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Tables interactives, réalité virtuelle, thérapie du voyage: la technologie au chevet des malades d'Alzheimer

Alzheimer, prendre un train vers le passé
Alzheimer, prendre un train vers le passé / Mise au point / 13 min. / le 15 octobre 2023
En Suisse, environ 150'000 personnes vivent avec la maladie d'Alzheimer. Malgré ses progrès, la médecine reste pour l'heure impuissante. La technologie aussi, mais elle permet tout de même d'aider un peu les personnes touchées.

Le plus souvent déclenchée lors d'un âge avancé, cette maladie neurodégénérative détruit les cellules cérébrales. Les neurones faiblissent ou disparaissent et la mémoire se mue alors en un feu clignotant, avec ses lueurs et ses zones d'ombre.

Si la recherche s'active, il n'existe toujours pas de réponse médicale idéale lorsque la mémoire flanche ainsi. Mais différents projets existent pour prendre en charge les patientes et les patients, réactiver des souvenirs, retrouver certains plaisirs et offrir du réconfort aux malades et à leurs familles.

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La thérapie du voyage

À Givisiez, près de Fribourg, Le Manoir, un bâtiment du 16e siècle transformé en EMS, est désormais équipé de matériel moderne pour fournir à une centaine de pensionnaires les soins les plus adaptés, comme la "thérapie du voyage", qui se déroule dans une cabine identique à celle d'un wagon CFF. En guise de fenêtre, un écran de télévision qui simule un trajet familier.

"Ce voyage m'a fait plaisir. Il m'a émue. Voilà, pour dire la vérité. Parce qu'on s'intéresse à moi. Et ça m'a rappelé ma meilleure amie. Et puis, j'espère que je m'en suis bien sortie", témoigne une résidente atteinte d'Alzheimer devant les caméras de Mise au Point.

Cette thérapie du voyage permet de faire baisser la prise de médicaments et de calmer les ardeurs de ceux ou celles qui ont tendance à vouloir s'enfuir, avec tous les risques que cela implique. Certains malades ont en effet tendance à fuir "et surtout à marcher, d'après les études, entre 12 et 15 kilomètres par jour", explique le directeur de l'établissement.

Analyse des réponses cognitives

"Ce n'est pas la marche elle-même qui est malsaine, mais c'est le risque de chute. Cette thérapie du voyage les calme, en quelque sorte, et éveille des souvenirs. Avoir un paysage, avoir quelqu'un en face, les apaise aussi", poursuit-il.

Dans le cadre de cette expérience, Le Manoir travaille avec la Haute école d'ingénierie de Fribourg (HEIA), qui évalue l'efficacité de ces dispositifs à l'aide de capteurs permettant de suivre l'état émotionnel et physiologique des patients. Ils utilisent également des masques de réalité virtuelle pour analyser le ressenti des personnes les plus âgées, qui n'arrivent plus à verbaliser.

"Cela pourrait permettre aux soignants de comprendre si les personnes atteintes de démence arrivent à avoir des stimuli visuels dans la thérapie, ou alors d'observer un apaisement grâce à des vidéos qui sont relaxantes", explique le professeur de la HEIA Leonardo Angelini.

L'institution met également au point plusieurs nouveautés, comme un téléphone connecté à une fenêtre qui vous donne l'impression de parler à un voisin. D'autres dispositifs de réalité virtuelle peuvent aussi être utilisés pour se détendre lors de périodes d'angoisses liées à la fin de vie.

Des sursauts de vie à travers le jeu

D'autres EMS jouent aussi la carte de la technologie pour favoriser les interactions, afin que les résidents ne restent pas prostrés seuls toute la journée. Ces jeux numériques simples permettent aussi de partager des moments de joie, de légèreté et parfois même de poésie, également avec les proches en visite.

S'ils ne permettent pas de guérir, ces outils technologiques offrent encore de beaux moments de vie - parfois de répit - à des personnes extrêmement fragiles et souvent oubliées.

Reportage TV: Raphaël Guillet
Texte web: Pierrik Jordan

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