Venice Time Machine, initié en 2013 par l'Université Ca'Foscari, l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et les Archives d'Etat de Venise, a pour but de permettre, grâce à la numérisation et l'analyse de grandes séries archivistiques anciennes, la reconstruction du développement urbain et social de la Cité des Doges à travers l'Histoire.
Le projet a déjà permis la numérisation de centaines de milliers de documents datant du XVIe au XIXe siècle, dont l'étude est désormais possible grâce à une série de prototypes de moteurs de recherche utilisant notamment de nouvelles méthodes de reconnaissance des écritures manuelles.
La méthodologie de Venice Time Machine, déjà soutenue par plusieurs projets du Fonds national suisse et un projet européen, s'est aujourd'hui étendue à des dizaines de villes en Europe grâce à un financement de la Commission européenne.
L'EPFL surprise
L'EPFL a appris "avec surprise" la nouvelle de la suspension du projet par le biais du communiqué des Archives d'Etat de Venise sur leur site internet, a-elle indiqué lundi. Ce communiqué a aussi été envoyé par courriel aux différentes institutions vénitiennes, mais pas à l'EPFL.
Vendredi dernier, une lettre transmise par courrier électronique et adressée à la Présidence de la haute école lausannoise a indiqué la suspension de la collaboration. Durant la semaine précédente, Frédéric Kaplan, directeur du projet Venice Time Machine, s'était entretenu par vidéo-conférence avec Gianni Penzo Doria, le nouveau directeur de l'institution vénitienne, entré en fonctions le 2 septembre.
Après l'établissement en 2014 d'un cadre général fixant les objectifs de partage des documents et de la recherche, puis d'une collaboration jugée "très positive" avec l'Archive, notamment sous la conduite du directeur Raffaele Santoro, une discussion institutionnelle était en cours pour la formalisation précise du droit de licence des images numérisées, dans le but de leur réutilisation par la communauté de recherche.
Sans une rencontre préalable, le nouveau directeur a décidé de suspendre la discussion. Cette situation met potentiellement en péril plusieurs projets scientifiques en cours et l'accès du grand public aux résultats de cette recherche, selon l'EPFL.
Accès total, libre et gratuit
La haute école lausannoise s'étonne de ce revirement à 180 degrés, préjudiciable à la valorisation de ces archives et alors même que les Archives d'Etat de Venise ont largement bénéficié des fonds investis dans le projet. Signe de la reconnaissance mutuelle de la qualité de la collaboration, deux personnes formées et payées par l'EPFL pendant plusieurs années ont finalement rejoint des postes-clés au sein des archives italiennes.
Sur le fond, l'EPFL et ses partenaires sont convaincus que la mission institutionnelle des acteurs publics, tels que les universités et les archives, est de prévoir un accès total, libre et gratuit aux sources historiques et aux informations extraites. Cela dans le but de permettre à la communauté internationale des chercheurs de les analyser et d'en tirer les interprétations appropriées au progrès des connaissances.
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Ce progrès, seul but poursuivi par nos institutions, implique des stratégies de coopérations stables sur le long terme, par-delà les changements politiques et institutionnels, écrit l'EPFL.
La haute école et ses partenaires espèrent qu'une convergence sera rapidement possible pour permettre la poursuite de ce projet dont les principes d'ouverture et d'accessibilité pour une libre circulation de la connaissance sont alignés non seulement avec les orientations de l'Europe mais aussi les évolutions récentes de la loi italienne.
ats/sjaq