Au cours des années étudiées, 48 nouveaux anticancéreux ont reçu l'autorisation de mise sur le marché de l'agence européenne du médicament, relève l'étude publiée dans la revue britannique.
Sur ces 68 nouveaux traitements, 39 (57%) ont reçu le feu vert sans avoir démontré une amélioration de la durée ou de la qualité de vie des patients, soit par rapport à des placebos (pour 20 d'entre eux), soit par rapport aux traitements existants (pour 11), affirment les auteurs. L'un des traitements donnait même de moins bons résultats que les molécules déjà présentes sur le marché.
"On ne pose pas toujours les bonnes questions"
Interviewé dans l'émission CQFD mercredi, Bernard Burnand, médecin-chef à l’Institut universitaire de médecine sociale et préventive de Lausanne, ne se dit pas surpris de ces résultats. Et pointe notamment des méthodes d'évaluation pas toujours optimales: "Généralement, ce que l'on vise c'est un essai comparatif 'randomisé', où les patients sont tirés au sort pour (tester les nouveaux médicaments). Mais ce plan d'étude n'est pas toujours réalisé".
Selon le spécialiste, les bonnes questions ne sont pas toujours posées: "On interroge rarement les patients pour savoir ce qui est important, pour eux". Il constate également une pression constante provenant de diverses sources: "On peut comprendre l'industrie (pharmaceutique), par exemple, qui n'a pas forcément beaucoup d'années pour pouvoir vendre un médicament qui a mis longtemps et coûte très cher à développer".
"En Suisse, on peine un peu"
Bernard Burnand observe une certaine difficulté à évaluer les technologies médicales, en Suisse également. "On voit bien les difficultés: la demande des ressources, des expertises. En Suisse, on peine un peu. Il y a eu des tentatives de lois pour améliorer cette capacité et de mettre sur pied une agence des nouvelles technologies mais elles n'ont pas passé la rampe", rapporte-t-il.
En outre, le spécialiste souligne un manque de compétences chez les médecins à interpréter les résultats d'études: "Ils ne sont insuffisamment formés à lire de manière critique une étude (...) Ce n'est pas toujours facile à comprendre et à s'assurer qu'il n'y ait pas un problème ou une erreur".
Et de conclure: "On a souvent tendance à surinterpréter, à regarder le bénéfice en rose et à pas trop se soucier des inconvénients".
Propos recueillis par l'émission CQFD
hend