Cette sorte de mycose se développe sur la peau. La plupart du temps, sans même que sa victime s'en rende compte.
Parfois, cette levure parvient à se frayer un chemin jusqu'au sang chez les personnes fragiles ou immunosupprimées, par exemple si le patient porte un cathéter ou vient d'être opéré.
C'est là que Candida auris devient redoutable: une fois le système sanguin contaminé, le taux de mortalité atteint 30 à 50%, selon l'estimation de l'OMS.
Forte propagation aux Etats-Unis
Le champignon a été observé pour la première fois en 2009, d'abord en Asie, en Afrique du Sud, puis en Amérique du Sud. Ce n'est que récemment que des clusters se sont formés en Europe et aux Etats-Unis. En ces deux endroits, la propagation est jugée alarmante par les autorités sanitaires.
Aux Etats-Unis, les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) ont tiré la sonnette d'alarme la semaine passée. Le champignon hautement résistant aux médicaments se répand à "un rythme alarmant" dans les établissements de santé américains.
Une origine encore peu connue
Plusieurs hypothèses sont avancées quant à l'origine de cet organisme. L'une des plus probables est qu'il existe depuis des millions d'années, mais vivait à l'écart des humains jusqu'à récemment.
Comme c'est une levure très résistante au sel, on pense que Candida auris a probablement évolué longtemps dans des marais salants ou des mangroves. Avec le réchauffement climatique, ces marais se sont asséchés, ce qui aurait permis une transmission à notre espèce.
Facteur aggravant, l'utilisation massive de pesticides et d'antifongiques. Cette pratique a poussé ce champignon à s'adapter (par pression de sélection), pour finalement résister aux molécules qu'on utilise habituellement.
Recherche d'une parade
Il n'existe pas de traitement aujourd'hui contre ce type d'infection, ce qui représente un vrai cauchemar pour les milieux hospitaliers. En cas de contamination, il faut évacuer l'entier de l'hôpital et vaporiser de l'eau oxygénée sur toutes les surfaces et les instruments médicaux.
En Suisse, on n'en est encore jamais arrivé là. Mais on se prépare au pire, en cherchant surtout à développer une riposte. L'un des laboratoires à la pointe dans cette guerre contre le germe se trouve au CHUV.
L'équipe de l'infectiologue Frédéric Lamoth travaille sur des colonies de levures venues du monde entier, pour tenter de comprendre comment les différentes mutations ont pu rendre ce champignon hyper résistant.
D'autres recherches scientifiques se concentrent sur les interactions entre le champignon et notre système immunitaire. L'idée est d'identifier de nouveaux médicaments qui, on l'espère, passeront outre l'incroyable capacité d'adaptation de Candida auris, qui a fait de lui un germe extrêmement coriace.
Sophie Iselin/ami