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Des écrans publicitaires ciblent les clients dans des magasins

L'intelligence artificielle : qu'est-ce que ça change pour les consommateurs ?
L'intelligence artificielle : qu'est-ce que ça change pour les consommateurs ? / A bon entendeur / 32 min. / le 12 mars 2024
L’intelligence artificielle est de plus en plus présente dans la vie des consommateurs. Dans certains magasins, des écrans filment les clients pour diffuser des publicités qui les ciblent. Les grandes marques, elles, font déjà appel à l’IA pour élaborer les recettes de certains produits.

Ressemblant à première vue à des écrans publicitaires classiques, les dispositifs de l’entreprise Advertima Vision, basée à Saint-Gall, sont munis de deux petites caméras qui filment discrètement les personnes qui passent. Les données de ces clients sont analysées en temps réel pour les profiler et diffuser une publicité ciblée. Migros teste actuellement dans trois centres commerciaux ce système, qui a déjà été mis en place dans tous les supermarchés Spar.

Des senseurs 3D "détectent en temps réel le nombre de clients dans le magasin en face de l'écran", explique mardi Iman Nahvi, directeur d’Advertima Vision dans l’émission A Bon Entendeur de la RTS. "Le système permet aussi d’estimer le sexe, l'âge, la composition du groupe, par exemple si quelqu'un est avec un enfant".

>> Revoir le sujet du 12h45 sur la publicité ciblée grâce à la reconnaissance faciale :

La publicité ciblée grâce à la reconnaissance faciale pose un problème d'anonymat
La publicité ciblée grâce à la reconnaissance faciale pose un problème d'anonymat / 12h45 / 2 min. / le 29 juin 2017

Des produits inventés par l'IA

Aujourd’hui, l’IA est présente à de nombreux échelons de la consommation. Certaines boissons ou aliments ont ainsi été entièrement élaborés par des outils numériques. A Zurich, Vivi Kola a utilisé ChatGPT pour créer Vivi Nova, une boisson à base de baies d’haskap, de chicorée, de gingembre et de citron vendue en supermarché.

"On voulait une boisson avec des caractéristiques à la mode. Ça veut dire qu'elle soit bonne pour la santé, avec peu de sucre et des bienfaits", raconte Camilo Antezana, directeur général de Vivi Kola. "ChatGPT nous a proposé des ingrédients très intéressants auxquels nous n’avions pas pensé, par exemple les baies de haskap, une baie qui contient beaucoup de principes antioxydants, dont nous n’avions jamais entendu parler."

ChatGPT a également trouvé le nom du produit et c’est l’IA, elle aussi, qui en a réalisé le design, en deux jours à peine. La démarche n’est pas unique: Coca-Cola a également créé une boisson à l’aide de l’IA, tout comme le brasseur allemand Beck’s.

Prédire les envies des consommateurs

A Gand, en Belgique, l’entreprise Foodpairing met son système d’intelligence artificielle au service de marques telles que Nestlé, Danone ou Mondelez. Ses algorithmes ont développé toute une série de produits déjà présents sur le marché, comme le Philadelphia au chocolat Milka ou certains arômes de chips de la marque Pringles par exemple.

"Dans notre laboratoire, nous analysons chaque jour une centaine de produits provenant du monde entier, ce qui nous permet de connaître la composition chimique de tous ces produits", explique Bernard Lahousse, responsable commercial de Foodpairing.

"Nous emmagasinons également des données provenant de réseaux sociaux, de recettes qui sont lancées sur le marché. Sur la base de toutes ces données, nous pouvons prédire ce que les consommateurs vont aimer, ce qu'ils vont acheter et le succès sur le marché", poursuit-il.

"Une aide supplémentaire"

Dans le cadre du reportage de la RTS, l’entreprise a inventé en quelques instants un chocolat destiné aux millennials (personnes nées entre le début des années 1980 et la fin des années 1990, ndlr) suisses: un chocolat noir, parfumé au citron et à la crinière de lion (un champignon japonais réputé bon pour le cerveau), qui apporte un goût terreux au produit fini.

C’est Peter Coucquyt, chef étoilé et cofondateur de Foodpairing, qui a fabriqué le chocolat, selon la recette en question. "Vous devez voir l'IA comme une aide supplémentaire en cuisine", commente-t-il. "Elle nous aide, nous guide bien plus vite vers l'objectif qu'on a en tête. Dans le cas de ce chocolat, j'aurais pu faire des tests avec différents arômes et chercher quel arôme citronné va le mieux, mais l'IA l’a fait pour moi."

L'IA est aussi de plus en plus utilisée pour sa puissance de prédiction. A Genève, la friterie Belga fait par exemple appel à un outil d’IA pour évaluer la consommation de ses clients. Parmi les facteurs qui influencent l’appétit des Genevois se trouvent bien sûr la météo, le jour de la semaine, mais aussi les résultats du Servette HC.

Pour le patron Julien Legrand, l’objectif est évidemment financier, mais l’outil lui permet également de mieux gérer son personnel: "Quand il y a un sureffectif, les employés sont derrière le comptoir et s'ennuient un peu. A long terme, ce n’est pas bon. A contrario, quand ils sont en sous-effectif, ils sont pressés comme des citrons, ce qui peut mener à des arrêts maladie ou des burn out".

Valérie Demierre, Martin De Buck, Régis Migy, Linda Bourget

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"La Confédération fait preuve d’attentisme"

L'IA repose sur l’exploitation de volumes de données considérables, de la meilleure qualité possible. Celles-ci doivent donc être collectées, ce qui pose des questions en termes de vie privée et d’intégrité numérique. Elles peuvent par ailleurs être utilisées à des fins problématiques.

"Certaines plateformes sont de véritables fabriques de 'fake news', qui peuvent déstabiliser la démocratie, la sphère privée et l’Etat de droit", observe Olivier Feller, conseiller national (PLR/VD). "J’ai le sentiment que la Confédération fait preuve d’un peu trop d’attentisme."

Le conseiller national souligne que contrairement à la Suisse, "les choses bougent à l’international". "Au niveau de l’Union européenne, une réglementation sur l'IA entrera prochainement en vigueur. Dans quelques jours, c’est le Conseil de l’Europe qui va accepter une convention cadre concernant l’IA. Et pendant ce temps, le Conseil fédéral nous dit qu’il faut attendre", regrette-t-il.

>> Revoir les précisions du 19h30 :

Intelligence artificielle : pas de régulation en vue côté suisse
Intelligence artificielle : pas de régulation en vue côté suisse / 19h30 / 2 min. / le 26 juillet 2023

Pas de réglementation avant fin 2024

Le gouvernement a en effet mandaté un état des lieux des réglementations possibles l’année dernière dont les résultats ne sont toujours pas connus. L’Office fédéral de la communication refuse de s’exprimer sur la question de l’IA avant fin 2024.

De son côté, Olivier Feller plaide pour une reprise de l’approche européenne. Les plateformes d'IA sont différenciées en fonction de leurs risques", explique-t-il. "Il y a des plateformes qui présentent un risque élevé et celles-ci sont interdites, par exemple les plateformes qui permettent de détecter les émotions des travailleurs sur le lieu de travail. Et puis il y a des plateformes qui sont soumises à autorisation, par exemple des systèmes qui permettent de faire de la chirurgie assistée."