Les Etats-Unis font figure de pionniers dans l'agrémentation des transports ferroviaires, notamment grâce au colonel Pullman qui crée les premiers wagons-lits dès 1867.
"L'ingénieur belge Georges Nagelmackers décide d'importer ce concept en Europe et crée en 1872 un réseau international de trains de luxe qui intègre voitures-lits et voitures-restaurants: la Compagnie internationale des wagons-lits", a expliqué l'historien spécialiste des chemins de fer et commissaire de l’exposition "Wagon-Bar" Arnaud Mettetal dans l'émission Tout un monde de la RTS. Cette exposition vient de s'ouvrir aux Rencontres d’Arles.
Du raffinement à l'origine
Un nom en particulier engendre rapidement une certaine fascination: l'Orient-Express. "La manière dont est présentée la voiture-restaurant par la Compagnie des wagons-lits appuie sur la dimension luxueuse: un cuisine traditionnelle française, un service à bord extrêmement raffiné et du matériel de qualité, entre couverts, vaisselle, argenterie", détaille Arnaud Mettetal.
Ce raffinement prévaut durant quelques décennies, par exemple dans le train bleu qui relie à l'origine Calais à Vintimille en 1970. Au menu: foie gras de canard truffé à 17 francs, saumon fumé à seize francs, canard à la danoise, 20 francs.
Une cuisine de 8 m2
Les menus comportent alors entrée, plat, fromage et dessert, généralement accompagnés de bon vin, voire de cigares. Ils sont mitonnés à bord du train dans une cuisine roulante de 8 m2, ce qui requiert une organisation logistique, un savoir-faire et des technologies exigeantes.
Les premières voitures restaurant pèsent 59 tonnes. Elles gagnent des fourneaux électriques dans les années 1920 et des frigos dans les années 1930. Le défi sera de les alléger toujours plus et de trouver un modèle économiquement rentable.
À la fin des années 1950, on teste les wagons en libre-service, les plateaux express dont le revêtement novateur permet une inclinaison à 30 degrés sans que rien ne glisse, ou les mini-bars à sandwichs ambulants.
Dans les années 1970, la clientèle ne souhaite plus s'installer pour avoir une gastronomie traditionnelle lourde
"L'augmentation de la vitesse des trains et l'augmentation de leur exploitation fait qu'il est plus compliqué d'organiser le ravitaillement des trains et de la cuisine. On privilégie finalement un modèle qui se base plutôt sur le domaine de l'aviation, où on cuisine tout à l'extérieur des trains", relate Arnaud Mettetal.
Il cite également une évolution des pratiques alimentaires dans la société en général. "Dans les années 1970, la clientèle ne souhaite plus s'installer pour avoir une gastronomie traditionnelle lourde", précise-t-il.
Des wagons McDonald's
Les compagnies de train continuent d'expérimenter. En Suisse par exemple, on introduit un "Fromage express" qui sert de la raclette à volonté, ou encore deux wagons McDonald's au début des années 1990.
Et si les TGV français se cantonnent depuis longtemps à des croque-monsieur et quelques plats réchauffés à l'emporter, les trains helvétiques choisissent au début des années 2000 de revenir à un vrai wagon-restaurant avec nappe blanche, service à table et menu plutôt varié.
"Vous n'avez quasiment plus que du 'convenience food' dans les gares. Il fallait trouver quelque chose de complémentaire. Et les wagons-restaurants sont de plus en plus fréquentés entre les repas, pour boire un verre", constate Mario Varone, directeur de CFF Historic Fondation pour le patrimoine des chemins de fer suisses.
Quoi qu'il en soit, avec le retour en grâce des trains de nuit, la restauration à bord pourrait bientôt retrouver son raffinement d'antan, également sur les lignes internationales.
Sujet radio: Caroline Stevan
Adaptation web: vkiss