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Aux HUG, des virus mangeurs de bactéries sauvent un patient considéré comme perdu

Des virus mangeurs de bactéries sauvent un patient considéré comme perdu
Des virus mangeurs de bactéries sauvent un patient considéré comme perdu / Forum / 2 min. / le 27 juin 2023
A Genève, un patient de 41 ans souffrant d'une atteinte pulmonaire chronique qui résistait aux antibiotiques a pu être sauvé grâce à des bactériophages, des virus naturels ciblant les bactéries, ont annoncé mardi les Hôpitaux universitaires de Genève et l'Université de Genève.

Le patient était considéré comme perdu. Il était totalement dépendant d'une antibiothérapie intraveineuse en continu et sans perspective d'amélioration, relèvent les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et l'Université de Genève (UNIGE) dans un communiqué. Il a finalement reçu un traitement expérimental de dernier recours passant par des bactériophages.

Ces mangeurs de bactéries sont des virus naturels capables de cibler des microbes spécifiques sans infecter les cellules humaines. Utilisés en combinaison avec des antibiotiques, ils contournent la résistance aux antibiotiques. Mais les traitements en sont encore à leurs balbutiements.

Pour soigner le patient, les médecins ont dû sélectionner le bactériophage approprié pour la souche bactérienne qui l'affectait. Ce travail n'a pas été une sinécure. Après une recherche intensive en Suisse, puis en Europe, la perle rare a été trouvée à l'Université de Yale, aux Etats-Unis.

>> Revoir le reportage du 19h30 :

Les bactériophages pourraient offrir une solution à la résistance aux antibiotiques
Les bactériophages pourraient offrir une solution à la résistance aux antibiotiques / 19h30 / 2 min. / le 27 juin 2023

Une amélioration "spectaculaire"

Les bactériophages ont été administrés par aérosols au patient. En parallèle, celui-ci continuait de recevoir des antibiotiques par intraveineuse. Selon l'UNIGE et les HUG, "l'amélioration du patient a été spectaculaire et ceci sans effets secondaires". Le quadragénaire a pu quitter l'hôpital et reprendre son travail.

Ces résultats ont fait l'objet d'une publication dans la revue Nature Communications.

"Une expérience extrêmement heureuse"

Cette phagothérapie a été administrée par Christian van Delden, médecin adjoint au Service des maladies infectieuses des HUG. Interviewé mardi dans l'émission Forum de la RTS, il décrit une "expérience unique, avec un patient extrêmement volontaire mais qui était arrivé au bout de ce qu'on peut humainement supporter".

Et de confier: "J'ai été assez stressé au lit du malade lorsqu'on lui a administré les phages par aérosols, avec à côté de moi une infirmière anesthésiste pour m'aider dans le cas où ça tournait mal. Mais tout au contraire, l'état du patient s'est amélioré extrêmement rapidement. Au bout de quatre jours, il était libéré de ses sécrétions. C'est donc devenu une expérience extrêmement heureuse, avec un patient extrêmement reconnaissant qui est devenu un ambassadeur de la phagothérapie. Et finalement, c'est moi qui lui suis reconnaissant aujourd'hui", a raconté Christian van Delden.

Le médecin remet toutefois les choses en perspective: "Ce n'est pas un remplacement des antibiotiques, mais un complément. Et les bactéries peuvent également devenir résistantes aux phages", avertit-il.

>> L'interview complète de Christian van Delden dans Forum :

Les virus sont-ils la nouvelle arme contre la résistance aux antibiotiques? Interview de Christian van Delden
Les virus sont-ils la nouvelle arme contre la résistance aux antibiotiques? Interview de Christian van Delden / Forum / 5 min. / le 27 juin 2023

Une problématique mondiale

Les HUG et l'UNIGE rappellent que l'antibiorésistance est une urgence sanitaire mondiale. Elle a été la cause de 1,7 million de décès dans le monde en 2019, d'après l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Les bactériophages font partie des stratégies prometteuses pour combattre ce fléau.

>> Lire aussi : La résistance aux antibiotiques tue davantage que le sida ou le paludisme

L'antibiorésistance découle des propriétés des bactéries. Dans la nature, celles-ci sont confrontées à des ennemis, d'autres bactéries, des champignons ou des bactériophages. Elles doivent s'adapter, en mutant, pour leur tenir tête. Au bout du processus, les mieux équipées sont capables d'échapper aux antibiotiques.

ats/iar

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