L'OMS fustige la Suisse pour son action insuffisante dans la lutte contre le tabac

La Suisse, mouton noir de la lutte contre le tabac? C'est en tout cas ce que pense l'Organisation Mondiale de la Santé, qui a vivement épinglé mardi la Confédération à l'occasion du lancement d'une publication sur la prévention du tabagisme. Pour la docteure Kerstin Schotte, de l'unité antitabac de l'organisation, la Suisse n'en fait clairement pas assez.

L'OMS avait déjà fait remarquer en juillet que seuls quatre pays ont adopté l'ensemble des mesures antitabac préconisées par l'organisation, et la Suisse n'en fait pas partie. L'OMS avait malgré tout salué les efforts mondiaux réalisés au cours de ces 15 dernières années.

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Interrogée dans La Matinale de mercredi, la docteure Kerstin Schotte, médecin à l'Unité No Tobacco de l'unité antitabac de l'OMS, estime que la Suisse n'en fait clairement pas assez. "La Suisse est, je pense, un pays traditionnellement très libéral et peut-être plus ouvert au soutien des entreprises et des sociétés internationales. Elle est donc l'un des rares pays à ne pas avoir ratifié la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac qui compte 182 signataires sur 194 États membres."

"Nous constatons également que la Suisse est à la traîne en matière de protection de sa population contre le tabagisme, y compris les enfants. La publicité pour le tabac est encore autorisée sous de nombreuses formes", poursuit Kerstin Schotte.

"Progrès à faire"

Elle a présenté mardi à l'ONU une publication pour lutter contre le tabagisme dans les écoles du monde entier, à propos de laquelle elle précise: "Il y a eu un référendum et la majorité des gens ont demandé au gouvernement de réglementer davantage la publicité pour le tabac. Un projet de loi a été présenté. Nous pensons que ce projet n'est pas assez fort. Il comporte encore de nombreuses lacunes".

Concernant la Suisse, Kerstin Schotte voit la présence de nombreux sièges de géants du tabac dans le pays comme une des raisons du manque de décisions. "Nous pensons que le gouvernement suisse a encore des progrès à faire pour protéger la population contre le tabagisme. La raison en est évidente: depuis la terrasse de l'OMS, par exemple, vous voyez le bâtiment de Japan Tobacco International ici à Genève. Et si vous allez à Lausanne, vous avez le siège européen de Philip Morris. Donc, oui, il y a un conflit d'intérêts."

Projet de limitation de la publicité sur le tabac

La publicité pour le tabac est toutefois en discussion aussi en Suisse. La révision de la loi qui concrétise l'initiative populaire "enfants et jeunes sans publicité pour le tabac", acceptée en 2022 par le peuple, est actuellement débattue aux Chambres fédérales. Selon le projet du gouvernement, dès 2026, aucune publicité pour le tabac ou les cigarettes électroniques ne pourra ainsi plus être placée dans la presse écrite. Une exception est toutefois prévue pour les publications destinées au marché étranger ou exclusivement aux professionnels de la branche.

La Suisse est le seul pays européen qui n'a pas encore interdit la publicité pour le tabac dans les journaux, avait rappelé le conseiller fédéral en charge de la santé Alain Berset lors des débats au Conseil des Etats le 21 septembre.

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Pour l'instant, la publicité pour les produits du tabac est seulement interdite à la télévision et à la radio au niveau national. Les cantons sont donc nombreux à avoir élaboré des règles plus étendues.