L'autisme est une maladie qui est notamment caractérisée par des difficultés de communication et de comportement social. De nos jours, on ne parle plus d'autisme mais de troubles du spectre autistique, vu la grande variabilité des symptômes et de la gravité de cette affection.
Une recherche menée par une équipe de l'Université de Genève montre que des interactions entre les gènes et l'environnement sont à l'origine de l'autisme.
Inflammation induite
Chercheurs et chercheuses se sont intéressés aux mécanismes cellulaires et moléculaires à l'origine des déficits d'interaction sociale. Alors que chez les êtres humains une mutation sur un gène spécifique est une des causes les plus fréquentes d'autisme dit monogénique – lorsqu'un seul gène est en cause – cette seule mutation n'affecte quasiment pas les souris.
En induisant une réponse inflammatoire aiguë chez les souris, les scientifiques ont constaté l'apparition de comportement d'évitement social et identifié le gène responsable. D'où la conclusion que les troubles autistiques sont provoqués par des interactions entre gènes et environnement.
Cette recherche a été menée avec des souris dites hétérozygotes: "Les humains comme les animaux ont deux copies de chaque gènes: une de leur père et une de leur mère", explique Camilla Bellone, professeur associée au département des neurosciences fondamentale de l'UNIGE. "Quand une mutation survient sur un seul des gènes, on parle d'hétérozygose".
Un gène particulièrement scruté
Les souris de l'étude sont porteuses d'une délétion – la perte d'un fragment d'ADN – d'une seule des deux copies du gène SHANK3 qui codifie une protéine synaptique: "La synapse sert de jonction fonctionnelle entre deux neurones, qui sont les cellules principales au niveau du cerveau", précise-t-elle au micro de CQFD.
Un problème avec le gène SHANK3 est une des causes les plus fréquentes de l'autisme: "Oui, c'est un candidat majeur de l'autisme. Une mutation se produit sur 1 à 2% des personnes atteintes de troubles du spectre autistique".
Dans le cas de l'étude, les souris ne présentaient pas de troubles du comportement, car elles n'avaient qu'un seul gène modifié, pour reproduire ce qui se passe en général chez l'être humain. Puis, une inflammation massive a été provoquée chez les souris et l'équipe a constaté une altération de l'activité neuronale: "Les cellules du cerveau ne communiquaient plus de manière correcte. C'est aussi lié à la surexpression du gène Trpv4", note-t-elle.
A ce moment, des troubles du comportement étaient constatés. Lorsque ce gène était inhibé, les souris retrouvaient leur comportement habituel. D'où le constat que les troubles autistiques sont le résultat d'une interaction. Une susceptibilité génétique ne suffit pas: "L'hétérogénéité des troubles autistiques peut être expliquée par l'interaction entre les gènes et l'environnement", précise Camilla Bellone. "Et, surtout, cela peut avoir une influence sur les symptômes et leur progression", et aussi sur la diversité et la sévérité de ceux-ci, suivant le type de mutation génétique.
Vers un traitement?
La chercheuse souligne encore que chez les êtres humains et les animaux, il y a des périodes critiques après la naissance. "Nous pensons que si une interaction gène-environnement survient pendant cette période critique, il est possible que se développe une symptomatologie beaucoup plus chronique qui aura un effet aigu à l'âge adulte ou à l'adolescence". Cette intuition devra encore être confirmée par une autre étude.
Il existe plusieurs types d'autisme et il n'existe donc pas une seule solution de traitement pour toutes les personnes malades: "On doit aller vers une meilleure stratification des patients avant de se lancer dans un travail clinique. Peut-être que dans certaines populations, le gène Trpv4 – responsable de cette hyperexitabilité causée par l'inflammation – pourra être une bonne cible thérapeutique", espère-t-elle.
Sujet radio: Stéphane Délétroz
Version web: Stéphanie Jaquet