme Google, Microsoft ou Amazon, l'ont bien compris. Ils investissent massivement dans la santé, pour développer des capteurs ou des intelligences artificielles. Et pour éviter les dérives, il s'agit d'être attentif.

Pascal Wassmer

Publié